(Québec) Les circonstances entourant le départ de Tony Tomassi du cabinet soulèvent plusieurs questions auxquelles seule une enquête policière pourra répondre. Le député a-t-il facturé son kilométrage au gouvernement pendant la période où il utilisait une carte de crédit de la firme BCIA pour payer son essence? A-t-il déclaré au ministère du Revenu les avantages financiers que lui donnait BCIA? L'entreprise a-t-elle inclus les frais du député dans ses frais d'exploitation déclarés au fisc?
Mais plus encore : M. Tomassi a-t-il reçu d'autres avantages financiers de cette firme qui a bénéficié d'une aide substantielle du gouvernement du Québec? Est-il intervenu dans l'octroi de l'aide gouvernementale à BCIA?
Voilà autant de questions auxquelles le bureau de Jean Charest n'avait pas de réponses jeudi, pour la bonne raison qu'il s'agit là d'un domaine qui relève de la police et des enquêteurs du ministère du Revenu.
Ces questions sont troublantes parce qu'elles soulèvent un doute sur l'intégrité d'un élu. Malgré les débats partisans en cours, nous aimons croire que les hommes et les femmes qui font de la politique sont honnêtes. Voilà pourquoi le comportement du député Tomassi est grave : il confirme les préjugés. On peut accepter qu'un politicien fasse des erreurs, à la condition qu'il ait été de bonne foi et qu'il n'ait pas cherché à obtenir un avantage personnel dans son travail. Mais Tony Tomassi a accepté un avantage personnel d'une entreprise privée pendant qu'il était député. Il était donc redevable à cette entreprise lorsqu'il est devenu ministre, ce qui le rendait vulnérable à des pressions de la part de ses bienfaiteurs.
L'ex-ministre n'aura même pas eu le temps d'invoquer des raisons personnelles pour quitter le cabinet et le caucus du Parti libéral. Il est congédié dans le déshonneur.
À court terme, cette affaire permet à Jean Charest de se débarrasser immédiatement de son ministre qui était devenu un boulet pour le gouvernement. M. Charest n'aurait pu agir aussi rapidement sur la base des allégations de l'opposition dans le dossier des garderies, puisqu'il défendait les décisions de son ministre. L'affaire des cartes de crédit lui a ouvert une fenêtre qu'il a utilisée sans perdre une seconde. Personne ne pourra lui en faire le reproche, même pas dans la circonscription de Tomassi.
Fait révélateur, ce n'est même pas M. Charest qui a confessé son ministre avant le congédiement, c'est son chef de cabinet. Cela en dit long. Lorsque David Whissell a quitté le cabinet, en septembre, il l'a fait en point de presse, aux côtés du premier ministre. Son départ n'était pas lié à des doutes sur son intégrité personnelle, mais à une controverse politique sur le droit des gens d'affaires de conserver leur entreprise lorsqu'ils siègent au Conseil des ministres.
Autre fait révélateur : c'est un appel au bureau du ministre, possiblement d'un journaliste, qui a enclenché les événements de jeudi. Ce qui implique que le gouvernement ignorait tout de cette affaire et ce qui soulève des questions sur les précautions prises par le gouvernement pour se protéger contre de tels comportements.
Un dernier point : la majorité libérale à l'Assemblée nationale n'était que de quatre, incluant le président Vallières, qui ne vote pas. Claude Béchard est absent pour maladie, et Tomassi sera probablement absent du Salon bleu pendant plusieurs mois, trop occupé avec la police. Si je compte bien, ça ne laisse qu'une petite majorité d'un député au gouvernement...
C'est bien peu dans les circonstances.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé