Du nom de Canadiens-Français et de son importance... suite

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Tribune libre

Démontrer que les noms de Français-Canadiens ou de Canadiens-Français apparaissent déjà au 17e et au début 18e est loin d'être futile. Cela prouve que le vocable de Canadien est plurivoque dès son origine.


Dans un ouvrage de géographie publié à Lille en 1739, on parle déjà de trois Canadas : un Canada [amér]indien, un Canada français et un Canada anglais. Et en 1744, Charlevoix, notre premier historien, dira de Louis Joliet qu’il est « Français-Canadien » et écrira en toutes lettres « Québec, capitale du Canada français ». Le concept de Canadien-Français précède bien la Conquête.


Quoiqu’on en ait pu penser, nous n’avons jamais été seuls au Canada, et d’autres nations ont pu se prévaloir, a fortiori depuis 1840, du titre de Canadiens. Le déni de cette réalité explique la propension de certains, au fil du temps, à se considérer comme vrais ou seuls Canadiens véritables, une propension puérile entretenue dans le peuple et qui nous a terriblement entravés.


Drapés dans une fausse dignité compensatoire, refusant d’accepter la défaite et notre inéluctable minorisation au sein de la Confédération, nous avons ainsi perdu des ressources et énergies folles à tenter de maintenir en vain l’illusion de notre influence et de notre présence dans l’ensemble du pays, notamment en œuvrant à l’indépendance du Canada.


Et aujourd’hui, nous reconduisons le même processus illusoire en voulant se dire « Québécois de souche », « Québécois francophones » ou « majoritaires historiques », ne comprenant pas que, par le fait même, nous concédons non seulement le Québec, mais aussi surtout notre conviction intime de former une nation française, que nous nous abolissons nous-mêmes en fait. Empêtrés dans l’équivoque d’une identité québécoise d’origine coloniale, conduits de défaite en défaite, nous en sommes réduits à défendre la prépondérance du français sur la place publique, à contenir un bilinguisme institutionnel et d’État établi par la loi 101 elle-même. Car ne vous en déplaise, de par la volonté de ses auteurs, la loi 101 ne peut s’appliquer que dans le strict respect de la « communauté québécoise d’expression anglaise » et de ses institutions.


Dire qu’en 1967, les États généraux, notre Premier Ministre et le Général, considéraient tout naturellement Québec comme l’État national des Canadiens-Français!


Patriotes, ne comprenez-vous pas vous être faits floués?


Être Canadien-Français aura toujours été un combat, un acte de courage face à l’impérialiste britannique, mais aussi face à ses loyaux successeurs : les tenants des post-nationalismes canadien et québécois.


La québécitude mène à une assimilation accélérée, ne le voyez-vous pas?



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4 commentaires

  • Marc Labelle Répondre

    9 décembre 2021


    Monsieur Bouchard,


    Vous mentez de nouveau : le Général de Gaulle n’a pas utilisé le nom Canadiens-Français ou Français-Canadiens lors de son discours adressé au peuple le 24 juillet 1967.


    Il faudrait que vous appreniez à rapporter honnêtement les citations.  Et à les interpréter correctement : la langue est toujours affaire de contexte.


    Le seul gentilé utilisé par le Général de Gaulle pendant le discours fut « Français ».


    Sa visite au Québec avait pour but, révélera-t-il plus tard, de réparer l’abandon de la Nouvelle-France par Louis XV.  Au terme de son parcours du chemin du Roy, il s’adresse au peuple à partir du balcon de l’hôtel de ville de Montréal.


    Puisque nous sommes un rameau du peuple français, il parle aux « Français du Canada » afin de resserrer les liens.  Lui, qui avait modernisé la France quelques années plus tôt, fait le constat de notre propre progrès.  Tournant son regard vers l’avenir, il évoque les accords gouvernementaux pour que « les Français de part et d’autre de l’Atlantique travaillent ensemble à une même œuvre française ».  Son discours atteint l’apogée : « Vive le Québec libre ! »  Ne vous en déplaise, ce fut là le plus formidable coup de pouce en faveur de la québécitude nationale en gestation.


    Il ajouta « Vive le Canada français ! », pour ne pas oublier les quelques francophones hors Québec, et « Vive la France ! ».  On remarquera qu’il a dû préciser Canada « français » parce que les Français étaient devenus minoritaires dans ce pays depuis plus d’un siècle en cette année fédérale commémorative.

    https://www.youtube.com/watch?v=amApwFT49JQ


  • Gilles Verrier Répondre

    5 décembre 2021

    Merci M. Bouchard de ces intéressants détails. Ils méritent qu'on les retiennent pour la profondeur qu'ils donnent à notre ancrage historique. Je continue de m'efforcer, pour ma part, en toute modestie, à faire admettre la nation canadienne-française à la table d'un peuple québécois, décrit désormais dans une loi statutaire comme un peuple  plurinational et diversitaire... mais sans nous ! L'amendement proposé à la loi 99 (2000) par la Fédération des Canadiens-Français, à l'occasion des vingt ans de ladite loi, vise justement à nous sortir d'une exclusion discriminatoire, bien que passée inaperçue sur le coup. La mobilisation en vue d'une révision des Considérants de la loi 99 (2000) est plus que jamais d'actualité. C'est un combat à la mesure de nos forces, on peut le gagner, un combat pour lequel il faut tenter une mobilisation des éléments les plus patriotiques chez les nôtres. L'État du Québec, un prétendu état national, qui nous tient pour acquis par la réclame mais toujours chiche à livrer, est le dernier à s'attendre à ce qu'on frappe à sa porte. Unissons-nous en masse pour une initiative de convergence, une prise de conscience, un rebond existentiel.


  • Normand Bélair Répondre

    4 décembre 2021

    J’avoue que c’était de grands aventuriers, imaginez voyager une grande partie du continent Nord-Américain cherchant…tout, quoi! Bravo à des gens comme Louis joliet pour leur ténacité et surtout leur courage. Des gens qui avaient une grande vision pour leurs mère-patrie, la France.


    Permettez-moi de soulever quelques coquilles dans votre texte. Vous dites ceci « Cela prouve que le vocable de Canadien est plurivoque dès son origine.» Comment faites vous pour affirmer ceci après seulement une phrase? La seule (supposée) preuve arrive dans votre prochain paragraphe! Justement dans ce paragraphe vous écrivez « Dans un ouvrage de géographie publié à Lille en 1739, on parle déjà de trois Canadas : un Canada [amér]indien, un Canada français et un Canada anglais » Je veux vous faire remarquer qu’ici on parle de géographie et non d’identification et d’utilisation du terme pour nommer des gens. La phrase se lit comme suit : Il y a un Canada là où les Indiens habitent, un Canada là où les Français habitent et un endroit où l’on retrouve des Anglais. Ce ne sont pas des nominations de gens mais bien des lieux géographiques qui décrit là ou sont les Indiens, les Français et les Anglais.


    Ensuite une autre mauvaise interprétation de texte quand vous affirmez ceci : « Et en 1744, Charlevoix, notre premier historien, dira de Louis Joliet qu’il est « Français-Canadien » et écrira en toutes lettres « Québec, capitale du Canada français ». Le concept de Canadien-Français précède bien la Conquête.»


    Nous sommes rendus en 1744, quelques 140 ans après l’arrivée des premiers colons, on est presque à la Conquête. Quand vous dites que Louis Joliet est Français-Canadien, il faut lire que oui c’est un Français qui est dans le processus de se transformer en Canadien, il adopte le pays, il va devenir Canadien. Son rêve n’est pas de devenir Français-Canadien mais bien de devenir Canadien! Alors lorsque vous avancez le terme « Canadien-français » ceci veut dire que vous êtes Canadien cherchant à devenir Français?


    Et non, le concept de « Canadien-français » NE PRÈCEDE PAS la Conquête. Vous n’avancez aucune preuve de ceci. C’est vraiment avec l’arrivée de l’autre peuple, les Anglais, que le besoin de se distinguer des autres va se faire sentir, pas avant quand nous étions essentiellement le seul sur le territoire de la Nouvelle-France. Pourquoi se donner un doublon quand vous êtes seul à coloniser une terre? Ce besoin de doublons est inutile quand vous ne voyez que des semblables. La seule raison pour un doublons est quand un veut devenir un autre comme dans le cas de Joliet qui veut devenir Canadien. La mention de Québec; oui la ville est la capitale du territoire géographique du Canada là où les terres sont occupées par des Français. Ce ne sont pas des « Canadien-français » qui occupent les terres. La citation ne dit pas ça.


    À propos de votre paragraphe sur vos définitions du Québécois…mais, nous ne cédons rien du tout! Nous prenons de facto ce que nous pouvons prendre dans le contexte canadien actuelle! Il est illusoire de croire que « notre conviction intime de former une nation française, » au Canada va se réaliser un jour. C’est une utopie.


    Et finalement quand vous dites « La québécitude mène à une assimilation accélérée, ne le voyez-vous pas?» Êtes-vous sérieux? Non mais vous ne rigolé pas là? Si la période du Québécois est marquée par la défaite en défaite, sachant très bien qui nous n’avons jamais depuis la Conquête venu si près de notre but de faire un pays, alors expliquez-nous comment vous qualifiez toute la période de la Conquête jusqu'aux années ’60?


    Défaite, après défaite, après défaite ça ne finit plus, les livres d’histoire en sont tous remplis de les défaites lorsque nous étions tous là à regarder la parade passer pendant que les Anglais nous ont tout pris, nos terres, nos institutions, nos écoles, bref tout!


    Vous dites toujours non?


    Nommez-nous une seule bataille gagnée par les Canadiens-Français? Une seule bataille là où nous avons avancez dans statut et notre reconnaissance par le Canada.


    P.S. La photo du Général DeGaulle...est-ce c'est quand il est venu dire «Vive les Canadiens-français, Vire les Canadiens-français libre» ?


    • Éric F. Bouchard Répondre

      7 décembre 2021

      Je suppose qu’il faut répondre… Oui, en 1967 comme en 1940, le Général s’est précisément adressé aux « Français du Canada », aux « Français-Canadiens » ou aux « Canadiens-Français » et oui, il a proclamé « Vive le Canada-Français! » immédiatement après son « Vive le Québec libre! ». Réécoutez ses discours. Dans son esprit, et dans l’esprit de tous les nationalistes, un Québec libre était un Québec enfin reconnu en tant que Canada-Français, en tant qu'État national des Canadiens-Français.
      Une victoire des Canadiens-Français? Vous êtes sérieux? En 1763, les Canadiens-Français n’étaient que 70000 face à l’Empire britannique. Ils n’avaient conservé que leur liberté de culte. Et pourtant, avec ténacité et courage, ils ont fait reconnaître leurs institutions, leur langue et leurs lois. Ils ont su faire grandir une société française de langue et de culture toujours plus riche, et ce, en dépit des exactions coloniales et du désastre patriote. En 27 ans, ils ont su retrouver une province de Québec où ils seraient majoritaires, un État qu’ils pourraient transformer peu à peu en État national. Et on en était rendu là en 1967, avec près de 6 millions d’âmes.
      Puis la québécitude est venue, avec ses défaites, ses reculs, sa dénationalisation et maintenant notre déclin démographique et l’anglicisation systémique de nos enfants. Ceux qui nous y ont mis devraient au moins admettre leur erreur.