Élections «provinciales» : la raison pratique d'un débat en anglais.

F5ce4859ce632d24fb9252ae71aecf6b

Tribune libre

Dans le cadre des présentes élections, nous avons récemment assisté à une «première» : un débat télévisé en anglais entre les chefs et «porte-parole» des quatre principaux partis politiques en lice. Certains se sont offusqués à bon droit de ce curieux précédent, d'autres au contraire se sont évertués à le justifier. Qu'en est-il en réalité? Pour y répondre, il faut tout d'abord se poser les questions suivantes:


Les «anglos» ont-ils écoutés le débat en français, tenu quelques jours plus tôt?

En général, les «anglos» regardent-ils la télé québécoise francophone?

En général, les «anglos» écoutent-ils la radio québécoise  francophone?

En général, les «anglos» lisent-ils les journaux québécois francophones?

En général, les «anglos» lisent-ils les livres québécois écrits en français?


Poser ces questions, c'est y répondre. C'est non, non et encore non.


Les «anglos» vivent depuis toujours en vase clos, dans leur monde aseptisé, où tout ce qui les atteint est filtré par leurs médias communautaristes qui les confortent dans leur sublime et hautaine indifférence.


Pour les rejoindre, pour leur parler directement  sans le miroir déformant de la Gazette, du Suburban ou de CBC et les préjugés qu'ils colportent à notre endroit, nous n'avons pas le choix: il faut faire un pas vers eux et se résoudre à leur parler dans leur langue, qui n'a aucun statut officiel, en espérant qu'ils arriveront un jour à comprendre notre point de vue et à nous accepter tels que nous sommes. Vaste programme en vérité!


Cette situation bien particulière et qu'on ne rencontre qu'ici, analysée de toute autre façon et dans tout autre contexte, serait vue comme totalement inacceptable et absolument intolérable. Et pourtant on est encore rendu là. C'est dire qu'avec la révolution tranquille et l'élan avorté vers l'indépendance qui s'en est ensuivi, on ne s'est jamais rendu vraiment bien loin. En fait on se retrouve encore au milieu de nulle part, entourés d'étrangers qui continuent de nous ignorer en nous toisant du haut de leur grandeur factice.


Le raisonnement qui a consenti au final à un débat en anglais pour les non-francophones s'avère infiniment malheureux mais néanmoins, paradoxalement, absolument nécessaire dans le contexte provincial actuel. Ces contradictions se doivent d'être courageusement assumées en ne faisant montre d'aucune fierté particulière. Par contre le fait que certains commentateurs, se disant «progressistes», «ouverts» et «pragmatiques», se fendent en quatre en se délectant de leur libéralisme doucereux et en percevant leur attitude complaisante comme une simple manifestation de notre proverbiale grandeur d'âme en dit très long sur la dégradation perverse de notre volonté d'affirmation collective et de notre mentalité en général qui entretemps bascule peu à peu, inexorablement, dans la culpabilisation existentielle et le rejet de ce que nous avons été.



Laissez un commentaire



1 commentaire

  • Gaston Carmichael Répondre

    22 septembre 2018

    Aux questions que vous posez au début de votre texte, j'en ajouterais deux:


    1- Si je parle anglais aux anglos, vais-je arrivé à les convaincre du bien-fondé de l'indépendance?


    2- Si je parle aux anglos, est-ce que je vais arrivé à les convaincre de voter pour un parti qui propose un pon gouvernement provincial, autre que le PLQ?