Le NOUS qui dit NON

... et qui, en le disant, se met au monde

La Deuxième Révolution tranquille est en cours

Conflit étudiant - grève illimitée - printemps 2012

Le discours historique du 7 avril 2011 au Monument National de Gabriel Nadeau-Dubois consacre le lien entre les évènements du printemps arabe de 2011 et le nôtre, Étudiant, de 2012.
Déjà il était clair depuis les évènements du printemps 2011 en Tunisie et au Caire que la rétrograde Coalition pour l'avenir du Québec de François Legault était un projet anachronique. Legault comme Facal ou les membres du prétendu Institut économique de Montréal, n'avait pas compris que le monde allait changer, que les évènements de la Place Tahir allaient s'étendre à la planète et que son projet déjà mis en oeuvre par Lucien Bouchard en 1996 n'avait plus de place dans le présent. Les munitions et séminaires donnés aux dirigeants politiques afin de mater la résistance des populations face aux mesures requises à la mise en place du nouvel ordre néolibéral deviennent inefficace quand la foule devient marée humaine. Pas plus que la version poubelle de cette nouvelle droite désopilante et pathétique ("mondou cé don ben effrayant madame chose") à la Martineau-Dumont-Duhaime qui n'avait rien d'autre à proposer que le renforcement d'une utopie économiste crépusculaire dont l'époque mortifère de Duplessis fur le meilleur exemple.
Le printemps arabe a aussi montré qu'il n'y a plus rien à attendre des gouvernants, pas plus que des partis d'opposition opportunistes tout aussi incorporés au système politique actuel. Car c'est l'ensemble des structures politiques qui est remis en question parce que dans leur forme elles n'arrivent plus à transformer la réalité pour répondre à l'imaginaire collectif.
Quels que soient les partis politiques qui prennent le pouvoir, ces structures obsolètes ne peuvent que reproduire le même type de gouvernements.
Depuis le 2 mai 2011, plus rien n'est pareil au Québec.
Les Québécois ont réalisé qu'il n'est plus suffisant de résister à Ottawa. Que la résistance ne suffit pas, qu'il faut exister et pas seulement en parler. Il faut sortir de la prison canadienne et de ses structures qui emprisonnent la forme de notre société qui ne nous ressemble plus. Les indépendantistes ont bien compris que les partis politiques taillés sur mesure pour fonctionner dans le système parlementaire britannique ne pourront jamais accoucher de l'indépendance du Québec. Tout au plus certains d'entre eux peuvent-ils se dire favorables à la souveraineté et prendre le pouvoir, et il faut sans doute s'en réjouir, mais, occupés qu'ils seront à gérer la dépendance politique et économique et leur place dans les sondages, ils ne pourront se consacrer à la libération du Québec.
C'est le régime parlementaire britannique qui formate nos politiciens - ça commence avec les serments à la reine et se poursuit avec la division binaire entre les deux côtés de la chambre, les langues de bois, la ligne de parti, les mensonges, les médias qui n'attendent que les crises, les gaffes et les scandales pour vendre des copies puisque leur subsistance en dépend quand ils ne sont pas au service des intérêts privés pour confondre l'opinion publique, le gouvernement qui possède les pleins pouvoirs pendant quatre ans, les limousines, les cravates etc. Et c'est fort au point que les courageux démissionnaires en viennent à se repentir de s'en être échappés.
Et voilà que se manifeste cette nouvelle génération étudiante que personne n'attendait, à laquelle on n'a plus rien à apprendre parce qu'elle a tout compris. C'est elle qui nous parle. Nous parle d'elle et de NOUS. Non corrompue, non brisée par les dettes, la précarité, les référendums perdus, elle a posé le geste le plus simple qui consiste à dire NON devant ce qui n'a pas de bon sens.
Comment vont-ils s'y prendre pour la briser, celle qu'ils n'avaient pas vu venir. Devant ce spectacle, la nation québécoise se reconnaît. Ce NON les Québécois le portaient en eux mais avaient appris à le refouler.
Une nouvelle génération s'est levée. Preuve que notre nation est vivante et a sa place parmi les autres nations.
La démocratie avertie, cultivée, civilisée, pacifique a trouvé sa place dans la rue. Elle impressionne. Jamais n'a-t-on vu pareil défilé. Ma ville a enfin pu montrer qu'elle pouvait servir à autre chose qu'au trafic automobile et redevenir le lieu de la démocratie. Ce faisant, la nouvelle génération de Québécois démontre aussi son enracinement dans la culture française. La finesse et l'humour des textes, des images, des banderoles et pancartes des manifestants capables d'exprimer à la fois dignité, fierté et colère n'avaient rien à envier aux slogans de Mai 68. Les vêtements, les costumes, les maquillages et les masques ont aussi démontré une créativité généralisée qui n'a rien à envier aux grandes capitales de la mode. Oubliez examens et reprises de cours.
Tous ceux qui ont participé à ce mouvement devraient être crédités de leur session sans avoir aucun cours à reprendre d'abord pour service à la nation et aussi parce qu'ils auront plus appris que sur les bancs d'école, et que cette leçon les aura transformés pour le reste de leur vie, que désormais ils sauront le profit qu'ils peuvent tirer du savoir autant que de l'action.
Au 16e siècle, le céramiste et philosophe de l'agriculture français Bernard Palissy qui écrivait une langue proche de celle que l'on parle encore au Québec, proclamait que l'ignorance est un poids qui empêche l'homme de s'élever. Lui qui gaspilla une partie de sa vie en prison à cause des guerres de religion aurait manifesté avec les étudiants.
Rien de plus beau que cette foule dans les rues de Montréal, de Sherbrooke et de Québec. À remarquer aussi comment les représentants des cégeps, collèges et universités anglophones se sont joints aux manifestations montréalaises, ce qui montre notre capacité de vivre ensemble au-delà des divisions entretenues par les intérêts clientélistes des partis politiques.
La nation québécoise est entrée dans un nouveau paradigme. Tous ceux qui ne l'auront pas compris seront dépassés. La Deuxième Révolution tranquille est en cours. Rien ne peut pas arrêter ce type de changement. Tout, absolument tout ce qui tentera de s'y opposer de le récupérer pour le réduire aux limites du monde d'avant va être emporté par elle. Car telle est la sagesse de la vie humaine : le peuple soumis qui rêvait de liberté comme d'un au-delà, a engendré des enfants libres ici et maintenant.


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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    8 avril 2012

    De plus, si nous accompagnons en masse (le grey power) les étudiants pour l'abattage (non halal:-) de la bête, nous nous inscrivons à leurs côtés comme témoins d'une époque où la victoire ne se limitait pas à l'argent mais surtout au ralliement pour une nation forte...

  • Archives de Vigile Répondre

    8 avril 2012

    Il faut maintenant terrasser la bête - le gouvernement - à l'agonie (à l'agonique dirait Miron). Il ne faut pas reculer devant la bête néolibérale car elle n'a pour elle que le poids de ses mensonges (la croissance, le déficit, la compétitivité). Il faut descendre dans la rue et terminer le travail, évacuer ces rapaces sans conscience et dénuées de sentiments. Ne jamais baisser le regard devant la bêtise, c'est ça, être humain...

  • Archives de Vigile Répondre

    8 avril 2012

    Oui c'est le début d'une autre révolution tranquille.
    La révolution des jeunes qui veulent être actifs
    et instruits sans s'endetter.Ils ont raison et nous devons
    les encourager à continuer.