Faire de la politique autrement... la poule ou l'oeuf?

Tribune libre

Faire de la politique autrement?
Bien sûr! Le problème est que, faire de la politique autrement nécessite une vision différente de la politique… de la part des électeurs! Certains diront le contraire, mais nous sommes encore une société démocratique, et ce sont les électeurs qui jugent (bien sûr, avec l'aide des médias, la désinformation, le lobby, etc. Mais c'est un autre débat). L'électorat ne serait-il pas en partie responsable de cette politique malsaine?
Je m'explique.
Les Québécois veulent du changement, du nouveau, du frais. "Y'en a marre des langues de bois!" Mais ceux qui osent se délier la langue sont ensuite rabroués par les autres partis, mais surtout... par les électeurs! (ou alors les sondages sont biaisés? Je pense à Léger Marketing avec son commentaire sur le "trip d'ego" de Khadir).
Parlant d'Amir... et l'Amphithéâtre de Québec. Il était d'abord seul à se tenir debout, contre vents et marées, et a fini par délier les langues des opposants du projet de loi 204 au sein du PQ. Mais il en aura payé le prix politique, du moins, c'est ce qu'il en appert des récents sondages. Il a fait selon ses convictions - ce que trop peu de politiciens font - sans se soucier de l'opinion publique alors plutôt en faveur du projet.
C'est ça faire de la politique autrement: risquer d'avoir l'air opposé au retour des Nordiques (ce qui n'est pas le cas), pour dénoncer une entente non avantageuse pour les Québécois. Mais qu'arrive-t-il ensuite? Ses détracteurs font le plein de munitions et ne manqueront pas de se faire du capital politique sur son dos. Pour preuve, quatre seulement ont démissionné du PQ, combien d'autres pensent comme lui? Et au PLQ? Amir est-il vraiment seul, comme plusieurs voudraient bien le laisser croire?
Tous à la remorque, en attente de voir de quel côté penchera l'opinion publique plutôt que d'alimenter sainement le débat. En quête d'amour, par opportunisme et partisanerie ; saisir l'occasion de commenter les déboires ou minimiser les exploits. Tout ces "malheurs" (parfois bénédictions imprévues) n'arrivent pas aux langues de bois qui elles, ne se mouillent pas, parlent en phrases creuses, et se laissent une porte de sortie pour éventuellement prétendre que ce qu'ils ont dit vaguement n'est pas en fait ce qu'on leur reproche avoir dit… n'importe quoi quoi!
Les autres partis - en fait leur ligne - étant tous au courant que la seule opposition de Khadir suffit à faire tomber le projet de loi, le regardent gentiment faire cavalier seul (ou presque) et risquer de se casser la gueule en laissant les médisants faire leur travail en propageant l'idée que les opposants au projet de loi sont nécessairement contre le retour des Nordiques... Ou même qu'ils n'aiment pas les gens de Québec!
C'est pas exactement ça la politique dont on ne veut plus?
Idem pour Parizeau en 1995! C'était pas "politically correct" de parler d'argent et d'ethnies, mais il mettait la table pour le tristement célèbre scandale des commandites. Et pour le vote ethnique, Ottawa avait effectivement accéléré l’octroi de la citoyenneté canadienne dans le but de contrer le "Oui". (en 1994 et 1995 respectivement, 40 500 et 43 850 naturalisations, alors que la moyenne annuelle, entre 1988 et 1998, fut de 21 733.) Il a lui aussi parlé sans édulcoration, mais comme d'autres (pensons à Kim Campbell, dans un tout autre contexte), son franc-parler s'est retourné contre lui.
Il y aurait encore plus d'exemples si les politiciens n'avaient pas la langue de bois par crainte de réprobation sociale et du coût politique (bien réel) du franc-parler et de la combativité envers les vrais enjeux, dont les moyens pour les gérer sont impopulaires.
Donc, les Québécois sont-ils vraiment prêts à accueillir une façon nouvelle, plus franche, plus honnête et surtout, non partisane de faire de la politique? J'en doute. Malheureusement. À moins de preuves contraires... Ce serait une réelle grâce de m'être fourvoyé...
www.simoncrepeault.blogspot.com


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3 commentaires

  • Yves Rancourt Répondre

    17 juin 2011

    Monsieur Crépeault,
    De mon humble point de vue, les gens ne réalisent pas à quel point le comportement de nos politiciens est conditionné par l'attitude des médias, par la peur même des médias qui, comme on le sait, sont capables de nous fabriquer des héros qui n'en sont pas, de nous faire adhérer à des partis politiques qui ne mériteraient pas notre appui et à nous amener à rejeter ceux qui pourraient le mieux défendre nos intérêts. On l'a vu le 2 mai: en mois de 15 jours, l'un des politiciens les plus adulés au Québec, un homme intègre et dédié à la cause nationale, a été effacé du paysage politique, et les médias y ont été pour beaucoup comme vous le savez.

    Si on veut un jour changer la politique, il faudra s'attaquer en priorité à des problématiques lourdes entourant le monde médiatique et qui affectent la qualité de notre démocratie, en particulier au problème de la forte concentration de la presse au Québec qui gangrène dangereusement notre rapport à la politique. Bien sûr, aucun parti politique ne veut toucher à cela de peur de heurter...les médias. Quand le rapport Payette a soulevé cette question l'automne dernier, le gouvernement s'est empressé, à peine 24 heures plus tard, de fermer la porte. Seul un mouvement citoyen réussira à amener un gouvernement à agir à cet égard.
    Changer de politiciens est la voie de la facilité mais changer la façon de faire de la politique, ça appelle des solutions pas mal plus larges que celles que certains envisagent.
    Salutations.

  • Archives de Vigile Répondre

    16 juin 2011

    La vraie et la fausse démocratie :
    http://www.dailymotion.com/video/xiyzhh_etienne-chouard-conference-le-tirage-au-sort-comme-bombe-politiquement-durable-contre-l-oligarchie_news

  • Jean-François-le-Québécois Répondre

    16 juin 2011

    @ S. Crépaeault:
    «Les Québécois veulent du changement, du nouveau, du frais...».
    Non, monsieur Crépeault. Ils ne savent pas ce qu'ils veulent, les pauvres Québécois.
    Ils votent pour le NPD sans connaître la moindre chose du programme de ce parti. Ils s'accrochent à des tentatives de compromis bâtards, comme le prétendu «autonomisme» de l'ADQ, comme si cela constituait une solution valable...
    Ils font à peu près tout, pour ne pas regarder la réalité en face. Et ne pas assumer les conséquences de leurs choix.
    Quand ils sont à court de prétextes, de fausses solutions, de compromis boîteux, les Québécois clament haut et fort qu'ils veulent... du changement, tout en sirotant une bière, devant la télévision...
    Quelle sorte de changement, spécifiquement? Dans quel but, à moyen ou long terme? Pour évoluer vers quoi, comme société? Ça... n'allez surtout pas poser ce genre de questions; vous allez vous faire traiter d'intellectuel, d'élitiste, ou je ne sais trop quoi.
    Pour que nous ayions une chance d'avoir notre pays, il faudrait que la masse se donne la peine de comprendre les enjeux actuels, pour le Québec.
    Et ce n'est pas qu'une affaire de «changement», de «nouveau», car les principaux enjeux sont les mêmes, depuis longtemps. On dirait que la façon dont ils vont cesser d'être des enjeux... sera quand nous serons finalement assimilés, et plus du tout maîtres chez nous. Et c'est ça dont rêve le Rest of Canada!