Harper et les armes à feu : un flirt électoral qui va trop loin

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Pauvre vous, M. Harper, on vous aurait donc mal cité?

Jeudi dernier, lors de son passage en Saskatchewan, le premier ministre Stephen Harper a déclaré ceci :


«Ma femme vient d’une région rurale où, évidemment, la possession d’une arme à feu n’était pas que pour les besoins de la ferme, mais aussi pour assurer un certain niveau de sécurité lorsqu’une assistance policière immédiate n’était pas disponible.»


Le lendemain, son parti référait à cette déclaration pour solliciter des dons auprès de ses partisans.


L’affaire a pris du temps à provoquer des remous dans les rangs des policiers, des avocats, du Barreau canadien et des politiciens québécois et fédéraux, mais lorsqu’ils ont commencé, ce fut le tollé.


Tout le monde avait compris la même chose, à savoir que le premier ministre ne voyait aucun mal à voir la population s’armer pour assurer sa propre sécurité.


Dangereuse idée, qui peut conduire à la mort de quelqu’un ! Et on ne peut ignorer que la légitime défense a ses limites. Tuer une personne, même involontairement, peut mener derrière les barreaux.


Bref, la petite sortie du premier ministre s’est transformée en dérapage. Alors, invité à s’expliquer, mercredi à Mississauga, Harper s’est déclaré membre du club des mal cités, jugeant tout simplement «ridicule» et démagogique de conclure qu’il invitait les gens à se faire justice eux-mêmes.


C’est vrai, ce n’est pas ce qu’il a dit, mais il a bien soutenu que les Canadiens pouvaient avoir des armes pour assurer leur sécurité. En d’autres mots, pour se défendre. Et il l’a répété mercredi.


«En fait, pendant des années, la possession d’armes à feu était largement répandue dans plusieurs régions de ce pays pour des raisons diverses, y compris la sécurité, sans que les gens se fassent justice eux-mêmes», a-t-il dit.


Or, ce n’est pas pour cela que des résidants sont autorisés à détenir des armes à feu, mais pour contrôler les bestioles qui menacent leurs cultures ou leur bétail, pour aller à la chasse ou pour faire du tir à la cible. Point.


Seuls les agents de la paix et de sécurité détenant un permis à cet effet peuvent avoir une arme pour des raisons de sécurité, ce qui veut dire, par conséquent, chargée. Tous les autres détenteurs d’armes sont obligés de ranger leur fusil de façon sécuritaire et déchargé, tout en conservant leurs munitions ailleurs — et, là encore, de façon sécuritaire.


Impossible, dans ces conditions, de se défendre face à un agresseur qui surgit à l’improviste. Alors quand le premier ministre revient à la charge avec cette histoire de sécurité, il encourage indirectement l’autodéfense armée. Qu’il le veuille ou non.


Le fait que le Parti conservateur ait sollicité des fonds dès le lendemain de la déclaration originale ne permet pas de croire à un geste improvisé. Alors, si ses mots ont dépassé sa pensée, il aurait dû profiter de cette chance de rectifier le tir, et ne l’a pas fait. Dans le contexte actuel où le refrain à la mode semble être «faisons peur au monde», voilà qui est préoccupant et, disons-le, irresponsable.


Mais voilà, son parti croit que ce thème des armes à feu est encore très vendeur… et à quelques mois des élections, pourquoi s’en priver ?



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