Le Pdg du Conseil de l'industrie forestière, Guy Chevrette
Photo: Rémi Lemée, La Presse
« Je m'abstiendrai de répondre aux attaques personnelles de M. Desjardins. »
Si les professions de foi de M. Chevrette exposées en conclusion son texte publié dans Le Devoir du 2009 07 06 intitulé « Réplique aux textes de Richard Desjardins - Après L'Erreur boréale, beaucoup de choses ont changé... » sont à pareilles à son engagement liminaire disant qu’il s’abstiendrait de s’attaquer personnellement à son contradicteur, difficile d’y prêter foi.
- « … faussetés rapportées par un poète-chanteur affichant avec une ardeur presque biblique ses perceptions comme étant «la voie et la vérité». »
- « … un prédicateur qui ne veut pas voir entacher les fausses perceptions qu'il a aidé à forger. »
- « Pourquoi mentir, et surtout pourquoi ne pas prendre le temps de s'informer? »
- « …j'ignore quel génie informe Richard Desjardins, mais il faudrait qu'il refasse ses devoirs. »
- « Pourtant, cela ne devrait pas confondre le spécialiste en foresterie et le forgeur d'opinion que vous êtes. »
- « Une fois de plus, M. Desjardins ment effrontément. »
- « … en prenant bien soin de vérifier l'information et d'éviter les fausses notes et les demi-vérités. »
Promesses non tenues
La fausse note principale ici étant d’annoncer se situer au-dessus des attaques personnelles et de rater à ce point son tir. Lamentable.
S’il est question d’information vraie, à vue de nez, son texte censé dire la vérité des chiffres est aussi mensonger que la prétention qui voudrait que les chiffres parlent sans mentir. « Tout le monde sait » qu’on peut leur faire dire n’importe quoi et c’est n’importe quoi encore ce que nous présente M. Chevrette qui ajoute sans rire semble-t-il :
« je me suis enquis de toutes les dimensions du développement durable et je crois humblement les avoir comprises. »
Quand l'a-t-il fait ? Avant ou après la publication de l’ Erreur boréale en 1999… par Richard Desjardins. ( Déjà, dix ans... ) ET s’il les a comprises pourquoi s’en prend-il aussi malicieusement à un écologiste notoire si méritant et désintéressé ? Ne devrait-il pas plutôt le saluer bien bas pour son apport inestimable à tant d'égard et notamment à celui qui nous occupe ? N'a-t-il pas sensibilisé tous les Québécois à l'exploitation contrôlée et durable de l'une de nos plus inestimables ressources renouvelables ?
ET, il ajoute :
« J'aimerais rappeler à M. Desjardins que j'ai personnellement créé le ministère des Régions, et je crois fondamentalement qu'un Québec économiquement fort passe par des régions économiquement fortes. »
Suit une apologétique défense des régions. Pathétique !
Certaines minorités affairistes régionales peuvent aussi avoir intérêt à court terme à profiter du laxisme dont profitaient et dont profitent encore les multinationales, cela entre autres choses en ramassant leurs miettes, ce que dénonçait, ce que dénonce toujours M. Desjardins. Comme cela s’est passé jadis pour la pêche. Qu’y a-t-il de faux à vouloir s’assurer que ce qui doit être changé le soit à cet égard crucial pour l'avenir des régions, pour les régions ? Sans l’Erreur boréale, l’industrie forestière aurait-elle fait ce que M. Chevrette dit qu’elle a fait dès après ? La ponction des multinationales aurait-elle décru ? Cette décroissance est-elle dû justement à ce que prévoyait M. Desjardins, difficile de maintenir la cadence de la cueillette tant elle a été sévère ?
Ce que l’industrie a fait depuis, forcée de le faire sous le projecteur Desjardins qui a fait la lumière sur de sombres et occultes alcôves qui géraient mal la forêt, non sans avoir tempêté en prétendant qu’il s’agissait là de mensonges et en disant maintenant que l’industrie a changé dès après, peut-on encore croire crédible Guy Chevrette, fût-il fils de bucheron ? Je ne crois pas.
Les régions VS La minorité affairiste activiste des régions
Cette apologie des « régions » et de ses élites politiques et d'affaires, montre bien que M. Chevrette a choisi de se prévaloir de la collusion de certains en région pour disqualifier ce qui les forcerait à se gouverner de manière responsable. Et si c'est bien de responsabilité qu'il est question, pourquoi antagoniser les uns et les autres ? À sa face même, le réquisitoire de M. Chevrette qui oppose régions et Richard Desjardins, développement économique fort et développement durable, prouve que son ordre de priorité est factice, usurpé, falsificateur.
S’il avait vraiment comme première priorité le développement durable de la forêt, il n’aurait pas à tout prix tenté de disqualifier le cri d’alarme lancé en 1999 par Richard Desjardins et il ne ferait pas aujourd’hui la même chose en nous disant d’un même souffle - il n’en manque pas - que les choses ont changé pour le mieux depuis cette dénonciation salutaire. Il remercierait M. Desjardins non pas parce qu’il lui donne l’occasion à nouveau de prouver qu’il ne désire que l’abattre, mais plutôt parce qu’il désire prendre en compte la responsabilité qui devrait être la sienne, à savoir, le bien-être véritable et durable des régions qui exige que l’on mette de l’ordre dans le secteur de la forêt pour que son exploitation ne soit pas éphémère est injustement spoliée par une minorité activiste affairiste sans scrupule, qu’elle soit multinationale, nationale ou régionale.
Qu’il y ait 600 entreprises majoritairement québécoises ne veut pas dire pour autant et en soi, que la majorité des profits résultants de l’exploitation de la ressource n’est pas déterritorialisée, même si les régions en vivent, chichement et toujours en rupture de stocks sociétaux, politiques, culturels et humains.
Ce n’est pas parce que l’industrie forestière multinationale est par lui, habile homme de terrain citoyen et politique qu'il est, capable de fédérer la nomenklatura d’affaires et politique des régions, forcée qu’elle a été de le faire pour faire face à la musique tonitruante de notre chantre national des forêts, pour le contrer, ce n'est pas parce qu'elle est parvenue à telle fédération régionale que l'action de ce regroupement entrepreneurial et que ses plans d’actions sont pour autant capables de protéger efficacement la ressource. Surtout s’il est question ici encore de démontrer qu’il parvient bien, à coup d’argent et de coûteux voyagements, à opposer telle fédération d’une minorité activiste affairiste en région à la pourtant désintéressée action écologiste de Richard Desjardins. Comme si celui-là ne voulait que la stagnation des régions. Soyons sérieux !
On l’a vu déjà, cette force régionale, faire tout le contraire pour ce qui est de la pêche. En soi, il faut plus qu’un argumentaire démagogique régional pour nous inciter à croire que ce que nous promet M. Chevrette en matière de forêt pourrait faire la différence. Qu’il ait été forcé, sous l’impulsion des dénonciations efficaces de l’artiste-citoyen Desjardins de se gouverner mieux, non sans l’avoir dénoncé, en faisant malgré tout ce qu’il disait important de faire, ne nous assure pas qu’il fasse effectivement mieux. Si ces engagements sont de même nature que ceux qu’il a pris au début de sa lettre, on peut en douter.
Faire taire les empêcheurs de tourner en rond
En faisant de ses attaques contre M. Desjardins une stratégie d’action durable, il prouve qu’il n’est pas de son côté. Il laisse a contrario plutôt entendre qu’il se satisfait de changements de surface, laisse entendre qu'il s'en satisfait non sans s'être si énergiquement opposé à le faire, même ça, un simple maquillage de surface à la mode comme le dénonce aujourd'hui Richard Desjardins. En persistant à nouveau à le disqualifier en le dénigrant, sa tentative est patente, attaques personnelles en sus, il prouve qu’il répugne à s’attaquer vraiment à ce qui devrait être changé pour que les choses changent et pour qu’on ne se retrouve pas dans dix ans dans la situation dans laquelle se trouvent les « régions » de pêche aujourd’hui.
Telles préoccupations peuvent éventuellement contredire la fédération des potentats régionaux, mais cela ne contredit pas d'office ce que nous avons tous à cœur, le vrai développement de toutes les régions et de toute la population de toutes les régions. ET, de ce côté, malgré tout ce que tente de nous dire M. Chevrette, lui n’est pas plus crédible que M. Desjardins, et je dirais plutôt le contraire. M. Desjardins est toujours crédible et M. Chevrette peine à convaincre.
L’ordre de priorité
Ce qui ne change pas dans le discours de M. Chevrette, c’est son « durable » parti-pris du dénigrement de l’apport du citoyen Richard Desjardins. On n’en attend pas moins d’un Président-directeur général du Conseil de l'industrie forestière du Québec traditionnellement irresponsable et trop laxiste. Le problème, c’est qu’il n’a pas la crédibilité voulue pour changer la perception que nous avons de l’organisme qu’il dirige et qui voudrait que sous sa gouverne « l'importance de la pérennité de nos forêts » soit effectivement la « première dimension du développement durable. » En effet, à quoi servirait : « L'accessibilité aux ressources et leur exploitation », ce deuxième élément au dire de M. Chevrette, si nous n’avons plus de forêt et à plus forte raison, à quoi sert « l'exploitation des ressources naturelles de façon raisonnée peut se faire par une gestion intégrée au profit de tous », si quelques-uns - des multinationales aux privilégiés locaux - ont vidé la forêt sans se soucier de sa pérennité. Du moins pour les années à venir.
Il ne faut pas chercher bien loin pour douter de la validité des experts en la matière quand on sait qu’ils ont été incapables d’empêcher le fait qu’on ait vidé le fleuve et son estuaire de ses poissons. Quand l’Erreur boréale est sortie, M. Chevrette nous disait que M. Desjardins disait des faussetés. Maintenant il nous dit « Après L'Erreur boréale, beaucoup de choses ont changé... » depuis 1999, comme si M. Desjardins n’avait finalement pas dit que des faussetés à l’époque. Du moins comment percevoir autrement le fait que l’industrie, sous sa gouverne, ne s’est « entendus sur une déclaration commune, laissant poindre des consensus relativement intéressants pour l'évolution du régime forestier » que 8 ans plus tard… Ce n'était pas le cas avant... Pourquoi ? N'est-ce pas ce que dénonçait valablement M. Desjardins. S'il ne se trompait pas à l'époque pourquoi se tromperait-il maintenant ? D'autant qu'on le dénigre aujourd'hui avec les mêmes sempiternels et fallacieux arguments.
La méthode Rabaska
N’est pas ce que disait M. Desjardins ? C’est le bordel et au plus fort la poche. On tue la forêt et vide la ressource sans ménagement. Il faut réunir et rassembler nos forces pour pousser tous ensemble dans la même direction. M. Chevrette en aurait pris de la graine nous dit-il aujourd’hui, sauf que, si l’industrie a su mieux s’organiser, en suivant le modèle Kelly de Rabaska, en faisant le plein d’appuis locaux, cela veut-il dire d'emblée et sans autre atermoiements que le régions y trouvent son compte ? On a vu ce que cela a donné pour Lévis. Rien du tout !
Rien du tout, cependant que toute une région ravagée par le rouleau compresseur affairiste activiste multinational prenant d'assaut toutes les tribunes, BAPE compris, à coup d'argent, est toujours à la merci du bon vouloir des ces Messieurs de l’industrie, qui parait-il aux dernières nouvelles ne sont pas prêt à investir et ne savent pas quand ils le seront, alors qu’il n’y avait rien de plus pressé que de se coucher devant leur machine à fabriquer de l’argent ! Tout cela bien sûr en disqualifiant les personnes et organisations qui avaient des doutes sur telle supposée déclaration d’intérêt pour la population et son développement durable.
Ce qui est durable ici et là, c’est que d’aucuns disent de manière désintéressée avoir « notre intérêt à cœur » et trouvent toujours le moyen de se l’approprier à même les durables dividendes que nous pourrions tirer de nos avoirs collectifs, quand ce n’est pas pour s’approprier l’ensemble de la ressource en l’exploitant à outrance pour de bien courts termes au nom de larges et généreuses vues.
Ce genre de développement durable doit être questionné et pourquoi pas par M. Desjardins ? Jusqu’à maintenant il n’a pas démérité. Je le remercie de nous inviter à la vigilance. Pour l’heure, M. Chevrette ne fait que noyer le poisson. Il serait grand temps qu’il sème autre chose que des cailloux et cesse de jeter des roches pour s’assoir à la même table que celles et ceux qui veulent des changements et qui vont les obtenir.
Nous n’avons pas le choix si nous voulons que nos régions vivent toujours de l’usufruit de leurs ressources et non de leurs ressources elles-mêmes en les dilapidant. Elles ne sont renouvelables que si l’on s’assure qu’elles le soient vraiment.
Le pire n’est jamais sûr
Le mieux impossible. Une chose est sûre cependant, les promesses de M. Chevrette sont douteuses. Ce n’est peut-être pas le pire - Richard Desjardins nous en aura protégé - mais le moins qu'on puisse dire c'est que c'est comme pour le pire... ce n’est pas sûr…
Les plus élémentaires précautions ne sont-elles pas de rigueur ?
Qui s'est trompé en 1999, M. Desjardins ou M. Chevrette ?
Qui se trompe ou nous trompe aujourd'hui ?
Luc Archambault
Peintre, sculpteur, performeur, céramiste et citoyen
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