Les péquistes de la capitale nationale se réunissent en fin de semaine prochaine pour faire le bilan de la dernière campagne électorale. Au rythme où les critiques du chef et de son entourage se sont multipliées, cette semaine, il est permis de croire que la rencontre tournera au vinaire et au règlement de comptes.
Après avoir devancé tout le monde en appuyant l'ADQ et les conservateurs, la région de Québec sera-t-elle la première à réclamer la tête d'André Boisclair ? Dans le passé, ce sont les orthodoxes montréalais du Plateau Mont-Royal qui menaient la fronde... Que se passe-t-il cette année ? Un autre mystère de Québec ? La réalité est un peu plus complexe.
On a assisté à deux formes d'autocritique au sein du PQ depuis la déconfiture du 26 mars : la remise en cause de la stratégie référendaire et la contestation de la stratégie électorale.
M. Boisclair a ouvert le panier de crabes le 27 mars, en décrétant que la souveraineté n'était pas réalisable à court terme et en ajoutant qu'il faudrait attendre longtemps avant de convoquer les Québécois à un autre référendum. Bernard Landry, qui trépignait d'impatience, ne s'est pas gêné pour déclarer à Radio-France international, dès le lendemain, que M. Boisclair n'avait pas su "établir le lien avec la population". Louis Bernard, qui était candidat à la direction, y est allé de sa propre analyse en demandant aux péquistes de mettre une croix sur leurs velléités de gouverner le Québec-province, et de se consacrer uniquement à la croisade de la souveraineté. Bernard Landry en a remis, pour dire que M. Bernard avait tort.
Le bal est bel et bien parti : bienvenue dans les salons d'Outremont et les bistros du Plateau. On va y passer des heures à réinventer le monde et à repenser le Parti québécois. René Lévesque en ferait des cauchemars, et Lucien Bouchard doit se féliciter d'avoir abandonné une telle galère.
À Québec, on est beaucoup plus pragmatique. Ce ne sont pas les grands principes qui animent les critiques, mais une belle chicane de famille. Ici aussi, c'est M. Boisclair qui a lancé le débat, en reprochant aux militants de la région de ne pas avoir ouvert les bras à ses candidats de prestige.
Six péquistes de la région n'avaient pas la bénédiction de leur chef à l'investiture. André Joli-Coeur, Daniel Leblond, Martin Courval, Sylvain Lévesque, Christian Simard et Robert Miller ont défié la direction du Parti, bloquant ainsi la route à des candidatures comme celles de Jean-François Bertrand dans Vanier ou de Françoise Mercure dans Montmorency. Ils ont tous été battus le 26 mars. Une victoire aurait provoqué un semblant d'unité, mais la défaite leur a donné pleine liberté de critiquer le chef et ils ne s'en privent pas.
Il y a autant de cas que d'individus parmi ces insatisfaits. André Joli-Coeur avait l'appui de Jacques Parizeau et de Bernard Landry. Daniel Leblond, Christian Simard et Robert Miller avaient des liens avec les bloquistes. Sylvain Lévesque avait l'appui de la base péquiste dans Vanier. Martin Courval, dans Portneuf, avait des liens étroits avec la CSN. Ça fait beaucoup de mécontents en même temps et au même endroit. Même s'il se tiendra à huis clos, le bilan du 14 avril prendra la forme d'une grande séance de lavage de linge sale en public. Comme l'a si bien dit Jacques Parizeau à son passage à l'Université Laval, il faut taire les chicanes à deux semaines de la tenue du scrutin, mais on va recommencer après les élections, et on va aimer ça à part ça...
Heureusement pour M. Boisclair, la grogne ne semble pas avoir atteint la députation péquiste. Du moins, pas encore... C'est peut-être que les élus ne voient pas de remplaçants au chef dans leur groupe. François Legault a fermé la porte, Diane Lemieux s'y refuse pour des raisons familiales, Bernard Drainville et Pierre Curzi n'ont pas l'expérience requise, Pauline Marois ne viendra pas à moins d'un couronnement, Gilles Duceppe est pris à Ottawa et Bernard Landry s'est discrédité en jouant à la belle-mère. Malgré les critiques et les règlements de comptes, M. Boisclair sera peut-être en selle un bout de temps. Assez longtemps pour tenter de purger le programme du Parti de son engagement de tenir un référendum le plus tôt possible dans un prochain mandat. Et pour donner au chef, comme cela se fait chez les libéraux, le pouvoir de désigner des candidats dans les circonscriptions.
André Boisclair a indiqué qu'il entend faire le grand ménage dans ce parti, mais c'est plus facile à dire qu'à faire. Il pourrait bien en venir aux mêmes conclusions que Lucien Bouchard... Le PQ est tout simplement ingouvernable.
Pour joindre notre chroniqueur : glavoie@lesoleil.com
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