Cour suprême

L'imposition de juges bilingues diviserait le pays, dit Moore

Le commissaire aux langues officielles reproche plutôt au PCC sa conception étroite de la dualité linguistique

Cour suprême: le bilinguisme des juges

Le ministre James Moore est contre le projet de loi imposant le bilinguisme aux juges de la Cour suprême du Canada, jugeant qu’«il n’est pas dans le meilleur intérêt du Canada».

Photo : Jacques Grenier - Le Devoir

Hélène Buzzetti Ottawa — Le ministre responsable des langues officielles, James Moore, estime que le projet de loi imposant le bilinguisme aux juges de la Cour suprême du Canada «divise» le pays. Le commissaire aux langues officielles, Graham Fraser, réplique que tous les arguments contre cette initiative ont été entendus il y a quarante ans, lorsque le bilinguisme a été imposé à la fonction publique fédérale, et que le temps a prouvé qu'ils étaient sans fondement.
L'opposition des conservateurs au projet de loi néo-démocrate est bien connue. Ils prétendent préserver le droit des unilingues francophones d'accéder au plus haut tribunal du pays. Alors quand le parrain du projet de loi, Yvon Godin, a fait valoir qu'en 143 ans, aucun n'avait été nommé, M. Moore a soumis un nouvel argument: l'unité canadienne.
«Notre gouvernement est contre votre projet de loi parce que le but des langues officielles, c'est d'unifier le Canada, pas de le diviser», a lancé le ministre en comité parlementaire. Invité par M. Godin à clarifier sa pensée, il a ajouté: «Votre projet de loi diviserait. Il n'est pas dans le meilleur intérêt du Canada. Votre petit jeu et celui de M. [Thomas] Mulcair pour essayer de gagner des sièges à Montréal, c'est ben divisif.»
Pendant ce temps, le commissaire aux langues officielles, Graham Fraser, continue de plaider pour le bilinguisme des magistrats. À ceux qui soutiennent, comme l'ancien juge unilingue John Major, que l'obligation de bilinguisme rendrait quasi impossible le recrutement de candidats à Edmonton, Calgary ou encore Vancouver, il sert une longue tirade bien sentie.
«Tous les arguments entendus sont exactement les mêmes arguments qu'on a entendus il y a 40 ans vis-à-vis de la Loi sur les langues officielles elle-même. À ce moment, on a dit que ce serait la fin des emplois pour les gens de l'Ouest, que jamais plus ce ne serait possible pour quelqu'un de l'Alberta, de la Saskatchewan ou de la Colombie-Britannique d'avoir une belle carrière dans la fonction publique fédérale. Et que voit-on aujourd'hui? On voit un premier ministre d'Alberta, une juge en chef de la Cour suprême d'Alberta [...], un greffier du Conseil privé de Saskatchewan et un chef des Forces canadiennes qui est du Manitoba. Je m'excuse, mais ça n'a pas été une barrière pour les gens de l'Ouest.»
Graham Fraser, qui déposait par ailleurs hier le premier volume de son rapport annuel 2009-2010, estime que le gouvernement conservateur adopte une approche trop restreinte de la dualité linguistique. «Ce débat peut être compris sous l'angle du privilège des avocats d'accéder au poste de juge de la plus haute cour du pays... ou sous l'angle du droit des citoyens et de leurs avocats d'être entendus à la plus haute cour du pays dans la langue officielle de leur choix. Malheureusement, le gouvernement a choisi de se pencher sur cet enjeu en adoptant une conception étroite de la dualité linguistique canadienne.»


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