La course à la chefferie est-elle rouverte chez les libéraux ?

Tribune libre

La course à la chefferie est-elle rouverte chez les libéraux ?
Dans un texte récent ([L’humour douteux de Nathalie Normandeau->34177]), Robert Barberis-Gervais rappelle que le dossier des gaz de schiste a fait à Madame Normandeau beaucoup de tort et compromet son ambition de remplacer son chef Jean Charest. Ce dossier est loin d’être clos, et va continuer à nuire aux libéraux pendant longtemps. Je ne vais pas revenir sur l’humour scatologique de Mme Normandeau, mais sur une hypothèse expliquant le silence inexplicable de Jean Charest dans cette affaire.
Ce cher John James a vu son parti s’enfoncer lamentablement dans le schiste sans lever le petit doigt. Il connait bien entendu les ambitions de Madame, il lit l’Actualité comme tout le monde; elle y a eu droit comme par hasard à un long article dithyrambique qui en dit aussi long sur ses ambitions que sur ses supposées qualités. Il était évident qu’elle se positionnait pour succéder à son chef en cas de besoin, besoin qui pourrait venir très rapidement.
Bien sûr, personne n’a demandé son avis au principal intéressé sur son éventuelle succession. À l’évidence, Jean Charest croit faire un excellent travail et ne voit pas pourquoi il devrait céder sa place. En politique, quand on a le pouvoir, le premier objectif est de le conserver. Avec sur les bras la corruption et une impopularité record, il est particulièrement vulnérable. Il peut raisonnablement craindre que le Québec ait un urgent besoin de Mme Normandeau.
Dans un tel contexte, le dossier des gaz de schiste et sa gestion lamentable par Mme Normandeau ont certes été providentiels pour le maintien en poste de John James. Elle y a été au-dessous de tout. Bien avant l’odeur des vaches, un parfum de prévarication et d’improvisation s’est dégagé de ce dossier, amplifié par les actes et les propos de Mme Normandeau.
Quand il s’est présenté devant Bastarache, Jean Charest a admirablement expliqué comment il aidait tous ses ministres lorsqu’ils avaient des difficultés. J’en ai été touché, bouleversé, j’en suis resté pantois. Comme j’aurais aimé avoir un tel patron !
Plus sérieusement, il est tout sauf idiot. Il la voyait s’enfoncer de jour en jour. Il n’a pas levé le petit doigt pour l’aider, ni pour aider les Québécois. Il a laissé André Caillé apporter une contribution non négligeable à ce gâchis sans piper mot. Il avait agi plus rapidement et plus fermement avec ce personnage dans le dossier de la centrale au gaz Le Suroit. Pourquoi alors afficher ici un tel mutisme?
Jean Charest sait bien que le dossier de la corruption est toujours présent dans l’opinion et va continuer à tirer son parti vers les bas-fonds dans les sondages. Il sait aussi qu’il ne peut plus reculer et commander une commission d’enquête sans perdre la face et son poste. Dans un tel contexte, il peut se permettre de faire n’importe quoi dans celui des gaz de schiste, la situation ne peut plus empirer. Il va donc sacrifier ses concitoyens à son ambition, et va laisser aller les choses dans les gaz sans rien faire.
En effet, comme Mme Normandeau s’était totalement discréditée, il ne voyait personne pour lui ravir son poste et il pouvait dormir tranquille. Ce ne sont certes ni Mme Courchesne ni Mme Beauchamp qui peuvent le remplacer. Et il croit toujours pouvoir compter sur la maladie de ses adversaires, qui consiste à se diviser, même si l’opposition mène dans les sondages, même si son chef a les qualités et l’expérience pour faire le travail, c’est plus fort qu’eux, ses adversaires adorent se diviser. Et il doit faire des neuvaines à Saint-Jude, le patron des causes désespérées, pour que François Legault aboutisse à quelque chose qui ressemblerait à une ADQ pour intellectuels et divise le vote. Si c’est le calcul de Jean Charest, en lisant plusieurs textes de Vigile, force est d’avouer qu’il ne se trompe pas trop en ce qui concerne la situation actuelle. Avec des amis comme certains contributeurs de Vigile (péquistes déçus? indépendantistes soupçonneux ? adéquistes cachés derrière des pseudonymes?), Mme Marois n’a certes pas besoin d’ennemis. Pour virulente et brouillonne qu’elle soit, cette opposition à Mme Marois semble actuellement assez marginale.
Mais les Libéraux ne voient probablement pas la chose du même œil que leur chef. Même avec l’aide des Lucien Bouchard, François Legault et autres extra-lucides, ils savent bien qu’ils ne vont nulle part avec Jean Charest. Pour bénéficier pleinement des divisions de l'opposition, il leur faudrait un nouveau chef plus montrable.
Je crois que c’est ce qu’a compris Mme Normandeau et que c’est ainsi qu’il faut expliquer sa tentative de redorer son blason. Elle sait que pour remplacer son patron, elle doit réparer les pots cassés. C’est pour ça qu’elle vient de se lancer en campagne pour mieux vendre ce projet. Elle vise bien plus qu’une explication à des incrédules, mais il faut qu’elle se fasse convaincante et rassembleuse, tout en faisant oublier ses déclarations loufoques et la comédie que joue actuellement le BAPE. Elle devra montrer les qualités que lui a attribuées peut-être un peu vite une journaliste complaisante de la revue Actualité. La tâche est lourde, mais le pouvoir est à ce prix.
Je doute qu’elle fasse la seule chose sensée dans ce dossier, soit un moratoire. C’est quelque chose que Jean Charest va lui refuser obstinément, et elle va devoir retourner en Gaspésie avec son petit bonheur. Mais il reste que sa sortie marque peut-être le début de la course à la chefferie du Parti libéral. Ce n’est pas parce qu’ils sont plus discrets que les soi-disant amis de Mme Marois que les libéraux sont fiers de leur patron. Au moins eux ont de bonnes raisons de vouloir le remplacer !
Louis Champagne, ing.


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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    21 janvier 2011

    On vient de sortir Pierre Arcand des boules à mites. Celui-ci vient contredire les propos de notre Sara Palin nationale et tente de sauver les meubles. D'ailleurs, on apprend que Mme Normandeau était absente du caucus hier et aujourd'hui. Tiens, tiens!! Ça ne vous rappelle pas "l'absence" de Kathleen Weil d'un conseil général du PLQ après s'etre mis le pied dans la bouche lors d'une entrevue donnée à Larocque, Lapierre au début des allégations de Marc Bellemare?
    Je pense que Nathalie Normandeau va devoir réviser ses plans de carrière après la rebuffade que viennent de lui servir Charest et Arcand...!

  • Archives de Vigile Répondre

    21 janvier 2011

    Charest n'a même pas trouvé un juge Québecois pour le blanchir, il fallait un Acadian et un financier Québecois pour renflouer le 40 milliards manquant dans notre Caisse, il fallait un Ontarien.
    Qui peut aimer autant que Charest de nous faire perdre une autre décennie aux mains des magouilles des fédéralistes ?

  • Archives de Vigile Répondre

    21 janvier 2011


    Les libéraux de Jean Charest viennent plutôt de s'engager dans une opération de «damage control» en donnant une promotion à leur ministre de l'Environnement. Envoyé au micro, il se dit «extrêmement préoccupé» par ce qu'il voit dans les gaz de schiste. «Je sens que l'industrie n'a pas le contrôle de la situation. C'est mon devoir de m'assurer que la situation se rétablisse le plus rapidement possible», ajoute-t-il.
    Mais comment peut-il être préoccupé de sentir les pets de vache de Normandeau? Et, évidemment, en bon libéral charestiste qui vendrait n'importe quoi du Québec à condition que l'acheteur soit étranger, le bradage du territoire à 10 cents l'hectare, il en parle pas.