La fin d'un monde

En tout cas, c'est la fin d'un monde. Le «processus» israélo-américain ne marche plus. À New York, on assiste à son agonie. Mais qu'est-ce qui va le remplacer?

Actualités internationales - Palestine à l'ONU



Le 23 septembre 2010, devant l'Assemblée générale des Nations unies, le président américain, qui s'y connaît en beaux discours, déclare souhaiter ardemment que l'année suivante, dans cette même enceinte de l'ONU, «un État souverain et indépendant de Palestine, vivant en paix avec Israël, puisse enfin voir le jour».
À la même époque, Barack Obama vient de ressortir du frigo, en grande pompe, la vieille tarte à la crème appelée «processus de paix israélo-palestinien»... encore et toujours, espère-t-il, sous le chaperonnage quasi exclusif de l'oncle d'Amérique.
Un an plus tard, presque jour pour jour — le mercredi 21 septembre 2011 —, l'occasion souhaitée se présente sur le plancher de l'ONU, à New York. Les Palestiniens ont pris, très littéralement, M. Obama au mot: ils sont sur le point de déposer, au Conseil de sécurité, leur demande d'admission d'un État souverain de Palestine.
Revoici donc le même Barack Obama, à la même tribune de l'Assemblée générale, sur le même sujet... mais cette fois, les propos sont moins amènes, moins optimistes, et même sombres: «Il n'y a pas de raccourci vers la paix», lance-t-il, le plus sérieusement du monde, à des gens qui attendent depuis 1947, en passant par la guerre de 1967, la déclaration d'Alger de 1988, le processus d'Oslo en 1993, l'Intifada de 2000, le quasi-accord de Taba en 2001 (un bon accord, il est vrai, refusé par Yasser Arafat), la «feuille de route» de 2003, la rencontre d'Annapolis en 2007 et, finalement, cette «relance» mort-née de l'automne 2010...
Aller parler de «raccourcis» à ces gens-là?
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M. Obama a expliqué devant l'Assemblée générale pourquoi les États-Unis opposeront leur veto à cette initiative au Conseil de sécurité. Pour lui, il s'agit de contrer à tout prix la nouvelle stratégie palestinienne de reconnaissance à l'ONU, qui prétend agir sans attendre l'aboutissement d'un «processus de paix» moribond. Et il a aussi rappelé pourquoi, d'un point de vue américain, l'État palestinien est certes chose souhaitable... mais que la priorité absolue, ce qui passe avant tout — hier, aujourd'hui comme demain —, c'est la sécurité d'Israël.
Il semble loin, le Barack Obama de juin 2009 au Caire, celui qui osait dire: «On ne peut nier que le peuple palestinien souffre depuis plus de 60 ans du déracinement et des humiliations quotidiennes de l'occupation. Cette situation ne peut plus durer.»
Le Barack Obama de septembre 2011 n'est plus l'éloquent preacher de 2008 et 2009. C'est un politicien en difficulté, en quête de réélection, vulnérable face aux lobbies. Son dernier discours à l'ONU est le reflet de son affaiblissement, et de celui des États-Unis.
Le président nous rappelle que, tout en prétendant toujours jouer les arbitres au Moyen-Orient, attachés qu'ils sont à leur monopole historique sur le «processus de paix israélo-palestinien», les États-Unis restent d'abord et avant tout l'allié indéfectible et inconditionnel de l'État juif. C'est exactement comme si l'arbitre d'une partie entre les Canadiens de Montréal et les Maple Leafs de Toronto arborait fièrement l'unifolié blanc sur fond bleu... trouvez l'erreur!
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En fait, cette incongruité historique — pour la nommer gentiment — tenait à ce que la suprématie mondiale des États-Unis ne souffrait pas de discussion, que tout le monde y croyait ou feignait d'y croire. Les Israéliens en ont profité au maximum. Mais cette époque tire à sa fin. Et le «processus» a échoué.
En fait, le spectacle des leaders palestiniens qui se présentent à l'ONU, défiant Washington, pour tenter de dénouer l'impasse d'un vieux «processus à trois» qui tourne à vide, et où ils avaient l'impression de faire de la figuration... n'est qu'une nouvelle version du «déclin de l'Empire américain» visible sur plusieurs scènes du monde.
Nul ne sait ce que donnera cette tentative palestinienne de plaquer «un nouveau paradigme» — légaliste, multilatéral et onusien — sur l'un des plus vieux conflits du monde.
Difficile de dire si la tentative de la France de Nicolas Sarkozy, et celle parallèle d'un machin nommé Quartette (États-Unis, Russie, UE, ONU) qui lui aussi fait de la figuration depuis 2003, représente une ultime tentative de récupérer l'initiative palestinienne en la diluant... ou au contraire l'émergence de quelque chose de vraiment nouveau.
En tout cas, c'est la fin d'un monde. Le «processus» israélo-américain ne marche plus. À New York, on assiste à son agonie. Mais qu'est-ce qui va le remplacer?
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François Brousseau est chroniqueur d'information internationale à Radio-Canada. On peut l'entendre tous les jours à l'émission Désautels à la Première Chaîne radio et lire ses carnets dans www.radio-canada.ca/nouvelles/carnets.

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François Brousseau est chroniqueur et affectateur responsable de l'information internationale à la radio de Radio-Canada.





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