La haute diplomatie du Québec

Obama et le Québec

Il est passé en coup de vent. Un mois, jour pour jour après son assermentation, il a rendu visite à ses voisins du nord. Sa visite n'a duré que quelques heures et nous devons tous espérer que ces heures ne soient pas du temps perdu.
On a eu droit aux images habituelles d'une telle visite et la veille, pendant que CNN donnait aux Américains l'ordre du jour complet de la visite officielle à Ottawa en incluant les noms de tous ceux qui seraient présents, le premier ministre du Canada a refusé l'information aux journalistes d'ici, selon son habitude, et a tenu à garder tous les détails secrets jusqu'à la dernière minute. Deux hommes aussi différents qu'on puisse les imaginer se sont rencontrés. Le président Obama ouvert et disponible, le premier ministre du Canada fermé comme une huître et méfiant sans bon sens. Comment ont-ils fait pour se parler? Il n'y avait, paraît-il, que quelques minutes prévues entre les deux hommes, face à face. Tout le reste du temps était consacré aux dossiers qui nous unissent ou nous séparent en présence de tous ceux que ça concerne, représentant les deux pays. La visite à Harper est comme un arrêt dans une halte routière.
Cette visite, hier, à Ottawa, devrait nous inciter à nous questionner sur certaines informations qui ont filtré. Notre premier ministre Jean Charest aurait téléphoné à Stephen Harper pour lui demander d'agir comme une sorte de lobbyiste pour le Québec auprès d'Obama. Charest souhaitait que Harper intervienne afin d'intéresser le président à notre production d'hydroélectricité, dont nous aimerions vendre certaines quantités aux USA. Partant du fait que le président Obama a des ambitions écologiques pour son pays, qu'il vise à multiplier les sources d'énergie accessibles aux Américains, M. Charest a sauté dans le train en marche. Qui mieux que M. Harper pour défendre les intérêts économiques du Québec?, s'est-il dit. Je l'avoue, quand j'ai appris la nouvelle dans les journaux, ça m'a fait sourire.
On savait déjà que le président Obama ne ferait que passer au Canada. Tout le monde avait été prévenu. Il ne disposerait que de quelques heures pour faire connaissance avec Stephen Harper, puis, sans doute, discuter de son plan de relance et de l'avenir de l'automobile en Ontario, un dossier préoccupant pour cette province, s'il en est un. On parlerait aussi de la situation des troupes en Afghanistan et du rôle que M. Obama voudrait peut-être voir le Canada y jouer après 2011. Le dossier concernant la sécurité des frontières qui séparent nos deux pays devrait être abordé, les projets des USA quant à l'environnement et la position incompréhensible et rigide du Canada sur ce sujet aussi, et surtout, surtout sa position sur le protectionnisme qui fait tant peur à tout le monde qui traite avec les USA. Il y avait déjà là de quoi remplir plusieurs heures de discussion. Rajouter la vente d'hydroélectricité à la dernière minute était un pari risqué. Surtout en confiant le dossier à un lobbyiste qui n'a pas fait ses preuves dans ce domaine-là. C'était se placer en situation de faiblesse pour rien du tout.
Personnellement, je ferais plus confiance à son fameux Blackberry pour lui transmettre la bonne nouvelle qu'au chef du Parti conservateur du Canada, qui aurait été naturellement plus proche de l'autre candidat à la présidence américaine, John McCain, et qui doit craindre Obama comme la peste; il fera probablement un piètre lobbyiste.
Ma conclusion, c'est que le Québec n'a personne qui gravite autour du président Obama. Personne n'a prévu d'établir un contact avec son personnel ou son entourage pendant la campagne électorale? Pourtant, tout le monde savait au gouvernement du Québec qu'il se préparait un changement de la garde à Washington et malgré tout, personne n'a bougé? Barack Obama ne cesse de dire qu'il compte sur la diplomatie pour réparer les pots cassés qui ont été l'oeuvre de l'administration Bush pendant des années afin de permettre aux USA de reprendre leur place dans le concert des nations. Nos diplomates québécois ont continué de ronronner, les bras croisés, alors que nous avons quelques délégations à travers le monde qui devraient justement servir à nous positionner auprès d'un nouveau président américain avec lequel nous avons beaucoup plus d'affinités naturelles que le précédent. Je me décourage chaque fois que je constate que nous agissons comme des amateurs dans des domaines où nous devrions commencer à avoir une certaine compétence.
Comment ferons-nous pour faire savoir au président Obama que nous existons? Que le Québec est plus proche de ses positions sur l'environnement que le reste du Canada? Qu'une nation différente continue de se développer dans cette Amérique du Nord malgré les embûches et qu'une partie de sa population aspire à l'indépendance dans la paix et le respect d'autrui?
Y a-t-il un diplomate dans la salle? Un vrai.


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