Le gouvernement Charest a installé la hausse de 75 % des droits de scolarité sur une logique d'équité entièrement axée autour du «contribuable», cet éternel payeur d'impôts que l'on voudrait protéger de la gourmandise des étudiants nonchalants. Or, à l'appel du mouvement étudiant, le «contribuable» a répondu présent dimanche, osant mettre le pied dans la rue. Le vent tourne.
Cela avait toutes les allures d'un autre dégel, dimanche. Sous de délicieux effluves printaniers, ce fut la naissance d'un dégel populaire, d'une prise de conscience collective, la venue d'une réponse citoyenne à toutes ces semaines d'un débat que l'on avait cru, à tort, limité aux cercles estudiantins. Au dégel des droits, conséquence inévitable pour le gouvernement de la débâcle financière des universités, s'oppose maintenant le réveil de la population.
Depuis qu'a été semé, lors du budget Bachand 2011, le premier germe de cette contestation, le gouvernement tient avec une constance admirable le discours de l'État protégeant ce contribuable injustement taxé par la participation insuffisante des étudiants au financement des études universitaires. On connaît l'exaspérante chanson, répétée jusque sur les plateaux de Tout le monde en parle dimanche par une ministre de l'Éducation plus imperturbable que jamais: sous-financement universitaire, moyenne canadienne, capacité de payer du contribuable, juste part de l'étudiant. La cassette tourne et tourne, mais elle commence à s'user...
Aujourd'hui, un autre budget Bachand doit faire écho à la position définie par le gouvernement Charest en matière de financement des universités: on y refera l'apologie de cette juste part arbitraire, sans insister sur le désengagement corollaire de l'État ni exiger autre chose du privé qu'un brin de philanthropie. Étudiants et contribuables, que l'on a voulu dresser en factions opposées alors que tout les réunit dans cette hausse déraisonnée, seront cette fois mieux outillés, côté information, pour décoder l'exercice budgétaire.
La dichotomie contribuables/étudiants ne paraissait donc plus à Montréal, Québec, Sherbrooke et Saguenay, ce dimanche, car plutôt qu'en camps adverses, on les a vus côte à côte, solidaires dans le rejet d'un excès gouvernemental, le temps de clamer l'importance de l'accessibilité à l'enseignement supérieur et le refus de soumettre l'éducation à une logique marchande — sans en débattre.
Maintenant qu'avec les autres générations et les groupes de la société civile les étudiants ont réussi à amorcer un vigoureux dialogue, il leur reste à espérer de la part de Mme Line Beauchamp autre chose qu'un obstiné refus de discuter. Hormis quelques apparitions médiatiques, celle-ci refuse toute causerie, car cela donnerait toutes les apparences d'une négociation là où il n'y en a pas. Comment négocier en effet les contours d'un décret lorsqu'il est déjà tombé?
S'il persiste ainsi dans son refus de débattre, espérant éteindre une ferveur étudiante au fil d'une session qui coule en jours de grève, Québec ne choquera plus seulement cette frange estudiantine que certains associent seulement à une minorité gueularde; il heurtera aussi tous ces «contribuables» maintenant associés à la cause des étudiants non seulement par solidarité, mais aussi par souci d'équité.
Droits de scolarité
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