J'ai pu, ces dernières semaines, prendre connaissance de plusieurs documents relatifs à l'usage de l'anglais comme langue d'enseignement à l'UQO. En particulier j'ai pu lire l'éditorial intitulé La langue de l'UQO, sous la plume de Pierre Jury (Le Droit, 24 janvier).
Je dois rappeler que, de l'aveu même du président de l'Université du Québec, Pierre Moreau, les missions de l'Université du Québec ont trait à l'accessibilité, au développement scientifique et au développement des régions. Or il arrive qu'environ 15 % des résidants de la région frontalière du Québec que dessert l'Université du Québec en Outaouais, sont davantage anglophones que francophones. Inutile de dire qu'il eut été invraisemblable de créer deux constituantes de l'Université du Québec pour rendre la formation universitaire accessible à ces deux communautés.
En mars 1981 le gouvernement du Québec a émis des lettres patentes créant l'Université du Québec en Outaouais (devenue depuis l'Université du Québec en Outaouais). Ces lettres prévoient que cette Université aura "pour objet l'enseignement supérieur et la recherche". On notera que nulle part, ni dans la loi créant l'Université du Québec en 1968 (et amendée depuis), ni dans les lettres patentes il n'est fait mention d'une mission ou d'un objectif lié à la francisation de la population de l'Outaouais ou même à la promotion de la langue française ou sa qualité.
Un sain réalisme veut cependant que les activités de l'Université du Québec en général et de l'Université du Québec en Outaouais en particulier s'exercent en français et dans le meilleur français possible. Il est normal qu'il en soit ainsi. On ne peut cependant refuser de rendre à des communautés anglophones du Québec, en particulier si elles forment une portion non-négligeable de la population d'une région donnée, certains services d'enseignement ; surtout si ceux-ci ne mettent pas en péril le caractère francophone de l'Université ; encore moins si la dispensation de tels enseignements se limite aux cycles supérieurs et qu'elle contribue positivement au rayonnement de l'Université hors de sa région naturelle d'influence.
Or il semble qu'il en soit actuellement ainsi. La proportion des services d'enseignement rendus en langue anglaise tourne autour de 5 % à l'UQO. Ce faible pourcentage est rassurant. Il ne justifie évidemment pas que l'ensemble des services de l'Université soit disponibles en langue anglaise ni que les personnels doivent être bilingues. On peut d'ailleurs satisfaire à l'esprit et à la lettre d'une politique de langue française qui respecte les exigences de la charte de la langue française. Un dispositif d'une telle politique linguistique de l'Université du Québec en Outaouais pourrait d'ailleurs prévenir tout abus éventuel.
Je ne peux donc souscrire au texte mis en consultation par le conseil d'administration de l'Université du Québec en Outaouais ; d'autant moins d'ailleurs que ce texte constitue une retouche d'un premier texte établi par un Comité du Conseil, mis sur pied par le recteur lui-même et qui faisaient, et le Comité et ses recommandations, l'objet d'un large consensus de la communauté. Je sens d'ailleurs poindre derrière ce deuxième texte, une volonté politique dont les visées sont incompatibles avec les missions de l'Université du Québec en général et les objectifs de l'Université du Québec en Outaouais en particulier.
Jean R. Messier,
recteur fondateur,
Université du Québec en Outaouais
Le français à l'UQO : le premier recteur se prononce
Par Jean R. Messier
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