Une position bien connue

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PQ et bilinguisme



Aujourd’hui, Lysiane Gagnon. Hier, Alain Dubuc, avant-hier, [André Pratte->11824]. Si ce n’était si triste, je me marrerais volontiers. Il suffit d’un titre inventé par La Presse (« Larose et Michaud appuient VLB », La Presse, 13 février) pour qu’on m’affuble d’une position linguistique totalement contraire à celle que je défends depuis des lunes et que reprend exhaustivement le rapport de la Commission des états généraux sur la situation et l’avenir de la langue française au Québec, rapport dit Larose.

Quelle est-elle ? Je suis contre le bilinguisme institutionnel (de l’État québécois, des appareils de l’État québécois, de la vie politique québécoise et des rapports sociaux institués). La preuve est faite en Amérique du Nord et au Canada, d’un océan à l’autre, que le bilinguisme institutionnel est un passeport pour la folklorisation du français et l’unilinguisme pragmatique saxon. Je suis férocement pour le bilinguisme individuel. Comme la commission des états généraux, je propose que nous doublions le nombre d’heures d’apprentissage de l’anglais au primaire et au secondaire, et surtout que cet apprentissage, pour être efficace, se fasse de manière concentrée à la fin du primaire, au milieu et à la fin du secondaire. Il est évident que l’on ne me comptera jamais parmi les démagogues qui proposent l’approche inefficace de l’enseignement de l’anglais à partir des CPE ou de la première année.
Je le répète. Je ne suis pas contre mais bien pour le bilinguisme individuel. Et même si le Québec est compté au monde parmi les peuples les plus bilingues (trois fois plus que le Canada) et trilingues (sept fois plus que le Canada), j’estime qu’à ce chapitre, il y a encore de la place pour nous améliorer, sans inhibition et sans succomber au fantasme débilitant que tous les Québécois devraient être des « perfect bilingual people ». Telle réalité n’existe nulle part, ni en Hollande ni en Scandinavie, contrairement à ce que d’aucuns racontent.
Sur tous les territoires (pays, communautés, cantons, provinces, etc.), il y a une langue commune qui rythme la vie sociale et la vie publique, correspondant à la langue identitaire du groupe majoritaire. Puis parfois, sur un même territoire, il y a des langues secondes qui tantôt expriment l’appartenance à une communauté minoritaire ou tantôt nourrissent des interfaces avec l’extérieur. Dans les contextes minoritaires comme celui vécu par le Québec en Amérique du Nord, s’ajoute le rapport de force global de la langue continentale. Vu ! Su ! Le Québec crâne. Son territoire reste français. Au son d’immenses cris d’orfraie. Encore aujourd’hui.
De quoi les Québécois devraient-ils être gênés ? De ne pas être bilingues ? De ne pas être trilingues ? Certainement pas. Nous les battons tous ! Ce qui achale, au sens québécois du terme, c’est que le Québec maintienne son objectif de finir par devenir un territoire linguistiquement normal, c’est-à-dire avec une langue commune, le français, correspondant à la langue identitaire du groupe majoritaire. À cet égard, l’objectif de la loi 101 demeure limpide. Il faut faire du français la langue normale et habituelle du travail, de l’enseignement, des communications, du commerce et des affaires. C’est une question de justice sociale. Ce faisant, il est vrai que ne pas parler anglais ne sera plus un handicap. Le parler deviendra plutôt un atout pour occuper des postes l’exigeant ou pour développer des interfaces avec l’extérieur. Ces choix, comme ceux des métiers, des techniques et des professions, relèvent des individus et non de l’État. Appartenant à ce dernier de rendre disponibles les ressources pour qu’ils se concrétisent. Le reste n’est qu’idéologie, voire démagogie.
(Photo Robert Skinner, La Presse)
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Gérald Larose
L’auteur a été président de la Commission des états généraux de la situation et de l’avenir de la langue française au Québec. Il est présentement président du Conseil de la souveraineté.


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