Hausse des tarifs d'électricité

Le simplisme volontaire

Le simplisme a bonne presse seulement lorsqu’il s'agit d'étrangler les moins nantis, pas lorsqu’il s'agit de partager la richesse !

Chronique de Louis Lapointe

Les crises seraient l’occasion de changer des comportements, d’imposer de nouvelles habitudes aux consommateurs. Sur la base de ces prémisses, on propose actuellement dans le débat public une importante hausse tarifaire de l’électricité que rien ne justifierait cependant au plan économique. Hydro-Québec est propriété des Québécois et elle fait des profits. Mais voilà, le prix du marché est plus élevé et tout le monde consomme de l’électricité, les riches comme les pauvres. Dans cette perspective, l’augmentation proposée équivaut donc à un impôt minimum fondé sur le prix du marché plutôt que sur la capacité de payer du consommateur moyen.
Si la hausse se concrétise, les vrais pauvres et les contribuables de la classe moyenne devront donc se serrer la ceinture pour équilibrer leur budget, couper dans leur consommation d’autres biens et services pour payer leur électricité, pendant que les plus riches continueront de la gaspiller comme si de rien n'était et paieront une plus grosse facture sans que cela affecte leur budget. Cette mesure aura aussi un effet négatif sur l’économie, puisqu’il en résultera une augmentation des coûts qui seront répercutés des commerçants vers les consommateurs et une baisse conséquente des ventes à la suite des effets conjugués de la hausse des prix.
Les Américains ont choisi une autre voie pour équilibrer les comptes publics. Ils ont décidé de stimuler la consommation en imprimant des milliards de dollars en billets de banque comme le proposait Réal Caouette dans les années 60. Enfermé dans mes préjugés contre les créditistes, jamais je n’aurais cru possible qu’on puisse faire une telle chose sans que cela affecte négativement l’économie, sans que cela provoque une hausse de l’inflation et une baisse de la valeur de la monnaie, comme nous le disaient alors les économistes qui riaient de Réal Caouette. Or, les Américains l’ont fait et il semble qu’ils s’en sortent très bien…à première vue.
Comme on le voit, les formules simples ont l’avantage d’être comprises par tout le monde. Si tout le monde consomme de l’électricité, on augmente les revenus de l'État en haussant les prix. Les gens manquent d’argent, on en imprime. Simple comme bonjour!
Pourquoi le même principe, le même simplisme, ne s’appliquerait-il pas aux salaires? On hausse considérablement les salaires de tous les contribuables et on augmente consécutivement les revenus de l'État en impôt. On offre aux Québécois les mêmes salaires concurrentiels qu’à New York, Toronto et Boston. Cela attire les cerveaux venus d’ailleurs. Cela augmente la consommation, les revenus de l’État, la richesse collective et le PIB. Nous sommes tellement devenus riches, que nous pouvons même nous permettre de baisser les tarifs! C'est simple et tout le monde est content !
Aussi simple que de hausser les tarifs, aussi simples que d’imprimer des billets de banque, mais tellement plus efficace!
Mais voilà, les économistes - les Facal, Dubuc, Montmarquette et compagnies - ne seront pas d’accord pour des raisons à caractère idéologique, par intégrisme capitaliste, parce qu’ils ont appris dans leurs facultés d’économie que ça ne se faisait pas, comme imprimer des billets de banque ne se faisait pas, que c’était trop dangereux. Les mêmes qui nous disent d’augmenter les tarifs nous diront que ça ne se fait pas augmenter le salaire des contribuables, ça freine l'économie.
Alors, qu’il nous explique donc pourquoi les salaires sont plus élevés à New York, alors que le prix de l’essence y est moins élevé qu'à Montréal? Parce qu'on est né petit et qu'on doit rester petit pour mieux se faire exploiter!
Le simplisme a bonne presse seulement lorsqu’il s'agit d'étrangler les moins nantis, pas lorsqu’il s'agit de partager la richesse !

Featured bccab87671e1000c697715fdbec8a3c0

Louis Lapointe534 articles

  • 888 978

L'auteur a été avocat, chroniqueur, directeur de l'École du Barreau, cadre universitaire, administrateur d'un établissement du réseau de la santé et des services sociaux et administrateur de fondation.





Laissez un commentaire



Aucun commentaire trouvé