D’abord, sur la rencontre programmée depuis quelque temps avec le président français. Qu’elle ait été maintenue malgré le tumulte que connaît actuellement la France devrait effacer dans l’esprit de tous l’affront ou le soi-disant affront qu’aurait commis ce dernier en juin en venant au Québec sans prononcer de discours à l’Assemblée nationale.
Dans l’état actuel des choses, alors qu’Emmanuel Macron et son premier ministre, Édouard Philippe, sont débordés par le mouvement des gilets jaunes et leurs relais politiques, c’est une marque d’honneur que l’État français, à travers ses principaux représentants, rend au Québec, à travers son principal représentant. M. Legault doit aussi s’entretenir avec Édouard Philippe.
L’expression «marque d’honneur» est certes empesée, mais c’est bien de cela qu’il s’agit, compte tenu de la situation actuelle en France.
Tellement, que si ces rencontres devaient être annulées à la toute dernière minute par Paris en raison de la crise qui secoue la France depuis des semaines, ce serait parfaitement compréhensible. Ce ne serait d’ailleurs pas une première. En 2005, le premier ministre français, Dominique de Villepin, avait annulé au tout dernier moment un voyage officiel à Québec et à Ottawa en raison de violences qui avaient éclaté aux portes de la capitale française.
Une ligne de conduite
Une chose est certaine, François Legault ne rencontrera aucun des deux chefs de file populistes français, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon, lesquels ont pris un malin plaisir à alimenter la colère des gilets jaunes — en fait, des gilets plutôt multicolores tant leurs revendications sont diverses, voire contradictoires entre elles.
Et il est normal qu’il ne rencontre pas, pour s’en tenir à elle, Marine Le Pen, du Rassemblement national (le nouveau nom du Front national), même si elle compte beaucoup sur l’échiquier politique hexagonal. Elle a retrouvé une place si importante à la faveur de la crise des gilets jaunes que si des élections avaient lieu ces jours-ci, elle pourrait coiffer Emmanuel Macron au poteau.
Il est normal qu’il ne la rencontre pas, compte tenu des rapports du Québec avec la France; des rapports que le premier ministre québécois a le devoir d’entretenir avec ses représentants officiels.
Il est normal qu’il ne la rencontre pas, de surcroît, car François Legault n’est pas un leader populiste, contrairement à ce qu’une certaine caricature a pu seriner. Il ne fait en rien partie de l’amicale des populistes. Il ne remet pas en question les institutions. Il ne joue pas la carte de la provocation.
Tous devraient le comprendre. Y compris ceux qui voudraient qu’il en fasse plus de ce côté.
Même si Marine Le Pen a des partisans au Québec, la question d’une rencontre avec elle ne s’est d’ailleurs jamais posée pour François Legault. Il allait de soi pour lui et son entourage de respecter une ligne de conduite adoptée par tous les chefs de gouvernement et de parti au Québec, y compris lorsqu’elle est venue de ce côté-ci de l’Atlantique en mars 2016. Elle n’avait alors pu rencontrer aucun chef de parti politique québécois. Son déplacement avait été un fiasco.