Les nouvelles règles d'éthique évitent un conflit d'intérêts à un ministre... anonyme

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Éthique et politique

Pour qui Jean Charest a-t-il changé les règles sur les conflits d'intérêts, le 4 mars? La question est restée en suspens hier, alors que l'opposition a continué à reprocher au gouvernement de manquer d'éthique. Amir Khadir est allé jusqu'à parler de «corruption rampante».
Québec -- Jean Charest a refusé de préciser hier pour lequel de ses 10 nouveaux ministres il avait modifié ses directives concernant les conflits d'intérêts, ce que Le Devoir révélait mardi.
«Qui ne répond pas aux règles d'éthique depuis 2007?» a questionné le leader parlementaire du Parti québécois, Stéphane Bédard, hier en Chambre. «Est-ce que c'est le ministre du Travail? Est-ce que c'est le ministre des Relations internationales? Est-ce que c'est la ministre de la Justice? Est-ce que c'est le ministre de la Famille? Ce qu'on veut savoir simplement: "Qui ne correspond pas aux règles d'éthique et de conflit d'intérêts?"»
Mais tant le premier ministre que le leader du gouvernement, Jacques Dupuis, ont évité la question. Ils ont soutenu que la réponse viendrait lorsque les déclarations annuelles d'intérêt, que les ministres doivent produire dans les 60 jours après leur arrivée en fonction, seraient divulguées. Quand le seront-elles? «Le plus rapidement possible, dès que le traitement est terminé», a répondu le bureau du premier ministre hier. En matinée, Jean Charest a laissé entendre que lorsque le public saura pourquoi la modification a été faite, il verra qu'il n'y avait pas là de quoi fouetter un chat.
On sait que le ou la ministre en question est propriétaire minoritaire d'une entreprise qui fait affaire ou pourrait éventuellement être appelée à transiger avec le gouvernement.
L'opposition péquiste y voit une façon de permettre à un ministre «de se placer dans une situation de conflit d'intérêts direct», a dit Pauline Marois hier. Le premier ministre a accusé cette dernière d'exagérer: «La chef de l'opposition officielle nous a habitués à des questions sur tous les sujets. C'est toujours la fin du monde.»
Selon lui, les nouvelles directives ne sont pas «moins sévères» que les précédentes. Il faut selon lui tenir compte du fait que les personnes qui arrivent au conseil des ministres «arrivent toutes avec une vie antérieure, avec des expériences très diverses» et qu'il fallait tenir compte de ces «situations particulières».
Du reste, il soutient que les nouvelles règles édictées par lui le 4 mars «ressemblent à peu près à ce qui s'est fait en Ontario. [...] Au niveau fédéral, c'est la même chose». Pourtant, comme le jurisconsulte Claude Bisson le soulignait en mars 2008 au Devoir, le Québec est le seul gouvernement au Canada à n'avoir ni code d'éthique ni commissaire à l'éthique.
«Le premier ministre doit réexaminer ses dossiers», a soutenu Yves Boisvert, professeur à l'ENAP et fondateur de la revue Éthique publique. À Ottawa, il y a depuis les années 1980 un code de conduite pour les titulaires de charge publique. Et c'est au début des années 2000 que le conseiller à l'éthique du premier ministre est devenu un commissaire à l'éthique désigné au Parlement, comme le vérificateur général. Bref, à Ottawa, «ce n'est pas le PM qui décide si le ministre est en conflit d'intérêts...» a ironisé M. Boisvert.
Le leader parlementaire adéquiste, Marc Picard, a dénoncé les directives du gouvernement Charest par une analogie avec le hockey: «Si vous changez les règles chaque fois que vous changez les joueurs, ça ne marche pas.» Il croit que lorsqu'un élu accepte de «faire partie de l'équipe du conseil des ministres», il ne devrait pas exiger qu'on modifie les règles.
Citant les cas de Philippe Couillard et de Russel Williams, passés de portefeuilles liés à la santé à employés de grandes firmes du même domaine, le député de Québec solidaire, Amir Khadir, a déclaré: «On assiste à une espèce de corruption rampante.» Il souligne qu'avec ces cas de non-respect des règles d'après-mandat, «la corruption s'est déjà installée dans une large mesure» et «il est temps plus que jamais qu'on mette de l'ordre là-dedans».
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Avec la Presse canadienne


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