Macron : la médiatisation des Gilets jaunes, «manipulation» appuyée par une «puissance étrangère»

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Macron devient conspirationniste


Un journaliste du Point rapporte des propos du président concernant la crise des Gilets jaunes et l'affaire Benalla : celui-ci juge que leur surmédiatisation est une «manipulation», orchestrée notamment par la Russie et RT France.


Le journaliste du Point Emmanuel Berretta rapporte ce 1er février plusieurs propos tenus par le président de la République au sujet des Gilets jaunes et de leur médiatisation, qui permettent de se faire un aperçu de son analyse de cette crise. Des propos qui, selon Le Point, auraient été prononcés dans le cadre d'une «conversation libre» avec des journalistes dans le bureau du chef d'Etat, «pour la première fois de son mandat».


S'il ferait «la part des choses», conscient que les «revendications légitimes de la France des ronds-points» ne sont pas à confondre avec «les 40 000 à 50 000 ultra-violents qui veulent abattre les institutions», Emmanuel Macron ne s'en montrerait pas moins méfiant à l'égard du mouvement de protestation, qu'il aurait ainsi analysé point par point avec des propos pour le moins radicaux.


Les Gilets jaunes : montés en épingle par RT et la «russosphère»


«La Russie de Poutine, à travers Russia Today ou Sputnik, affleure» dans le discours du président de la République, selon Emmanuel Berretta. «Le président de la République pointe la responsabilité des médias, leur "naïveté" face à ce qu'il considère comme une manipulation des extrêmes, avec le concours d'une puissance étrangère», ajoute le journaliste. 



Dans l'affaire Benalla comme pour les Gilets jaunes, la fachosphère, la gauchosphère, la russosphère représentent 90% des mouvements sur internet



Autres propos cités par Le Point : «Dans l'affaire Benalla comme pour les Gilets jaunes, la fachosphère, la gauchosphère, la russosphère représentent 90% des mouvements sur internet. De plus en plus, des chaînes d'information disent ''ceci est important, ceci est légitime'' parce qu'il y a du mouvement sur internet. Ce mouvement est fabriqué par des groupes qui manipulent, et deux jours après, ça devient un sujet dans la presse quotidienne nationale et dans les hebdos.» Selon le président, il serait donc évident que les Gilets jaunes radicalisés auraient été «conseillés» par l'étranger : «Les structures autoritaires nous regardent en se marrant. Il ne faut pas se tromper. On est d'une naïveté extraordinaire.»


«La communication officielle ou celle de tous les mouvements traditionnels, elle est très peu active, très peu relayée. Les gens qui sont surinvestis sur les réseaux sont les deux extrêmes. Et après, ce sont des gens qui achètent des comptes, qui trollent. C'est Russia Today, Sputnik, etc. Regardez, à partir de décembre, les mouvements sur internet, ce n'est plus BFM qui est en tête, c'est Russia Today», estime-t-il.


Eric Drouet : «un produit médiatique»


«Drouet, c'est un produit médiatique, un produit des réseaux sociaux», aurait expliqué Emmanuel Macron, tout en déplorant «l'abdication des médias traditionnels à faire leur travail», estimant que «les différentes strates de Gilets jaunes, la déconstruction de ce qu'est le mouvement, de ses influences, la déconstruction de ses influences extérieures, ça, on l'a très peu entendu». Emmanuel Macron aurait ainsi pointé du doigt «une forme, aussi, de légitimation accélérée de ce qu'a été ce mouvement».


Le boxeur Dettinger ne «parle pas comme un gitan»


Autre sujet sur lequel le président serait revenu : le cas du boxeur Christophe Dettinger, arrêté après avoir commis des violences à l'encontre de gendarmes lors de l'acte 8 des Gilets jaunes. «Le boxeur, la vidéo qu'il fait avant de se rendre, il a été briefé par un avocat d'extrême gauche. Ça se voit ! Le type, il n'a pas les mots d'un Gitan. Il n'a pas les mots d'un boxeur gitan.» 


«Re-hiérarchiser les paroles»


Tirant les conséquences de ces constats, Emmanuel Macron aurait poursuivi : «Les quotidiens, quels qu'ils soient, ne font plus l'actualité. Or, vous pouvez manipuler les débats. Il y a quelqu'un qui est à la frontière technologique de cette transformation, c'est Trump. C'est une question que l'on doit se poser. Ça veut dire que le zapping est permanent, qu'il n'y a plus rien de fixe, mais cela veut dire que l'une des fonctions qu'ont les journalistes, qui est justement de hiérarchiser ce qui, dans l'information, est accessoire et ce qui est important ou a du sens, a été abandonnée.»


 

«Si on veut rebâtir les choses dans notre société, on doit accepter qu'il y ait une hiérarchie des paroles», explique le chef de l'Etat. «Je ne crois pas du tout à l'horizontalité là-dessus. L'horizontalité d'un débat, c'est très bien. Mais il faut se poser la question "D'où tu parles ? Quelle est ta légitimité ?" Celui qui est maire, celui qui est député, celui qui est ministre a une légitimité ou une responsabilité. Le citoyen lambda n'a pas la même. Il ne représente que lui-même. Quand je parle avec les citoyens, je les mets tous à égalité. Mais je n'ai pas reçu ici le chef des Gilets jaunes. D'ailleurs, il n'y en a pas. Et quand il y a des Gilets jaunes dans les débats, je ne leur parle pas prioritairement. Je parle aux citoyens, Gilets jaunes ou pas», ajoute-t-il.


«Le président réfléchit donc à un moyen de sécuriser la qualité de l'information face à l'afflux des "fake news". Il souhaite rétablir ce qu'il appelle des ''tiers de confiance'' dans notre démocratie», explique Emmanuel Berretta, avant de citer les propos suivants du chef de l'Etat : «Quand vous écoutez les gens, qu'est-ce qu'ils disent ? Ils veulent couper la tête du président. Ils disent que les députés sont tous des salopards. Ils décident que n'importe qui qui décide est illégitime. Ils ne veulent même plus que quelqu'un décide en leur sein. Et ils disent que les journalistes mentent. [...] C'est la dissolution d'une démocratie si on les suit.»


Comment Emmanuel Macron compte-t-il s'y prendre ? «Il y a un vrai travail sur ce qu'est la presse, sur ce qu'est la fonction politique, sur ce que sont les syndicats, les partis politiques. Il doit y avoir une capacité à re-hiérarchiser les paroles. Ça, c'est fondamental. Parce que, sinon, le complotisme nourrit l'autoritarisme.»