Malgré les réserves, il faut appuyer la présence de l'armée en Afghanistan - Francine Lalonde

Le Canada en Afghanistan

SOURCE: site du Bloc Québécois
« Le Bloc Québécois aurait aimé pouvoir tenir un débat menant à un vote quant à la continuation de la participation des Forces armées canadiennes en Afghanistan comme nous l'avons vivement souhaité lors du premier débat, le 28 janvier 2002.
Aujourd'hui comme hier, c'est comme femme, comme mère que je parle. Autant la guerre me répugne, autant je comprends que des pays comme le Canada réagissent. Mais il faut être certains que ce n'est pas seulement par les mesures de sécurité, les lois antiterroristes et les frappes que nous parviendrons à lutter sérieusement contre les atrocités du terrorisme. C'est en s'assurant qu'il y ait de l'espoir que ce monde soit moins injuste.
Je sais que la situation des femmes, sauf à Kaboul et encore, ne s'est pas vraiment améliorée; je sais que la situation des droits de l'homme est confuse; je sais que la démocratie, malgré la Convention de Bonn et la nouvelle constitution, est très fragile; je sais que le développement ne s'est pas manifesté beaucoup plus que par les milliards tirés de la culture du pavot qui permet aux seigneurs de la guerre, dont certains sont au parlement afghan, de continuer à avoir des troupes à leur solde.
Il faut lire le rapport de Kofi Annan du 6 mars dernier pour comprendre la pertinence des doutes quant à l'évolution de l'Afghanistan et la justesse des questions que les Québécoises et Québécois sont nombreux à se poser.
Si la reconstruction et la sécurité sont si lentes à venir, pourquoi alors les femmes et les hommes de l'armée du Canada sont-ils désormais très majoritairement dans le sud de l'Afghanistan, considéré comme zone de guerre où l'OTAN ne s'aventurera qu'en juillet 2006, entraînant alors une participation d'autres pays?
Pourquoi l'armée canadienne est-elle alors sous la direction de l'opération Enduring Freedom ou Liberté immuable , dont l'objectif principal est de recueillir des renseignements sur les activités terroristes?
Quel est le but de cette présence dans le sud de l'Afghanistan, près des frontières poreuses avec le Pakistan dont les tribus frontalières ont continuellement appuyé, défendu, abrité, soutenu les Talibans? Souvenons-nous que le régime des Talibans n'aurait pu être aussi fort s'il n'avait pas eu le soutien d'une partie de l'État-major et des services secrets du Pakistan. Qu'espère l'armée canadienne?
Le peuple afghan a beaucoup souffert au cours des dernières décennies: sécheresses, guerre contre l'URSS, guerres civiles et dictature des Talibans ont marqué le quotidien des Afghans. Ce pays est parmi les plus pauvres du monde et c'est l'un des endroits les plus dangereux, notamment en raison des 10 à 15 millions de mines antipersonnel qui ont été disséminées, parmi lesquelles les tristement célèbres bombes à fragmentation.
C'est évident que l'Afghanistan est une démocratie sous perfusion. Le Canada y a déjà beaucoup investi, militairement et en aide internationale. C'est le pays auquel l'ACDI a le plus donné. Doit-on cesser ces efforts avant qu'ils n'aient produit des résultats suffisants?
Dans un tel contexte il est normal de se poser des questions. Pourquoi nos soldats, soldates, des voisins, des frères, des sours, risquent-ils leur vie en Afghanistan? A-t-on une idée de la durée éventuelle de la mission en Afghanistan? De plus, peut-on avoir une estimation du coût de la mission?
L'actuel ministre de la Défense , Gordon O'Connor, a posé une série de questions fort intéressantes le 15 novembre 2005, alors qu'il était porte-parole de l'Opposition. L'une d'elles avait trait à un plan de retrait. Or, je lui retourne aujourd'hui cette même question : y a-t-il un plan de retrait?
Je lui demande, par ailleurs, quelle garantie avons-nous que l'OTAN prendra le relais des Américains dans le Sud, à Kandahar notamment, et que le Canada pourra se retirer le moment venu de cette opération?
Il persiste également de nombreuses questions relativement au traitement des prisonniers. Des préoccupations importantes soulevées du fait que, contrairement à ce qu'on tente de nous faire croire en brandissant l'entente intervenue entre les représentants canadiens et leurs homologues afghans, les militaires canadiens transmettraient des prisonniers sans que le gouvernement canadien ne soit assuré que ces prisonniers soient protégés par la Convention de Genève.
Un certain nombre de juristes ont récemment fait part à ce sujet de leurs inquiétudes selon lesquelles cette entente comporte de nombreuses faiblesses. Il semble de plus en plus évident que cette entente doit être négociée à nouveau en son entièreté, voire même au besoin rejetée.
Le gouvernement peut-il de plus nous assurer que l'armée se conforme à ses engagements quant à l'utilisation des mines antipersonnel? Et, peut-on être assurés que les soldats disposent de tout l'équipement adéquat?
Bien sûr, nous appuyons les militaires canadiens qui risquent leur vie. Notre responsabilité, à titre d'élus, est cependant de nous assurer de comprendre clairement dans quel type de mission nous les engageons quand ils risquent leur vie. Le fait qu'ils soient à contrat n'est pas une raison de ne pas se préoccuper de leur sécurité. La façon de faire du Bloc Québécois, ma façon à moi de défendre les militaires, dont plusieurs sont mes concitoyens à la base militaire située dans ma circonscription de La Pointe-de -l'Île, c'est de m'assurer du caractère adéquat de la mission qu'ils mènent, des objectifs qu'ils visent, de l'équipement dont ils disposent et de la formation qu'ils reçoivent. C'est là une raison bien légitime qui justifiait amplement un débat et, c'eut été mieux encore, un vote sur la mission canadienne en Afghanistan. »
Francine Lalonde
_ Porte-parole du Bloc Québécois en matière d'Affaires étrangères
_ Députée de La Pointe-de -l'Île


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