Pourquoi les Nordiques ne reviendront pas à Québec.

Quand le sport devient politique

Depuis plusieurs semaines, on parle du retour des Nordiques à Québec. Tous sont pour la tarte aux pommes. Il faut avouer que le hockey a, à tout le moins, la vertu de stimuler l’intérêt pour le sport. Et cela ne peut qu’être bon pour tenir une population le plus loin possible des services de santé. On ne peut donc que rêver au retour d’une équipe de la LNH à Québec et avec raison.
Mais il y a loin de la coupe aux lèvres. Le financement public est là en partie, mais il reste près de 200 millions à trouver. On imagine d’ici ce que pourraient être les retombées pour une entreprise qui déciderait d’y aller d’un engagement financier dans la construction d’un nouveau colisée. En plus, 50 % du montage financier est déjà au rendez-vous. Il devrait y avoir des intéressés…
Hé bien non ! Comme on peut le constater, les entreprises privées ne se bousculent pas au portillon. Pourquoi en est-il ainsi alors que le temps qui file menace le projet ? Attendent-ils la part d’Ottawa ? Parions qu’elle ne viendra pas ! Les deniers publics d’Ottawa sont comme Godot. Au pays de la finance canadienne, Pierre-Karl Péladeau est perçu comme un « working class » pour ne pas dire un clochard québécois mendiant l’argent du canada aux fins de soigner son égo et soulager sa mégalomanie.
D’autres parts, si la manifestation du 2 octobre démontre de manière indiscutable l’intérêt des Québécois pour le hockey, il n’en demeure pas moins qu’on peut aussi se demander combien d’individus parmi les gens vus sur les plaines auront le moyen de se payer des billets à 100 ou 250 dollars. S’il y en a suffisamment pour permettre à une équipe de hockey professionnelle de survivre dans le marché de Québec, alors c’est tant mieux ! Mais on peut en douter.
Le problème tient essentiellement au fait qu’une génération sépare les fervents de
hockey d’aujourd’hui à ceux d’hier. L’amour des partisans ne suffit plus de nos jours dans un sport où l’argent occupe une position aussi centrale. Car ce qui tient le hockey c’est bel et bien le billet vert. Et cela est encore plus vrai dans une ligue qui ne contrôle toujours pas ses frais d'exploitation, et ce, en dépit d’un plafond salarial.
De plus, si le dollar canadien a pour l’instant une valeur comparable au billet de l’oncle Sam, rien n’indique pour autant qu’une éventuelle reprise la moindrement vigoureuse aux USA ne viendrait pas dévaluer le huard, forçant du coup le retour aux onéreux paiements des salaires des joueurs en dollars américains.
Mais ce qui risque le plus de faire mal aux espoirs du retour d’une concession de la LNH à Québec, ce sont les velléités nationalistes toujours présentes dans le décor. Les valses-hésitations du gouvernement conservateur à Ottawa démontrent encore si besoin est jusqu’à quel point la politique est importante.
À Québec comme à Ottawa, la principale préoccupation demeure encore et toujours la lutte aux « séparatistes ». Les dirigeants de LNH ainsi que les gouvernements fédéralistes successifs à Ottawa comme à Québec n’ont pas besoin d’un dessin pour comprendre combien une équipe de hockey portant la fleur de lys comme emblème peut devenir un redoutable outil cohésion sociale autour d’aspirations nationales.
Que les fédéralistes soufflent à la fois le chaud et le froid n’a donc absolument rien de surprenant. Pendant que les libéraux du Québec tricotent une manche du gilet, les conservateurs roulent une balle de laine avec l’autre extrémité du fil. Dans ce dossier, le gouvernement Charest menacé par les scandales a habilement manœuvré pour reprendre la région de Québec aux adéquistes. Il s’agit purement et simplement de stratégie politique. De leur côté les députés conservateurs de la région de Québec jouent leur va-tout, ne se rendant probablement même pas compte qu’ils ont déjà été sacrifiés par leurs « confrères » du Canada anglais.
Pas de doute donc que la politique et plus précisément la question nationale sont étroitement liés dans ce dossier où les fédéralistes prennent un malin plaisir à manipuler une fois de plus les Québécois. Autrement, les décisions ne se feraient pas attendre comme on l’a vu par exemple dans le dossier du toit du stade olympique où à peu près personne n’a posé de question sauf le marginale chef de l’ADQ.
La question politique est le talon d’Achille du dossier. Guy Laliberté en personne ferait construire un colisée neuf à ses frais et se présenterait à New York chez les gouverneurs de la LNH muni d’un camion de la Brinks que rien n’y ferait. Gary Bettman recevrait sans doute un appel de Toronto pour l’inciter à dire non au patron du Cirque du Soleil. De l’argent, les grands boss de la LNH en ont déjà vu. Et surtout ils savent qui est-ce qui dirige au Canada. Dans ce milieu, on ne fait rien sans se parler…
Incidemment, ce que l’on mesure dans la capitale canadienne c'est d’abord et avant tout les conséquences politiques d'un rejet ou un appui au financement d’un amphithéâtre pour le retour d’une équipe de hockey à Québec. Le nationalisme est toujours bien vivant dans la « province maudite ». Les libéraux agonisent à Québec et les conservateurs semblent avoir fait une croix sur la région au profit des appuis du ROC qui de son côté, continue de souhaiter encore et toujours la ligne dure envers le Québec. En d’autres mots, si c’est oui ici, ce sera alors non là-bas et vice-versa.
Qui du ROC ou du Québec aura raison ? La réponse est facile à deviner pour les conservateurs qui ont certes compris la leçon que viennent de recevoir les libéraux de Shawn Graham au Nouveau-Brunswick. Ce gouvernement a été mis à la porte pour avoir tenté de vendre Énergie-Nouveau-Brunswick à Hydro-Québec. La transaction a donné lieu à un débat raciste et hautement émotif, et ce, même si la vente de la société d’État comportait de nombreux avantages pour la population de cette province. Au Canada anglais, traiter avec le Québec est devenu un acte de trahison que l’on ne pardonne plus.
Il est indéniable que pour les fédéraux qui désirent plus que tout noyer le Québec dans le grand broyeur canadien, ce n’est surtout pas le moment de mettre dans les mains de cette province des outils pouvant lui permettre de s’afficher et ce, sur quelque tribune que ce soit. Ceux qui croient ici qu’il s’agit de fabulation ou de sombre théorie du complot ont oublié sans doute la façon cavalière avec laquelle Québec a été tassée au profit de Vancouver pour les Jeux olympiques de 2010.
De son côté, la LNH a bien reçu le message. Personne à New York n’a oublié que les Nordiques ont forcé la ligue à rédiger des contrats en français. Les Québécois sont perçus comme des fauteurs de trouble par la plupart des dirigeants de cette ligue.
On retiendra donc de cet autre épisode de montée de fièvre pour le hockey à Québec que si le Québec était un État souverain, la question de la construction d’un amphithéâtre et de la candidature de Québec pour les jeux olympique serait réglée. Mais tant et aussi longtemps que subsistera l’insoluble problème entourant la question nationale, la perspective de voir une équipe de la LNH à Québec risque de ne demeurer qu’un beau rêve. Une conséquence du beau risque…


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8 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    30 décembre 2010


    Je suis tout à fait d'accord avec les propos de Daniel Lévesque. Le retour du hockey à Québec serait indéniablement avantageux pour les joueurs québécois mais malheureusement cette équipe serait une plate-forme pour le français, une chose que le Canada et le LNH ne saurait tolérer.
    Le football universitaire démontre que les Québécois excellent quand ils le peuvent. Le Rouge et Or de l'Université Laval à Québec est champion depuis plusieurs années. L'équipe, composée de Québécois, a battu les meilleurs équipes anglophones du Canada, y compris celles de l'Ouest. Et ce qu'il y a de plus remarquable c'est que le football universitaire québécois est assez jeune, le Rouge et Or n'ayant qu'une dizaine d'années. Alors, arrêtons de dire que les Québécois ne sont pas assez " physiques " ou talentueux. Il s'agit vraiment de discrimination mais je dirais qu'elle est involontaire.

  • Archives de Vigile Répondre

    11 novembre 2010


    Pourquoi ne pas explorer la présence des Nordiques dans une autre ligue professionnel.. d'Europe par exemple. Inclure environ cinq autres équipes d'ici rendrait le tout possible. L'Atlantique n'est pas plus grand que le continent américain.
    Au lieu de se battre contre des moulins à vents trouvons des adversaires sur nos patinoires.

  • André Taillon Répondre

    11 novembre 2010

    L’Écran plasma 60’’ me suffit ! Au centre Bell ça coûte un bras et les joueurs sont gros comme un grain de riz vu d’en haut. Si tu veux les voir gros comme des éléphants là ça te coûte les deux bras et les deux jambes!

  • Archives de Vigile Répondre

    4 octobre 2010

    @ Jacques Noël
    Vous jouez sur les mots monsieur. Il en coûte plus de 160 dollars du billet dans les loges au centre Bell pour l'avant-dernier match de la saison 2010-2011 contre les misérables Trashers d'Atlanta. Si vous êtes en couple c'est plus de 320 dollars. Ceci exclut la moindre consommation durant le match, le prix du stationnement et des frais de garde si vous avez des enfants. Vous pouvez toujours jouer avec les chiffres tant que vous voulez. Bien sûr, qu'il y a des billets moins chères. Mais la réalité est là. Le hockey professionnels n'est pas une sortie très abordable. Et m'attaquer personnellement n'y changera rien...

  • Archives de Vigile Répondre

    4 octobre 2010

    Tampa Bay et Toronto font partie de la même ligue. Ils ont les mêmes joueurs (même niveau s'entend) et le même plafond salarial.
    Tampa Bay a des prix de tickets très bas parce que le marché (de hockey s'entend) ne peut pas payer plus. Toronto a des prix ridiculement hauts parce que le marché est prêt à payer 117$ par match.
    A 35$, l'opération n'est pas rentable, ce qui fait que la franchise de Tampa Bay devra déménager. A 117$, la franchise de Toronto est une machine à imprimer de l'argent. Pas besoin de demander 400 millions aux gouvernements pour construire un arena!
    A Québec, le marché pourrait payer, sans difficulté, un ticket moyen de 51$. C'est pour ça que je trouve vos chiffres surréalistes et votre pessimisme déplacé.

  • Archives de Vigile Répondre

    3 octobre 2010

    @ Jacques Noël
    Le tableau auquel vous référez établit la moyenne du prix des billets entre les années 1994 et 1999. Avant de me demander ce que je fume, vous auriez tout intérêt à examiner ce que vous-même consommez. Le prix des billets à Montréal varie entre 75 et 325 dollars. Vous trouvez cela abordable sans doute?

  • Archives de Vigile Répondre

    3 octobre 2010

    Euhhhh...dans votre classement "des billets les plus chers" je remarque la présence de Montréal et Toronto, justement des marchés canadiens ou le hockey s'en tirent bien. Or, la vente de billets pour les matchs du CH et des Leafs en série éliminatoire représente une partie seulement des quelques millions de profits par année que ces 2 équipes sont en mesure de procurer à leurs propriétaires. Tout le monde sait que c'est avec les produits dérivés, les droits de télé, la vente de loges corporatives, le placement publicitaire, etc, que les profits sont au rendez-vous. En d'autres mots, votre classement confirme l'argumentaire de M. Lévesque. Ultimement, souvenons-nous que la propriété d'une franchise de sport professionnel demeure dans la majorité des cas une passion et non un investissement pour des multi-millionnaires ou même milliardaires qui ont les moyens d'y jouer leur fortune.

  • Archives de Vigile Répondre

    3 octobre 2010

    «combien d’individus parmi les gens vus sur les plaines auront le moyen de se payer des billets à 100 ou 250 dollars»
    Vous en fumez du bon! Le prix moyen d'un ticket dans la ligue est de 51$. Montréal est une exception avec une moyenne de 72$, Toronto une aberration (ou une machine à faire de l'argent) à 117$. A Tampa Bay, c'est 35$.
    http://www.andrewsstarspage.com/index.php/site/comments/nhl_average_ticket_prices_since_1994_95/119-2008-09