Maxime Bergeron - Avec ses cheveux frisés, ses lunettes brunes et sa mine sévère, Michael Sabia est l'un des chefs d'entreprise les plus facilement reconnaissables au Canada. Et sans doute l'un des plus controversés.
Né d'une célèbre féministe - Laura Sabia - en 1953 à St. Catharines, en Ontario, Michael Sabia fait d'abord sa marque au gouvernement fédéral de 1983 à 1993. De son passage, les Canadiens retiendront surtout la taxe sur les produits et services (TPS), qu'il conçoit et met en oeuvre.
Sans trop se distancier de la machine étatique, Sabia aboutit en 1993 à la Société des chemins de fer nationaux, où il est nommé chef de la direction financière deux ans plus tard. Sous sa houlette, le CN, moribond, s'inscrit en Bourse et voit sa valeur nette quadrupler.
Auréolé de succès, Michael Sabia arrive à Bell Canada International en 1999, un poste qui le mène jusqu'au siège de grand patron de BCE en 2002. Commence alors un mandat marqué par le délestage de plusieurs filiales - Téléglobe, Bell Canada International, BCE Emergis, Bell Globemedia - mais, surtout, par la stagnation du titre de BCE en Bourse, qui irrite au plus haut point les actionnaires.
Cette difficulté à «créer de la valeur», comme le veut le jargon financier, amène BCE à se mettre en jeu en 2007. Le conglomérat accepte en juin une offre d'achat de 51,7 milliards de dollars du fonds ontarien Teachers' et de ses partenaires. La transaction avorte 18 mois plus tard après de multiples écueils.
Un échec, alors, ce passage à BCE? «Malheureusement, avec la transaction qui n'a pas été conclue, on ne peut pas dire qu'il a réussi son mandat», confie un ancien proche collaborateur de Sabia à BCE. L'ex-haut dirigeant, qui a demandé à garder l'anonymat, tient toutefois à souligner l'important travail de recentrage qu'a fait Michael Sabia chez Bell. «La transformation qu'il a amorcée est-elle terminée? Pas encore, mais je pense qu'il a amené l'entreprise sur la bonne voie.»
Cet ancien collaborateur rappelle aussi la façon dont Sabia, anglophone de naissance qui maîtrise assez bien le français, défendait la langue de Molière au bureau. «Il a toujours protégé le fait français de la compagnie, affirme-t-il. Aussitôt qu'il est parti, le centre nerveux de Bell a déménagé à Toronto.»
Iain Grant, expert en télécommunications au SeaBoard Group, qui suit les activités de BCE depuis des années, souligne pour sa part le côté très «analytique» de Michael Sabia. Tant un défaut qu'une qualité, selon lui. «C'est un homme très cérébral qui a de très bonnes aptitudes quantitatives, ce dont, je crois, la Caisse aura besoin pour se reconstruire», dit M. Grant.
Michael Sabia habite au Québec depuis 16 ans. En conférence de presse, hier, il a insisté sur son attachement à Montréal et au milieu des affaires québécois.
Ce diplômé d'économie et de sciences politiques de l'Université de Toronto et de Yale s'engage par ailleurs dans diverses causes, comme la recherche sur le VIH/sida.
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