Salade hérouxvilloise

La presse écrite et les accommodements raisonnables

Tribune libre 2008

(Texte publié dans Le Devoir du vendredi 4 janvier 2008)
La presse écrite et les accommodements raisonnables. Tel est le sujet de ce
nouveau billet où j'ai voulu vous faire part de mon propre constat.
Salade hérouxvilloise
En cette fin d’année 2007, on constate qu’Hérouxville aura fait l’objet de
bien des discussions au sein de notre toute nouvelle nation québécoise,
mais surtout de moult propos plus ou moins savants de la part de la classe
journalistique. Afin de retracer les ingrédients nous permettant de mieux
mesurer l’éclat et la justesse des propos de nos ‘papieristes’, il serait
de bon ton de leur offrir une salade de fruits hérouxvilloise dont les
ingrédients représentent, le cas échéant, la mesure de l’un ou la démesure
de l’autre. Bien sûr, la recette n’est nullement éprouvée car il faut bien
conserver aux fruits leur véritable saveur. Par contre, il est fort louable
de comprendre les subtilités du travail journalistique qui ont conduit
Hérouxville aux portes des objecteurs de conscience.
Les avelines
L’avelinier produit des noix plus volumineuses que le noisetier.
L’enveloppe de l’aveline est généralement plutôt grossière. L’avelinier
peut servir de haie et d’écran brise-vent mais exige indéniablement que
plusieurs spécimens soient plantés pour assurer une meilleure
polénisation. Gesca et ses nombreux journaux, dont ‘La Presse’, aura bien
mis en pratique cette recommandation sauf que les abeilles disparaissaient
des ruches aussitôt invitées à la fête hérouxvilloise de la polénisation.
Il est vrai que 2007 n’a pas été l’année des butineuses, ces dernières
souffrant d’un mal incurable! Pourtant, deux régions furent épargnées:
Trois-Rivières et Ottawa. Cindy Lévesque, Jean-Marc Beaudoin et Jean Roy,
(‘Le Nouvelliste’), Denis Gratton (‘Le Droit’), pour ne nommer qu’eux,
ont fait un magnifique travail journalistique et ont été d’une honnêteté
intellectuelle irréprochable. Il est vrai qu’ils n’ont pas le mépris tout
montréalais des Pratte, Elkouri, Gagnon, Petrowski, Dubuc et tutti quanti
dans leur sac d’engrais, ceux-là même qui sèment parfois à tout vent!
Les cerises de terre
Les cerises de terre appelées généralement cerises des sables présentent
une culture rustique, dite régionale. De saveur douce et agréable, ces
petits fruits pourpres et violacés demandent d’être mûrs avant
consommation. Leur production exige donc des visites régulières au potager.
Ce qui fut admirablement bien accompli par ‘Les Hebdos Transcontinental’,
ceux-là même qui n’ont jamais hésité à rencontrer leurs intervenants avant
même d’émettre une opinion. Songeons ici à André-Anne Trudel, Marie-Ève
Veillette et Bernard Lepage (‘Hebdo Mékinac des Chenaux’). Leur
disponibilité sert si bien les intérêts du journalisme régional.
La vigne
La vigne produit beaucoup de raisins, personne ne l’ignore. Leur variété
est innombrable. Ces raisins aux teintes multicolores s’apparentent
étrangement à ceux de la colère et de la dérision terminant parfois leur
vie dans des abaisses. Ce n’est pas de la tarte! On pourrait y reconnaître
ici certains ‘blogueux,’ s’abaissant à travers leurs cris alarmistes à ne
générer que l’écho de leurs monologues blasphématoires. ‘Branchez-vous’ en
est un bon exemple. Bien sûr on ne pourrait passer sous silence
l’incommensurable ego qu’expose à travers ses chroniques un certain Patrick
Lagacé (la presse écrasant le raisin). Si la vigne ne vous inspire pas,
rabattez-vous plutôt sur le potiron, image parfaite de nos généreuses
créations web ‘halloweeniennes’ à défaut d’être hollywoodiennes. Sinon, si
vous désirez vraiment joindre l’extase à l’ivresse, allez visiter les sites
web tels pointdebasculecanada.ca ou vigile.net, vous serez comblés par les
débats qu’on y propose. Après tout, ne dit-on pas qu’Internet nous informe
mieux?
Le bon chrétien
Pour ceux ou celles qui l’ignorent, le bon chrétien est une variété de
poires. À se demander si ce fruit devrait composer notre salade! Soyons
indulgents, nous laisserons le soin aux lecteurs et lectrices d’y attribuer
une place au menu.
La fraise des champs
Ce fruit savoureux et juteux annonce un discours passionnel. Comme sa
voisine la mûre et son compagnon idéal, le bleuet, ce fruit respecte un
rituel de cueillette avant même d’en apprécier tous les subtils arômes. Un
journaliste intelligent y a succombé : Richard Martineau. D’ailleurs, ses
collaborateurs au ‘Journal de Montréal’, au ‘Journal de Trois-Rivières’ et
au ‘Journal de Québec ’ mériteraient que ce dernier en partage l’usufruit.
Bien que consommé par ce petit peuple à la langue peu savante (telle qu’on
la parle à TVA et TQS selon deux célèbres dégustateurs), la fraise des
champs exige un sol régional. Avant de labourer leurs propres pages de
leurs comptes-rendus, les journalistes de Quebecor et Canoé ont bien pris
soin de comprendre le principe de la nouvelle. Leur constant souci de
s’abreuver à la source a porté fruit. C’est peut-être ce qui explique leurs
reportages mesurés mais surtout assez bien fouillés et articulés.
La pomme grenade
D’un rouge grenat, ce fruit possède des vertus thérapeutiques peu communes
dont celui de soulager votre prostate. Bien sûr, nous nous rapprochons ici
des thérapies intellectuelles dont ‘Le Devoir ’ connaît si bien la recette.
En passant par les analyses chirurgicales de Denise Bombardier, Stéphane
Baillargeon et Michel David luttant contre Goliath, notre santé littéraire
s’est rétablie. Après tout, le débat se doit d’appeler de nombreuses
divergences d’idées pour faire avancer sa cause!
Messieurs Dames les journalistes, l’introspection, la réflexion,
l’analyse, la recherche, l’éthique et l’aller-retour aux sources sont tous
des ingrédients appelant le succès de votre recette. Seul le fruit de vos
efforts est garant du succès de votre produit. Ne vous inquiétez pas, vos
lecteurs et lectrices en assureront la mise en marché.
Bon appétit!
Bernard Thompson

Hérouxville
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --


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2 commentaires

  • Jean Pierre Bouchard Répondre

    2 janvier 2008

    Un an plus tard après toute cette histoire à Hérouxville que dire en quelques paragraphes. Une certaine « intelligentsia « d’ici a confondu l’excès de tolérance multiculturelle avec une légitime sensibilité inquiète contre une nouvelle préservation dans notre pays de pratiques rituelles ou de mœurs religieuses qui ne passent plus l’épreuve de l’élémentaire raison.
    Il s’avère reconnu que l’expérience historique de la religion s’est formé pour tenter de prévenir au fil des siècles l’incertitude de la récolte des fruits et légumes de la terre tout comme l’ensemble des catastrophes naturelles que nous connaissons (10ème anniversaire du verglas) toujours aujourd’hui. Et que cette même expérience historique religieuse s’est formée autrement afin de réduire par la morale nos tendances à la violence ou à la domination de l’autre. Malheureusement toute ces pratiques religieuses dans le but d’améliorer notre condition humaine n’ont pu se constituer que par des chemins détournés voués à se terminer sur des culs de sac.
    Qu’il y ait une beauté artistique générale et précisément de certains rites qui se dégage de plusieurs siècles d’invention religieuse cela ne fait pas de doute. Ce qui n’empêche pas que l’ensemble des religions s’est servi par exemple de la notion typique de sacrifice pour commettre des crimes contre l’intégrité de vies humaines. Ou que par un autre exemple, la volonté de respect intégral de lois sacrés comprenant entres autres le mariage n’a pu se faire que par l’application de châtiments exemplaires dont on peut retrouver la trace dans tous les bons livres d’histoire, la lapidation étant l’un d’eux.
    De nos jours, aucune religion ne peut se maintenir sans le soutien et l’encadrement d’une crédible juridiction qui ne soit fondé sur la laïcité. Ceux qui suivent par la foi les lois religieuses dans les années 2000 ne peuvent plus ignorer que si elles sont pratiquées avec trop de ferveur, elles débouchent sur la véritable intolérance qui aurait du retenir l’attention de tous les commentateurs intellectuels, journalistes et politiques sans exception.
    Nous sommes victimes d’un multiculturalisme sorti de la tête d’un Pierre Trudeau qui n’a jamais su trop quoi faire avec sa propre identité personnelle. Celui-ci s’est inspiré d’un libéralisme du 19ème siècle encore très sensible philosophiquement à la marque d’un christianisme protestant ou catholique sur les esprits européens ou américains.
    Le multiculturalisme d’un Charles Taylor est selon l’hypothèse tributaire d’un premier libéralisme dépassé de nos jours qui en 1820-1870 n’avait pas rencontré encore les grands progrès scientifiques que nous avons connus depuis. Tout est possible. Rien n’indique dans le futur le maintien de la voie religieuse si la science devait connaître une nouvelle révolution à même de tout radicalement bouleverser.
    Il ne s’agit pas d’exprimer ici que le modernisme rationnel créé un monde extatique, nos sociétés sont pleines de problèmes mais la solution ne se trouve pas dans un retour complet au passé. L’excès d’une rationalité faite du déni de toute forme de l’identitaire dont nous retrouvons la marque dans le fédéralisme bureaucratique, nous connaissons bien. Toutefois l’individualisme identitaire comme tentation propre au multiculturalisme religieux ne mène « au mieux » qu’à l’instauration de ghettos au pire à ce qui s’est passé à *Toronto.
    M.Thompson. N’en doutez point votre chemin est le bon qu’importe les ragots de tous ceux qui veulent opposer le vieux duel entre la grande ville et les régions. Faire un fond de commerce avec le « train des préjugés » c’est peut être une chose encore faut t’il voir ses propres insuffisances d’êtres urbains malades d’un anonymat structurel propre à nos métropoles ou mégapoles. Par votre délicieux article vous nous rappelez nous montréalais notre ignorance des cultures agricoles !
    *Toronto: Un père a tué sa fille parce qu'elle ne respectait pas réellement les commandements de l'islam.
    Pour un Québec libre de ses choix.

  • Raymond Poulin Répondre

    2 janvier 2008

    Votre salade exprime à merveille la dégustation dont auraient pu faire leur profit les premiers goûteurs (aux palais avariés) du code hérouxvillois: le sens de l'humour, qui leur aurait permis de s'accommoder raisonnablement du sens réel de son propos.