BLOC QUÉBÉCOIS

Stratégie de repli

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Certainement pas de repli. De redéploiement plutôt

Le Bloc québécois s’est donné un nouveau chef, qui propose un changement de mission du parti. Dorénavant, avec Mario Beaulieu, ce sera cap sur la souveraineté. Son arrivée suscite inquiétudes et critiques. Il a 16 mois avant le prochain scrutin pour faire mieux que Gilles Duceppe et Pauline Marois pour faire avancer le mouvement souverainiste.
Le choix fait par les militants du Bloc de confier leur parti à Mario Beaulieu a un lien direct avec l’échec du Parti québécois à l’élection du 7 avril. Il était des critiques de Pauline Marois et, avant elle, de tous les chefs du Parti québécois comme du Bloc québécois, leur reprochant de se prêter d’abord à la quête du pouvoir plutôt que de la souveraineté. Ses appuis sont venus de ceux qui estiment que le 7 avril a fait la démonstration de la nécessité de recentrer l’action du mouvement souverainiste sur la promotion de l’indépendance, le reste n’étant que distraction qui l’éloignera de l’atteinte de son objectif.

Ce virage est mal accueilli par plusieurs militants bloquistes, dont sont certainement les quatre députés qui cachent mal leur malaise, car il marque une rupture avec la mission historique du Bloc. Celui-ci a été créé par Lucien Bouchard au lendemain de l’échec de l’accord du lac Meech. Il le voyait dans un rôle de défenseur des intérêts du Québec au Parlement fédéral au lendemain de la trahison que constituait le rejet de cet accord. Ce parti, qui devait être éphémère, le temps que se réalise l’indépendance, a duré.

Ce rôle de défenseur des intérêts du Québec fut repris par Gilles Duceppe qui devint chef du Bloc en 1997 après avoir défait l’ex-ministre Yves Duhaime, qui prônait une stratégie s’apparentant à celle de Mario Beaulieu. Pour Gilles Duceppe, la défense de la souveraineté revenait en premier lieu au Parti québécois, le Bloc ayant à cet égard un rôle de soutien. Cela semblait convenir aux Québécois qui, jusqu’à l’élection de 2011, lui auront donné un appui massif.

Le parti dont Mario Beaulieu prend la destinée n’est plus que l’ombre de ce qu’il a été. Il ne peut plus compter sur cette frange de l’électorat nationaliste dont le vote pour le Bloc québécois était une sanction envers les autres partis, tout particulièrement le Parti libéral, parti traditionnel des Canadiens français, pour son rôle dans le rejet de Meech et le scandale des commandites. En 2011, ils ont vu dans le NPD de Jack Layton un autre véhicule pour les représenter. Ceux-là ne reviendront pas spontanément au Bloc, certains étant même disposés maintenant à retourner au Parti libéral.

Le résultat de l’élection de 2011, où le Bloc ne recueille que 23,4 % des suffrages, aurait dû être perçu comme prémonitoire pour ce qui allait arriver au Parti québécois et qui, en dépit du sursaut de la fragile victoire de Pauline Marois à l’élection du 4 septembre 2012, se confirma le 7 avril alors qu’il n’obtint que 25,4 % des voix. L’hypothèse défendue par Mario Beaulieu est celle de la désillusion de l’électeur souverainiste qui, n’entendant plus ses leaders parler de souveraineté, se désintéresse. D’où la stratégie d’un retour au discours axé essentiellement sur la marche vers l’indépendance, illustré par ce « nous vaincrons » d’une autre époque entendu samedi. Et face au gouvernement fédéral, la confrontation plutôt que l’ouverture.

Le choix des militants du Bloc est un repli, témoignant à la limite d’un certain désespoir. On peut dès lors voir la démarche proposée par Mario Beaulieu comme un test dont on mesurera le succès s’il obtient des résultats meilleurs que ceux de Gilles Duceppe en 2011. On saura si sa thèse tient la route. Autrement, le nouveau chef bloquiste aura fait la preuve qu’il faut chercher ailleurs la cause des difficultés du mouvement souverainiste et plutôt repenser ce projet, le moderniser.


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