Le gouvernement de Justin Trudeau met de la pression sur le Bloc québécois afin qu’il entérine le nouvel accord de libre-échange avec les États-Unis, qui sera soumis à un premier vote à la Chambre des communes mercredi. Il fait valoir que, dans la mesure où le gouvernement caquiste appuie le traité, la formation d’Yves-François Blanchet devrait y donner son aval afin d’en accélérer la ratification.
« Le premier ministre du Québec, François Legault, a souligné que c’était dans l’intérêt des Québécois de ratifier rapidement l’ALENA, et j’espère que le Bloc québécois va penser à l’intérêt des Québécois, et pas juste à son intérêt politique », a lancé M. Trudeau à son arrivée à la Chambre des communes lundi, jour de rentrée parlementaire. M. Blanchet a répliqué que le Bloc « ne prend ses directives de personne », pas même du gouvernement du Québec.
Le gouvernement libéral minoritaire a besoin de l’appui d’au moins un des trois partis d’opposition au Parlement afin de procéder à la ratification de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM). Cela est d’autant plus important qu’il a décrété que le vote engagera la confiance de la Chambre. Le NPD a déjà laissé entendre qu’il n’avait pas l’intention d’appuyer l’ACEUM, tandis que le Parti conservateur, quoique favorable en principe au libre-échange, n’a pas fait connaître ses intentions. Le Bloc québécois se dit insatisfait du traitement réservé à l’industrie — principalement québécoise — de l’aluminium. Sans amélioration, il votera contre l’accord.
L’ACEUM stipule que 70 % de l’aluminium et 70 % de l’acier utilisé dans la fabrication des voitures devra dorénavant provenir d’un des trois pays signataires. Le traité dit que l’acier doit être « coulé et fondu » dans l’espace nord-américain, précision qui n’a pas été faite pour l’aluminium. Les syndicats de travailleurs craignent que le Mexique n’importe massivement de l’aluminium de Chine et le déclare « nord-américain » après une légère transformation. Les représentants patronaux de l’industrie approuvent l’entente, trouvant positif le quota de 70 %, qui n’existait pas auparavant.
Le chef bloquiste réclame des améliorations à l’accord, en soutenant que son parti « prend fait et cause pour les travailleurs de l’aluminium, à ne pas confondre avec les multinationales de l’aluminium ». Mais voilà : la ministre responsable de l’ACEUM, Chrystia Freeland, a bien fait comprendre que l’accord était à prendre ou à laisser tel quel puisqu’il a déjà été ratifié par les États-Unis et le Mexique.
« C’était pendant qu’on était en négociations avec les autres pays qu’on a fait des changements, a dit Mme Freeland. Maintenant, on a un accord qui est déjà conclu, et c’est le moment pour les députés de la Chambre de décider s’ils sont prêts à appuyer cet accord. »
À cela, M. Blanchet rétorque qu’il « existe peut-être des solutions qui ne requièrent pas l’ouverture complète du traité tel qu’il a été négocié ». Il est resté vague sur ses intentions, mais a précisé qu’« un programme de compensation n’est pas ce à quoi on s’attendrait ». Il a indiqué que l’idée qu’il avait en tête protégerait non seulement le secteur de l’aluminium, mais aussi les producteurs d’œufs, de lait et de volaille sous gestion de l’offre. Le caucus bloquiste devait se réunir en caucus extraordinaire tard lundi soir afin de discuter de solutions possibles.
Une délégation syndicale se rendra à Ottawa mercredi pour suivre le débat parlementaire sur l’ACEUM. Le représentant des Métallos pour les travailleurs d’Alma, Alexandre Fréchette, réclame notamment d’Ottawa que les quelque 1,3 milliard de dollars récoltés lors de l’imposition de tarifs punitifs sur l’acier et l’aluminium américains soient offerts à l’industrie pour qu’elle améliore sa compétitivité. « On attend que le gouvernement fédéral envoie un signe qu’il n’a pas abandonné l’industrie de l’aluminium. »