Je me souviens, lorsque j’étais élève au primaire, de certains de mes camarades de classe dont l’attention laissait pour le moins à désirer, plus intéressés qu’ils étaient à perturber le groupe-classe qu’à suivre les explications de l’enseignant qui tentait tant bien que mal de ramener les dissidents à l’ordre.
Plus tard, lorsque je suis devenu enseignant au début des années ’70, confronté à ce type d’élèves, j’ai eu à faire face à ces situations perturbatrices mais, cette fois-ci, de l’autre côté de la clôture.Toutefois, à cette époque, le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) n’avait pas encore fait son apparition sur les bancs d’école de telle sorte que j’ai dû développer des approches adaptées à ce genre d’élèves super-actifs, notamment des rencontres avec eux et/ou avec leurs parents pour tenter de scruter quelles pouvaient être les causes de ces comportements pour le moins inappropriés.
TDAH et surdiagnostic
Parmi la documentation volumineuse que j’ai consultée sur le phénomène du TDAH, je retiens que la pression exercée par l’école à ce chapitre, conduit souvent à un surdiagnostic entourant le TDAH. Les élèves turbulents ou en difficulté de toutes sortes de l’époque pas si lointaine où j’enseignais (1971-2003) sont devenus aujourd’hui des élèves souffrant du trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité nécessitant ipso facto des médicaments. Autrement dit, le TDAH est devenu la réponse toute faite d’avance lorsque l’enseignant est confronté à un élève distrait et/ou super-actif, et la médication, la solution adéquate.
Pour enrayer ce phénomène de surdiagnostic, je me rallie entièrement à la plupart des experts qui s’entendent pour développer une stratégie concertée entre l’équipe-école, la famille et le réseau de la santé afin de réduire la consommation de psychostimulants, tel le Ritalin, chez les enfants éprouvant des problèmes aigus de comportement, notamment d’attention, au lieu de sauter à pieds joints sur une médication qui n’est peut-être pas pertinente, voire contre-indiquée, pour certains élèves.
Utilisation abusive du Ritalin
Selon les données de plusieurs études scientifiques, les Québécois, particulièrement des jeunes de niveaux primaire et secondaire, consomment annuellement quelque 40 millions de comprimés de méthylphénidate, une famille de médicaments dont fait partie le Ritalin, ce qui confère au Québec le titre peu enviable de « champion du Ritalin » au Canada.
Or, il semble qu’une des causes premières du TDHA soit liée à un problème d’adaptation des jeunes aux différents agents stresseurs auxquels ils sont confrontés quotidiennement de nos jours. À mon sens, la consommation de Ritalin par ces jeunes ne contribue qu’à poser un cataplasme sur leur comportement sans s’attaquer aux véritables problèmes qui causent leur « déficit de l’attention ».
Prudence oblige
De nombreux chercheurs avancent l’hypothèse que plusieurs intervenants auprès des jeunes semblent parfois confondre la maturation normale de l’enfant avec un problème de comportement. Loin de prétendre nier l’existence du TDAH, ces chercheurs font ressortir toutefois que les intervenants ont souvent tendance à assimiler au TDAH la réaction normale des jeunes à la pression scolaire, aux difficultés de leurs parents, à un récent déménagement, à une peine d’amour ou à tout autre agent stresseur auquel la société les soumet.
De surcroît, les recherches démontrent une inquiétude pour la santé des jeunes, les effets à long terme de l’utilisation du Ritalin n’étant pas suffisamment documentés. Forts de ces observations inquiétantes, peut-être aurions-nous avantage à user de prudence et à prendre en compte le degré de maturation des enfants avant de conclure sans preuve tangible à un diagnostic malheureusement souvent trop hâtif de TDAH.
Henri Marineau, enseignant du secondaire à la retraite, Québec
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé