Un gouvernement rapiécé

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«Il y a quelque chose de pathétique à voir le gouvernement Couillard se décomposer sous nos yeux»





Il y a quelque chose de pathétique à voir le gouvernement Couillard se décomposer sous nos yeux, alors qu'il n'est au pouvoir que depuis deux ans.


Des questions se posent, avec insistance, sur la capacité du premier ministre de gouverner le Québec. Pourquoi tant d'incohérence et tant d'improvisation ?


Un parti «harpeurisé»


D'abord, il ya le parti libéral du Québec qui traverse une crise existentielle avec tout ce que la Commission Charbonneau et maintenant l'UPAC nous apprennent sur les stratagèmes de collusion et de corruption auxquels il aurait été mêlé.


La justice fera la part des choses, mais dans la perception générale, la réputation du PLQ est déjà entachée. Et ce n'est pas en tentant de s'en dissocier théoriquement, comme l'a fait son chef, Philippe Couillard, le 5 avril dernier, qu'il gagnerait en crédibilité, bien au contraire.


Plusieurs libéraux, même ceux de longue date, dont la loyauté est au dessus de tout soupçon, ne se reconnaissent plus dans leur parti depuis qu'il en a pris les commandes. Ils ont l'impression que le PLQ a perdu son âme et s'est « harpeurisé ».


Un gouvernement rapiécé


Et puis il y a le gouvernement libéral qui n'a plus de libéral que le nom. Et pour cause ! En politique, la loyauté, ca compte. C'est une règle non écrite qui tient à un lien de confiance qui soude des militants à leur parti et une équipe à son chef et vice-versa.


La loyauté est une qualité que le premier ministre Couillard ne connaît pas, sauf envers lui-même. Sous sa gouverne, le PLQ, dont il se targue d'être un grand parti, est devenu un champ de transhumance pour les naufragés du pouvoir.


François Legault doit bien rire de constater que la CAQ contrôle 75 % du budget du gouvernement libéral avec des ministres caquistes qui gèrent les dossiers les plus névralgiques de l'État, ceux de la santé, de l'éducation et du développement économique.


Est-ce que le parti libéral du Québec est à ce point dépourvu de ressources pour que ces ministères clés ne soient pas confiés à des députés libéraux imprégnés des valeurs libérales, enracinés dans leur parti et qui ne manquent ni de loyauté ni de compétence ?


À trois reprises, en moins de deux ans, le premier ministre Couillard a eu l'occasion de composer et recomposer son conseil des ministres et à trois reprises, il a tourné le dos à ces vaillants et dévoués soldats dont plusieurs sont des vedettes locales, régionales voire nationales. Il les a tout simplement ignorés, leur préférant des transfuges. Il exige d'eux une loyauté, à toute épreuve, qu'il n'est pas capable de leur exprimer en retour.


Un PLQ travesti en CAQ


Monsieur Couillard aime se draper de l'étendard des valeurs libérales. En pleine campagne à la direction du PLQ, il s'est hasardé à signer une lettre dans Le Devoir du 5 décembre 2012 sous le titre « Revenir aux sources de l'idée libérale » où il se réclamait, entre autres, de Georges-Émile Lapalme (Chef du PLQ de 1950 à 1958).


Cette sortie lui a valu deux répliques, celle d'un jeune philosophe, Simon-Pierre Savard-Tremblay, parue dans Le Devoir du 1er juin 2013, intitulée « Georges Émile Lapalme pourfendrait Philippe Couillard » et une deuxième, encore plus dévastatrice, de la fille même de Georges-Émile Lapalme, Odette Lapalme, ancienne présidente de la Commission de protection de la langue française qui a publié dans Le Devoir du 5 juin, « Philippe Couillard est bien loin de Georges-Émile Lapalme ».


Voilà qui nous renvoie, sans détour, aux sources conservatrices du personnage Couillard et qui explique pourquoi le PLQ, sous sa gouverne, se travestit en CAQ. C'est ce qui explique aussi qu'il a administré au service public, un régime d'austérité à la Harper, sans jamais en avoir eu le mandat des électeurs et qu'il a chargé un ancien caquiste, Gaëtan Barrette pour appliquer le programme de la CAQ en santé, comme il l'a déclaré lui-même en commission parlementaire.


Que reste-t-il des valeurs libérales ?


Il est utile de rappeler, à cet effet, le magnifique ouvrage de Claude Ryan sur « Les valeurs libérales » qu'il a résumé en sept points : 1. la primauté des libertés individuelles, 2. l'identification au Québec, 3. le développement économique, 4. la justice sociale, 5. le respect de la société civile, 6. la démocratie et 7. l'appartenance au Canada.


À la lumière du bilan de son mi-mandat, le gouvernement Couillard ne mérite pas la note de passage. Au contraire, il a échoué lamentablement en trahissant plusieurs valeurs chères aux libéraux. Jugeons l'arbre à ses fruits.


L'heure du bilan


Au chapitre de la promotion des libertés individuelles, les projets de loi 59 sur les discours haineux, visant à bâillonner la liberté d'expression pour accommoder les intégristes et le projet de loi 62 permettant le port du tchador dans les institutions publiques représentent un net recul pour la société québécoise, pour les droits des femmes et pour la démocratie ;


Pour ce qui est de l'identification au Québec, le premier ministre Couillard est visiblement mal à l'aise avec la promotion de notre langue officielle. Il a tout simplement concédé cet impératif au PQ et à CAQ, comme si le fait d'être fédéraliste était incompatible avec l'affirmation de l'identité spécifique du Québec au sein de la fédération canadienne ;


Même les budgets de la francisation des immigrants n'ont pas échappé au couperet du Trésor. Sans compter que les immigrants qui parlent français enregistrent des taux de chômages deux fois supérieurs à ceux des Québécois de naissance. Notre premier ministre ne voit pas, non plus, la nécessité de parler français dans les forums internationaux, discourir en anglais pourrait suffire ;


Quant au développement économique, depuis toujours, la marque de commerce du Parti libéral, on attend toujours la création des 250 000 emplois, promise lors de la campagne électorale du 7 avril 2014.


Par contre lorsque qu'il est question de maintenir les emplois existants chez nous, comme dans le cas de la vente de RONA, en février dernier, notre premier ministre, qui n'est pas à une incohérence près, a trouvé le moyen d'y voir « une bonne nouvelle ». Pourtant, il s'était engagé à protéger les sièges sociaux qui représentent disait-il, « une contribution économique et sociale considérable, autant sur le plan de l’emploi que sur le plan de l’activité économique » (engagements PLQ, 13 mars 2014) ;


La justice sociale, elle peut attendre, car les plus vulnérables, notamment les malades, les jeunes en difficulté, les personnes âgées n'ont pas fini d'écoper suite aux coupures drastiques effectuées, de façon paramétrique, sans étude d'impact, dans les services de santé et services sociaux.


Et pour l'appartenance au Canada, il ne faut surtout pas contrarier le fédéral et les autres provinces en affirmant le volonté du Québec d'avoir une reconnaissance totale et entière dans la constitution canadienne.


À mi-mandat et à l'allure où vont les choses, il ne faut pas s'étonner si des libéraux commencent à se demander que s'il y a tant de ressemblances entre la CAQ et le PLQ, il serait peut-être tant de prendre l'original au lieu de la copie.




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