UPAC: On n’est pas près de voir Jean Charest derrière les barreaux

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La corruption libérale est une conséquence du fédéralisme

Les frasques de l’Unité permanente anticorruption (UPAC) ont profondément marqué l’année 2018 au Québec, malheureusement plus négativement que positivement. Malgré tout ce qui a été révélé concernant la corruption flagrante régnant au Parti Libéral du Québec, les hommes de Robert Lafrenière se sont avérés incapables de procéder à des arrestations, choisissant plutôt de traquer les lanceurs d’alerte pour les faire taire. Cette enlevante saga culminait le 1er octobre, alors que le commissaire de l’UPAC en personne démissionnait sans donner de raison alors que le PLQ encaissait le pire revers de son histoire.


Si elle souhaite conserver un minimum de crédibilité en 2019, l’Unité permanente anticorruption doit donner des résultats, à commencer par l’enquête Mâchurer sur Jean Charest et Marc Bibeau, grand argentier du PLQ, qui traine depuis 2013.


Le public est au courant


Dans les dernières années, énormément d’histoires à dormir debout sont sorties dans les journaux concernant la nébuleuse ère Charest au PLQ : cocktails chez Marc Bibeau réunissant hommes d’affaires, ministres libéraux et serveuses en kimono; courriels de la directrice du financement du PLQ, Violette Trépanier, prouvant qu’elle monnayait des contrats publics pour des dons au Parti Libéral, et ce n’était que le début.



je croule sous les piassesssss




Comment oublier l’arnaque du siècle que fut le scandale de la SIQ, où des collecteurs de fonds libéraux ont pu racheter des bâtiments gouvernementaux en deçà de la valeur du marché, puis faire signer des baux à l’État par-dessus la valeur du marché, alors que le gouvernement du Québec payait jusqu’à l’entretien ménager des locaux? Il s’agissait de la plus grande fraude d’une société d’État de l’histoire du Québec, perpétrée par des libéraux affichés, dont certains avaient des liens plutôt serrés avec Philippe Couillard.


Il y a là suffisamment de faits pour faire constater à n’importe qui les graves manques d’éthique au PLQ, qui formait le gouvernement du Québec alors que ces choquantes histoires ont été dévoilées. Dès lors, les forces de l’ordre auraient dû s’activer pour que les têtes roulent chez les rouges, n’est-ce pas?


Le système se protège lui-même


Pourtant, c’est exactement l’inverse qui s’est produit : plutôt que de porter des accusations contre les criminels du Parti Libéral, l’UPAC a montré les dents…envers ceux qui ont dénoncé les pratiques illégales et immorales du parti.


C’est notamment le cas d’Yves Francoeur, président de la Fraternité des policiers de Montréal ayant déclaré au printemps dernier que des enquêtes criminelles sur les ministres libéraux Jean-Marc Fournier et Raymond Bachand avaient été bloquées par ingérence politique en 2012. Même si M. Francoeur affirmait avoir reçu plusieurs témoignages et dirigeait un syndicat de plus de 4500 policiers, les appareils politique et policier lui sont tombés dessus pour enterrer les accusations. Le ministre Martin Coiteux a poussé l’absurde jusqu’à lui reprocher de « semer le doute envers les institutions dans l’esprit de la population », comme s’il n’y avait pas déjà de quoi douter.



L’impression que cela a donné était pour le moins défavorable au corps de police spécialisé créé par Jean Charest en 2011 : l’UPAC avait l’air de la police du PLQ, dormant au gaz lorsqu’il est question d’arrêter les politiciens corrompus, mais proactive pour faire taire les sonneurs d’alerte comme Guy Ouellette et protéger la « famille libérale ».



Le clou du spectatcle a néanmoins été l’affaire Guy Ouellette, encore en développement en ce moment même. Tout a commencé en octobre 2017, alors que l’UPAC a organisé un traquenard pour arrêter le député libéral de Chomedey, soupçonné d’avoir dévoilé des informations sur les pratiques illégales de son parti aux médias. Pendant ce temps, Robert Lafrenière bombait le torse, disant mener une lutte acharnée aux fuites d’information concernant l’enquête Mâchurer sur Charest et Bibeau, dont aucune accusation n’est émanée depuis son début en 2013.


Couillard-UPAC
Caricature d’Ygreck dans Le Journal de Québec


Durant la campagne électorale, le public a appris que Guy Ouellette avait coulé de l’information compromettante au sujet du PLQ à la Coalition Avenir Québec en 2016, ce qui a entraîné son expulsion du caucus libéral une fois l’élection passée. Pire encore, Robert Lafrenière a choisi de démissionner sans explication le 1er octobre 2018, alors qu’il apparaissait certain que les libéraux allaient manger la volée du siècle.


L’impression que cela a donné était pour le moins défavorable au corps de police spécialisé créé par Jean Charest en 2011 : l’UPAC avait l’air de la police du PLQ, dormant au gaz lorsqu’il est question d’arrêter les politiciens corrompus, mais proactive pour faire taire les sonneurs d’alerte comme Guy Ouellette et protéger la « famille libérale ».


 


Jean Charest rit dans sa barbe


En décembre 2017, Robert Lafrenière disait aux Québécois en parlant de Mâchurer : « Soyez patients, ça va être payant. » Un an plus tard, on voit bien que cela a payé, mais pour ceux qui sont ciblés par l’enquête, surtout pour l’ex-premier ministre Jean Charest.


Ce dernier, apparemment blanchi aux yeux de certains, n’a cessé de reprendre du mieux depuis qu’il a fanfaronné au congrès libéral l’an dernier, riant en pleine face de la police et des médias comme s’il était intouchable. En 2018, Jean Charest a fait son grand retour dans l’espace public, donnant des entrevues à la radio à son ex-vice première ministre Nathalie Normandeau (actuellement accusée de fraude, complot et abus de confiance). Récemment, La Presse+ lui a même dédié un grand dossier, où il propose ses solutions pour s’attaquer au vieillissement de la population, visiblement dans le but de le réhabiliter comme un acteur politique respectable et intègre.



Et je sais que vous aussi, vous suivez mes activités, qui sont rapportées de temps en temps dans les journaux. Je sais, parce que moi aussi j’apprends ce que je fais dans les journaux.




Espérons qu’en 2019, l’UPAC fasse son travail et accuse formellement les architectes de la culture de la corruption au gouvernement du Québec parce que contrairement à ce que dit Martin Coiteux, ce ne sont pas les lanceurs d’alerte qui rendent le public cynique, mais bien les politiciens qui cultivent le copinage et la collusion. Jusqu’à présent, cette mission a été un échec cuisant, et les fanfaronnades récentes de Jean Charest en témoignent.