Ce n’est pas le nom qui fait la chanson. Une évaluation environnementale stratégique sur les hydrocarbures est en soi la bienvenue, mais elle vaudra selon le libellé précis de son mandat, la compétence de ceux qui y siégeront et le temps dévolu pour mener sa mission. Et déjà, le gouvernement a indiqué vouloir des résultats en un an. À quoi rime d’être si pressé ?
En annonçant vendredi la tenue de deux évaluations environnementales stratégiques (EES), l’une générale sur les hydrocarbures, l’autre spécifique sur Anticosti, les ministres Pierre Arcand, de l’Énergie et des Ressources naturelles, et David Heurtel, du Développement durable, de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, ont suscité beaucoup de contentement. Vraiment beaucoup, particulièrement dans certains milieux. « Le signal lancé aujourd’hui par le gouvernement au marché mondial est que le Québec est open for business », s’est réjouie franchement Françoise Bertrand, p.-d.g. de la Fédération des chambres de commerce du Québec.
Les deux ministres avaient quand même présenté les choses autrement, les enrobant des mots rigueur, mise en valeur encadrée et contrôlée, acceptabilité sociale… Mais entre l’accueil prudent que les groupes environnementaux ont réservé à l’annonce, donnant la chance au coureur, et l’engouement total des milieux d’affaires, on peut croire que ce sont ces derniers qui ont le mieux compris les intentions du gouvernement libéral.
Le ministre Arcand a clairement indiqué en conférence de presse vendredi qu’il concrétisait ainsi un engagement pris en campagne électorale. Quelques jours avant les élections, les libéraux avaient en effet fait savoir qu’une fois élus, ils tiendraient un EES sur l’ensemble des hydrocarbures avec un objectif clair : l’exploitation de ces ressources.
Vendredi, le communiqué ministériel soulignait, comme il avait été aussi dit aux journalistes, que « le gouvernement du Québec, même s’il se montre favorable au développement de la filière des hydrocarbures, veut d’abord et avant tout s’assurer de la sécurité des personnes et de la protection de l’environnement ». Soit. Mais si telle est vraiment l’obsession, alors le délai d’un an imparti pour analyser toutes les facettes de cette filière — pétrole dans l’estuaire du Saint-Laurent, projet Old Harry, gaz de schiste, transport des hydrocarbures, notamment par oléoducs… — ne tient pas la route. L’EES qui a porté uniquement sur l’exploitation des gaz de schiste, et qui a conclu récemment ses travaux, a duré… deux ans et demi. La rapidité d’action, sur laquelle insistait vendredi le ministre Arcand, est d’ailleurs l’un des éléments salués par le milieu d’affaires, qui ajoute espérer que le gouvernement s’en tiendra aux échéanciers annoncés.
Non seulement on va vite, mais on va sans s’arrêter. L’exploration pétrolière aura cours sur l’île d’Anticosti durant l’EES qui lui sera consacrée. « Exploration n’est pas synonyme d’exploitation », a précisé le ministre David Heurtel. Certes, mais comment résister à se servir une fois qu’on a trouvé ? Ce sera suffisant pour déclasser toute objection sociale ou environnementale.
Quant à l’exploitation des gaz de schiste dans la vallée du Saint-Laurent, le Parti québécois a raison de le rappeler : une EES en a déjà montré les risques, le BAPE étudie le dossier pour la deuxième fois et les citoyens n’en veulent pas. Qu’ajoutera donc cette nouvelle étude ?
À moins que ce dont il est vraiment question, ce soit « d’évaluations économiques stratégiques », comme a lancé le député de Québec solidaire Amir Khadir, qui a toujours le sens de la formule. Ce n’est pas cela, le développement durable dont le gouvernement se targue. Le scepticisme de fait est de mise.
ÉVALUATIONS ENVIRONNEMENTALES
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