À la défense des descendantes d’Émilie Gamelin

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Impossible de ne pas lâcher une salve anticatholique même en défendant l'héritage des Sœurs de la Providence...


Adolescente, je jouais sur mon harmonica Un Canadien errant. Il y a quelques années, je découvrais que c’était la chanson préférée d’Émilie Gamelin. Dans la foulée, j’appris que la fondatrice des Sœurs de la Providence avait d’abord été dame Gamelin et qu’elle avait transporté clandestinement dans son panier des lettres pour les patriotes emprisonnés. On l’avait d’ailleurs surnommée « l’Ange des prisonniers politiques ». Sa statue en bronze au métro Berri la représentant un panier à la main prit alors pour moi un sens nouveau.


Au moment de ces découvertes, en 2011, j’écrivais alors ma pièce Soledad au hasard dans laquelle elle allait jouer un rôle clé. Émilie Gamelin était une travailleuse sociale doublée d’une infirmière. Celle qu’on surnommait aussi « la Providence des pauvres » s’occupait de soigner les moins nantis, les femmes âgées, les sourdes-muettes et les orphelines. Quand elle fonda les Sœurs de la Providence en 1843, son œuvre fut embrassée par des dizaines de femmes inspirées par son humilité, sa simplicité et sa charité. Elle mourut en septembre 1851 du choléra, la COVID-19 de son temps.


En octobre dernier, dans la chapelle de l’ancienne maison mère des Sœurs de la Providence, au 1431 de la rue Fullum à Montréal, Singulier pluriel, la compagnie de théâtre que je dirige, produisait la pièce Valparaíso de Dominick Parenteau-Lebeuf, qui exposait, entre autres, l’arrivée en 1853 à Valparaíso d’une poignée de sœurs de la Providence, dont sœur Bernard Morin, qui allait devenir une figure emblématique du travail auprès des orphelins et des malades au Chili.


L’origine de cette lettre provient du sentiment d’indignation éprouvé en lisant dans Le Devoir l’article révélant que les résidences des Sœurs de la Providence devenaient des foyers d’infection de la COVID-19 et que les religieuses y étaient abandonnées à leur sort.


Nos recherches historiques et nos voyages au Chili sur les traces de nos héroïnes Émilie Gamelin et Bernarda Morin nous ont amenés, Dominick Parenteau-Lebeuf et moi ainsi que toute l’équipe de création de Valparaíso, à côtoyer des sœurs de la Providence. Certaines d’entre elles sont devenues nos amies. Nous sommes filles et petites-filles de la Révolution tranquille et avons dû, certes, nous libérer du joug de la religion catholique qui a engendré pour les femmes une intolérable culture de soumission, mais à l’heure où une épidémie comme celle qui emporta Émilie Gamelin sévit, nous souhaitons réitérer notre soutien à ces infirmières et travailleuses sociales qui ont tant aidé et soigné de gens depuis le milieu du XIXe siècle, tant ici qu’en Amérique du Sud ou en Afrique, et qui, aujourd’hui, sont laissées à elles-mêmes. Notre devoir de mémoire nous rappelle qu’il est essentiel de s’occuper de ces femmes qui se sont tant occupées de « nous ».




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