Ceci est un rêve...

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Récemment, lors d'un colloque tenu à Montréal afin de souligner les vingt ans d'existence du Bloc, Gilles Duceppe a fait la démonstration, sondages et visite du Canada à l'appui, que les Canadiens anglais ne veulent pas reconnaître la nation québécoise et encore moins en constitutionnaliser le statut.
Pour illustrer cette fermeture, Jean Charest et son ministre Benoît Pelletier parlaient du fruit qui n'est pas mûr. Mario Dumont rétorquait alors que si les fédéralistes, et notamment le Parti libéral, ne faisaient rien pour que ce fruit mûrisse, il avait de bonnes chances de pourrir. Devant cette éventualité, Jean Charest en a remis, en affirmant que ce n'est pas d'un statut que le Québec a besoin, mais de stature.
Pour cela, d'ailleurs, il voyage beaucoup, même beaucoup trop aux yeux de certains. Mais il faut reconnaître qu'il a un réseau de contacts dans le monde dont le Québec peut profiter, d'autant plus qu'il sait vendre une image du Québec qui suscite la fierté, celle d'une société non seulement à l'avant-garde en matière de technologies et d'environnement, mais aussi diversifiée et créative sur le plan économique.
Et les Québécois apprécient. Sur le plan politique, il a un succès d'estime là où il passe, tant aux États-Unis qu'en Europe. En Allemagne, on a même déroulé le tapis rouge pour lui. Sa stature est celle d'un chef d'État et ça nous plaît. Mais la stature qu'il recherche en même temps pour le Québec en voyageant et en faisant connaître ses atouts repose en grande partie sur ses épaules, sur son prestige, son leadership, en fait, sur sa propre mesure.
Or, chez lui, au Québec, sa stature s'affaiblit de jour en jour. Il est impuissant, malgré toute la démagogie dont il est capable, à dissiper l'odeur de corruption qui gangrène son parti. Il refuse toujours de déclencher une enquête sur l'industrie de la construction et le financement des partis politiques. Il s'entête. Et les foulards blancs sont de plus en plus nombreux pour la réclamer.
Pendant ce temps, il dégringole dans les sondages et le cynisme de la population augmente. Son leadership est affecté. Des journalistes lui demandent même s'il ne va pas démissionner bientôt. Qui plus est, on entend dire ces temps-ci qu'il se propose de plier devant les recommandations de la Cour suprême et d'accepter que des parents achètent le droit à l'école anglaise pour leurs enfants et leurs descendants, s'ils persistent à les envoyer dans des écoles privées non subventionnées, pour au moins trois ans. Si c'est le cas, ce sera interprété comme un manque de courage et un manque flagrant de leadership.
À ce moment-ci, seul un revirement spectaculaire de sa part pourrait inverser la tendance et sauver sa stature personnelle et celle qu'il entrevoyait pour le Québec. Oui! Ce serait spectaculaire, en effet, si à l'approche de la Fête nationale, il s'adressait aux Québécois et Québécoises pour annoncer trois décisions majeures. La première: une enquête publique sur le financement des partis politiques. La deuxième: le maintien de la loi 104 en utilisant la clause nonobstant afin d'empêcher l'achat de droits linguistiques via la fréquentation des écoles publiques non subventionnées. La troisième: requérir la collaboration de tous les partis politiques du Québec pour ouvrir un vaste chantier de consultation afin de doter le Québec d'une Constitution pour procurer un fondement juridique à la nation québécoise, de nature à assurer sa pérennité et son développement dans le cadre fédéral actuel qui ne reconnaît au Québec qu'un statut de province au Canada.
Si Jean Charest faisait une telle adresse à la nation, la Fête nationale ne serait pas que folklorique, elle serait euphorique. En effet, un horizon politique nouveau apparaîtrait et susciterait beaucoup d'espoir chez les Québécois. Cela apporterait en prime de l'oxygène à notre classe politique qui en a bien besoin. Que ça ferait du bien! Bien sûr, ceci est un rêve, le dernier refuge avant une noirceur plus permanente qui a commencé, telle la nappe de pétrole dans le golfe, à s'étendre sur tout le Québec sur le plan politique.
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Denis Forcier - Shefford


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