Entêtement et sournoiserie: ce sont les ingrédients d'une recette amère concoctée par les libéraux et qui véritablement porte le conflit étudiant à tourner au vinaigre. Les choses s'enveniment, comme on en voit platement quelques signes, mais le gouvernement ne pourra pas s'en laver complètement les mains.
Si elles s'avèrent fondées et liées au conflit étudiant, comme certains le craignent, les menaces de mort proférées à l'endroit de deux ministres du gouvernement Charest seront l'illustration parfaite d'un magnifique dérapage. Parfaitement condamnables, comme l'est d'ailleurs toute forme de violence, ces égarements confirment jusqu'où peut mener le refus de discuter. Tout près de l'indifférence trône le mépris, un mélange explosif qui ne calme pas les ardeurs des manifestants, mais les exacerbe.
Ils étaient donc prévisibles ces gestes déplorables venus pour le moment d'éléments radicaux non représentatifs du mouvement étudiant dans son ensemble. Opposera-t-on les uns aux autres les égarements d'un illuminé à des manifestations quotidiennes menées dans l'ensemble avec dignité et originalité? Le raccourci serait facile. Aux médias et à la population de faire la part des choses, si le gouvernement en semble incapable.
L'exaspération des derniers jours est lentement monté en crescendo, alors que tous — du camp des détracteurs de la hausse comme de celui des partisans — réclament l'ouverture d'un dialogue. Allergique au conflit, la population souhaite que les parties se parlent, peu importe où va son allégeance. Mais cette discussion sensée n'a pas lieu, hélas, un choix politique qui contraste vivement avec le modus operandi associé aux grèves précédentes, si loin recule-t-on dans le temps. Jamais les étudiants n'ont-ils fait face à une telle arrogance dans la riposte. Les interlocuteurs qu'ils sont pourtant ne sont perçus que comme des fauteurs de trouble, des bébés gâtés, des utopistes, des abonnés à la grève.
On voit des observateurs chevronnés de la scène politique se gratter la tête, interloqués: qu'auraient-ils à perdre d'une discussion, ces ministres obtus et obstinés, même si les points de vue s'opposent? L'État n'a-t-il pas la responsabilité minimale de l'écoute, même s'il s'accroche à sa ligne dure?
Chaque jour de ce conflit non réglé éloigne les parties l'une de l'autre. Un mouvement étudiant bâti pourtant autour de la justice sociale, comme l'a rappelé cette semaine en nos pages Guy Rocher, risque de se terminer dans une succession d'injonctions et de combats individuels, portés par un discours légaliste auquel Québec porte flanc, de manière aussi facile qu'odieuse.
Les juges viendront suppléer aux manquements gouvernementaux en somme, une recette à la mode. Comparons l'incomparable: dans un conflit l'opposant au fédéral sur un sujet aussi épineux que le registre des armes à feu, le cabinet de Jean Charest a été contraint de recourir à la justice pour mettre un frein à la destruction de précieuses données, mais c'était après avoir tenté sur tous les tons le dialogue... n'est-il pas?
Entêté, donc, mais sournois aussi, car il cautionne le virage juridique, ce gouvernement réfute officiellement toute prétention électorale, croit engranger les appuis populaires, se frotte les mains de si bien gérer ce conflit alors que dehors, la clameur monte. En vérité, il n'y a pas là de quoi pavoiser; c'est la honte.
Grève étudiante
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