François Legault continue d'être le plus populaire des premiers ministres provinciaux...
François Legault can do no wrong!
Décidément, le chef de la CAQ étire sa lune de miel avec les Québécois! Selon le dernier coup de sonde de la firme Angus Reid, le premier ministre du Québec arrive en tête – à égalité avec le premier ministre de la Saskatchewan – en ce qui a trait à la cote de popularité dans sa province.
Pourtant, des dossiers épineux auraient dû égratigner un peu la superbe de François Legault. Je pense, par exemple, à la gestion erratique, arrogante même, de l’adoption de la loi 40 sur les commissions scolaires. En fait, on sait dorénavant que, sous couvert d’une «réforme» des commissions scolaires, la CAQ a procédé à un rebrassage complet du système d’éducation.
Ce qu’il s’était bien gardé de dire. Et ce qu’il a mené de manière brouillonne en commission parlementaire, ainsi que lors des minimes heures d’études du projet de loi et de la pathétique période de bâillon.
Pas grave: pour l’heure, le gouvernement conserve encore l'estime de l’électorat.
En Gaspésie, là où je me trouve au moment d’écrire ces lignes, le son de cloche est un peu différent. Des intervenants des milieux des affaires ou de la politique municipale ont critiqué durement la passivité, l’absence complète de la ministre des Affaires autochtones Sylvie D’Amours.
Celle-ci est demeurée discrète tout au long de la crise ferroviaire et refuse de se justifier en entrevue. Sur le terrain, à Listuguj par exemple, tant la partie autochtone que les intervenants de la région gaspésienne se demandent ce que ça prendra pour faire réagir la ministre. Si une crise d'une telle ampleur ne mérite pas son attention, qu’est-ce que ça prendra?
Le tout s’est déroulé sans qu’elle intervienne. Et c’est inquiétant.
Absence d’opposition
Au cours des derniers jours, j’ai pu discuter de politique avec des gens de différentes allégeances politiques au Québec. Des chefferies et de l’offensive de Québec solidaire en région à propos de dossiers locaux – Sol Zanetti qui s’est arrêté à Trois-Pistoles, par exemple, dans sa tournée de l’est du Québec, pour jaser du dossier des traversiers. Une initiative intéressante de ce parti.
Vu de l’opposition, on me répète que la lune de miel s’étend surtout à cause d’une conjoncture favorable et prévisible: deux partis sont en reconstruction et en voie de se choisir un nouveau – ou une nouvelle – chef.
On prône la patience. On rappelle que le mandat est encore jeune, que Justin Trudeau avait joui d’une conjoncture similaire à la suite de l’élection de 2015 et que tout s’est gâté rapidement quand tous les joueurs ont foulé la patinoire politique.
C’est vrai. Mais François Legault n’est pas Justin Trudeau. Le chef de la CAQ est un politicien aguerri, il sait lire et décoder le climat politique au Québec. Il connaît aussi très bien le chemin qui l’a mené au pouvoir et celui qui pourrait le garder là.
Un peu de nationalisme par-ci, la gestion de l’État dopée au «gros bon sens» par-là. Et une économie robuste – laquelle n’a pas d’assignation politique – pour éviter les crises et les réformes difficiles.
N’oublions pas, surtout, l’effet durable, sur la popularité du gouvernement, de l’adoption de la loi 21. Je ne compte plus les militants «nationalistes» (et quelques ex-employés) qui, autrefois, appuyaient le Parti québécois et qui, aujourd’hui, encore, défendent le gouvernement de la CAQ en dépit des limites évidentes de cette gouvernance «nationaliste».
La logique est toujours la même; mieux vaut le nationalisme mou de la CAQ qu’un retour des libéraux.
Car le pouvoir, pour François Legault, passe par les régions et les couronnes francophones autour de Montréal et Gatineau. Rien n’indique que l’électorat captif libéral soit à la veille de succomber à la gouvernance caquiste. En contrepartie, Legault peut espérer faire des gains là où subsistent les circonscriptions «indépendantistes» du PQ et de Québec solidaire en région.
Le mandat est encore jeune et la table politique n’est pas encore mise. Le défi, pour le Parti québécois, sera de montrer que le nationalisme de la CAQ est frêle: la loi 21 est imparfaite et toujours à la merci de l’emprise de la nation d’à côté. Et sur la langue, il semble que François Legault ait décidé de ne pas trop se mouiller.
Pourtant, rien n’est réglé au Québec en matière de langue et le français se trouve, aujourd’hui plus que jamais, fragilisé.
À suivre...