Il faut voter... mais pour qui?

Je ne sais pas qui conseille le premier ministre Jean Charest en ce qui concerne les multiples scandales que nous révèlent les journalistes d'enquête sur le terrain municipal en ce moment, mais il est mal conseillé.

Crime organisé et politique - collusion (privatisation de l'État)

Les gens de pouvoir, si prompts à se précipiter devant les caméras chaque fois que l'occasion leur paraît bonne, disparaissent comme par enchantement quand les citoyens attendent d'eux une décision importante qui ne saurait souffrir de retard. Je ne sais pas qui conseille le premier ministre Jean Charest en ce qui concerne les multiples scandales que nous révèlent les journalistes d'enquête sur le terrain municipal en ce moment, mais il est mal conseillé. C'est le moins qu'on puisse dire.

Non seulement faudrait-il que Jean Charest reconnaisse rapidement que les révélations déjà connues justifient parfaitement la mise sur pied d'une commission d'enquête avec tous les pouvoirs nécessaires pour faire la lumière sur le grenouillage qui sent si mauvais, mais on a eu tort, en voulant sans doute le protéger, de le laisser nier cette nécessité. Plus M. Charest va affirmer que la commission d'enquête n'est pas utile et qu'il faut laisser la police faire son travail, plus il se place en situation de faiblesse.
La question qui vient automatiquement à l'esprit c'est: de quoi Jean Charest a-t-il peur? C'est déjà commencé, car cet homme n'a pas la réputation d'être au-dessus de tout soupçon. Ça va juste s'amplifier. À moins qu'il trouve le courage de mettre en place, immédiatement, une commission qui sera totalement libre de fouiller dans tous les coins. C'est nécessaire et c'est urgent.
Il faut bien le dire, ce n'est pas très joli ce qu'on découvre à Montréal et autour de Montréal en ce moment, et rien ne nous permet de penser que la situation ne soit pas la même dans les autres villes et villages du Québec. La république de bananes (dont on parle souvent en riant) et ses tentacules malsains s'étendent bien au-delà de tout ce qu'on peut imaginer. Nous venons d'avoir la confirmation que l'argent public sert à enrichir les «happy few» qui s'en mettent plein les poches sans remords et sans aucune intention d'assainir la situation qui leur rapporte tant. Surtout que personne ne s'est encore frappé la poitrine en disant: c'est de ma faute. Personne. Nulle part.
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Il est évident qu'il faut maintenant avoir le courage d'aller jusqu'au bout de l'immense nettoyage qu'il faut faire. Ce qui signifie pour nous qu'il faut jouer notre rôle de citoyen. La démocratie est à ce prix. J'espère que le citoyen ordinaire aura finalement compris que chaque fois qu'il affirme qu'il ne veut pas aller voter, chaque fois qu'il passe son tour, chaque fois qu'il permet à un politicien d'affirmer que le peuple ne veut pas d'élection, il remet son pouvoir, le seul qu'il ait vraiment, entre les mains de personnes qui ne se gêneront pas pour l'utiliser en leur faveur, qu'ils soient membres de la mafia ou dirigeants d'entreprises de construction.
C'est vrai au niveau municipal. C'est vrai au niveau provincial et au niveau fédéral aussi. Il est facile d'imaginer comment se fait la distribution des contrats cachés ou connus, le brassage d'argent que ça implique, la main gauche qui ignore ce que fait la main droite, le silence des élus et le sourire en coin de certains fonctionnaires sur une musique douce qui joue l'air célèbre du Parrain: parle plus bas, on pourrait nous entendre...
Nous avons du pain sur la planche. Il n'y a rien de réjouissant dans ce qui est connu maintenant et il est probable que ce n'est que la pointe de l'iceberg. Il faut être reconnaissants envers les journalistes qui semblent avoir retrouvé d'un seul coup le goût de faire leur métier, un goût qu'ils avaient perdu depuis des années, se consacrant davantage aux chiens écrasés et aux vedettes «pipeule» qu'à l'état de notre démocratie qu'on rabote autant à Ottawa qu'à Québec ou à Montréal. Ils affichaient une paresse qui laissait le champ libre à ceux qui avaient de bien mauvaises intentions. Le quatrième pouvoir a retrouvé le goût de défendre la société. Une nette amélioration.
Je leur signale que les citoyens de la ville de Québec s'amusent en ce moment d'entendre le maire Labeaume dire que l'opposition, ça ne sert à rien, et «exiger» d'être majoritaire au conseil municipal en laissant planer la menace de ne pas donner suite à son projet de ramener du hockey dans sa ville s'il n'obtient pas ce qu'il veut. Certains le trouvent même sympathique... On a les politiciens qu'on mérite, disait ma grand-mère, qui était d'une grande sagesse. Si le désir de démocratie était bien vivant à Québec, on tendrait déjà l'oreille quand le maire Labeaume dit ce qu'il pense vraiment. J'espère que là aussi, les journalistes veillent au grain.
À ceux qui auraient tendance à dire que cette semaine a été bien négative, je veux signaler que nous en sortons tous plus avertis, plus intelligents, et surtout plus attentifs à la société qui nous entoure. Nous avons été réveillés brusquement et nous ne pouvons plus prétendre à l'indifférence. Si nous le faisions, nous serions tous complices de ce que nous dénonçons.


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