L'anglais en Suède

Tribune libre

Bien sûr la Suède est un pays modèle en particulier pour ce qui est des mesures sociales et du développement durable mais qu’en est-il du point de vue linguistique.
Sur le site d’Education First, un organisme voué à l’enseignement des langues, on trouve un classement des pays du monde en fonction du degré de pénétration de la langue anglaise. On y apprend que la Suède et les pays scandinaves en général sont parmi ceux où la présence de l’anglais est la plus forte.
On y fait mention qu’en Suède :
«Au niveau universitaire, la plupart des programmes incluent des cours donnés en anglais et que souvent les mémoires finaux sont rédigés en anglais.
La main d’œuvre suédoise est presque totalement dotée d’un niveau d’anglais très élevée. La plupart des emplois qui requièrent un diplôme universitaire nécessitent des capacités en anglais. La majeure partie des cadres doivent parler anglais sur leur lieu de travail autant qu’ils doivent lire, écrire et compter. Dans une économie dominée par l’exportation, l’anglais devient une compétence importante pour tous les travailleurs et de ce fait les écoliers de plusieurs générations ont eu une scolarité qui mettait l’accent sur les capacités à parler anglais.
La Suède est un petit pays, géographiquement périphérique, qui a été dépendant de l’échange international depuis l’époque des Vikings. Aujourd’hui plus de la moitié du PIB suédois est issu des exportations et l’influence étrangère est plus forte que jamais.
Les suédois eux-mêmes se sentent internationaux, bien que peu d’entre eux mettent en question ce sentiment ou l’origine de leur grande maîtrise de l’anglais. Il s’agit pour eux d’un fait qui va sans dire.
La musique anglaise et américaine est très populaire et de nombreux artistes suédois chantent en anglais.
La plupart des immigrants parlent anglais plutôt que suédois lorsqu’ils arrivent et l’anglais est fréquemment utilisé comme moyen de conversation. Les mots étrangers se fraient un chemin non seulement dans les conversations de tous les jours et dans l’argot, mais aussi dans les dictionnaires»
Comme on peut voir c’est un portrait qui correspond bien à ce qu’on observe au Québec. Collectivement les Suédois semblent toutefois plus réceptifs à l’anglais que les Québécois.
Sur un autre site, on trouve un point de vue critique sur cette situation.
Toujours à propos de la Suède l’auteur note que :
«Selon de professeur Jan Svartvik «dans plusieurs lycées suédois, on voit apparaître un enseignement bilingue, c’est-à-dire, un enseignement qui s’accomplit en anglais, non seulement pendant mais également dans d’autres cours comme la physique, les mathématiques et l’histoire. L’idée est sans aucun doute bonne : faire utiliser l’anglais aux élèves comme un outil fonctionnel pour devenir bilingue «pour de vrai». Faire usage de l’anglais comme langue de classe pendant les cours de physique par exemple peut souvent conduire à un emploi de la langue moins nuancé et donc une approche plus superficielle du sujet étudié.
Une condition pour que l’anglais soit utilisé dans l’enseignement est que les professeurs aient eux-mêmes un bon niveau d’anglais.
La vie des affaires est en parallèle avec la situation des enseignants dans les lycées. Il est parfois préférable que les conseils d’administration de sociétés internationales suédoises se dotent d’hommes d’affaires étrangers ayant une longue expérience internationale. Un industriel suédois explique «nous pensons bien parler l’anglais en Suède. Pourtant, l’intensité de la discussion n’est pas la même quand on parle anglais à une réunion du conseil d’administration».
Le Suédois moyen s’en remet à l’anglais dans toutes les occasions. Cette attitude n’est malheureusement pas réaliste. L’anglais ne fonctionne pas toujours dans de nombreuses parties du monde. L’obsession de l’anglais comme langue de contact vient aussi du fait que les sphères culturelles des pays occidentaux connaissent une influence anglo-américaine sont largement dominantes dans les pays récepteurs. De nombreux experts en linguistique sont inquiets de la disparition éventuelle du suédois.»
En Suède il y en a pour craindre la disparition éventuelle de la langue nationale !
En somme le Québec et la Suède sont dans la même situation à ceci près que la Suède semble se défendre moins et être plus avancée sur le chemin de la diglossie qui donne à l’anglais un statut supérieur ou de l’anglicisation pure et simple. Le fait de laisser toute la place à l’anglais semble conduire à des situations où l’efficacité en souffre. On est toujours plus à l’aise dans sa langue pour penser, créer et s’exprimer. Je me demande d’ailleurs si le recul de l’occident ne serait pas dû en partie à une surutilisation de l’anglais comme langue véhiculaire.
À bien des égards devant le peu de défense affichée contre lui l’anglais semble en passe de faire la même chose que le latin sous l’empire romain et de se substituer aux langues nationales là où on lui reconnaît le statut de porteur d’une civilisation supérieure. À bien des égards on a l’impression que l’Europe et le reste du monde ont laissé tomber et s’abreuvent sans réserve à la mamelle de la culture anglo-saxonne. Toutefois cette culture est en perte de vitesse et d’autres pôles de civilisation sont en voie d’émergence (ou de réémergence). La polymorphie de la culture sera sans doute sauvée. Allons-nous nous soumettre à l’hégémonie des perdants ou nous assumer et affirmer notre originalité dans un monde au faciès culturel renouvelé.
On verra.



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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    13 mars 2012

    Intéressant ce parallèle avec la Suède. Intéressant car il s'agit d'un pays en crise identitaire qui risque de devenir premier pays européen à devenir démocratiquement islamique.
    À faire trop de sacrifices au nom du dieu "Marché économique", on finit invariablement par y perdre son âme.
    http://www.bivouac-id.com/index.php?s=Su%C3%A8de

  • Archives de Vigile Répondre

    13 mars 2012

    À première vue, ce que je lis dans le texte est vrai.
    Je vais apporter des éléments pour nuancer, et le faire en toute objectivité.
    Pour la musique, il est vrai qu'il s'en fait en anglais, mais il s'en fait autant en suédois, et peut-être plus, qu'il s'en fait en français au Québec. Les Suédois ont aussi leur "Jean Leloup" et leurs "Ginette Reno" et leur "Loco Locass" etc.
    Concernant, l'école, il y a de plus en plus d'écoles où il est possible pour les Suédois d'envoyer leurs enfants dans des classes avec de l'anglais enrichi. Justement, ma conjointe travaille dans l'une d'elle. Mais il y en a aussi au Québec, et ici les écoles Vision Schools sont plus ou moins l'équivalent: http://www.visionschools.com/
    En général, les jeunes suédois commencent l'apprentissage de l'anglais en première année, comme c'est le cas au Québec. Par contre, il y a une grosse différence. La majorité des enfants commencent l'apprentissage d'une troisième langue en secondaire 1 (français, espagnol, allemand en général, mais de plus en plus le mandarin, l'arabe et autres.)
    Donc on voit ici que l'anglais est important, mais il y a plus.
    À la télé, sauf pour les émissions pour enfants, rien n'est doublé, que ce soit des films espagnols, français, allemand ou anglais, etc.
    Finalement, je pourrais continuer, mais bon. Les Suédois parlent bien l'anglais, mais je peux vous assurer, on ne s'intègre pas sans parler la langue. Dans les débuts, à une fête ou dans un bar, un à un je pouvais me faire parler en anglais, mais le "groupe" n'a jamais parlé en anglais parce que j'étais là, ou bien parce que d'autres amis français étaient là.
    J'ai travaillé dans une entreprise, on était de plusieurs nationalités, et quand il y a eu un "möte" (réunion) avec les grands partons, ça s'est fait en suédois, et ils ne se sont pas soucié des téléphonistes et commis à la clientèle.
    Finalement, les Suédois ne sont pas "fiers". Ils font ce qu'ils ont à faire, comme on dit. Pensez au groupe Abba, vous connaissez les chansons en anglais, mais moi en Suède, c'est souvent les versions en suédois que j'entend... Cela pour dire que la Suède est un pays, et non le Québec. Ça fait une méchante différence!

  • Stéphane Sauvé Répondre

    13 mars 2012

    La différence entre le Québec et la Suède:
    Le Québec a été conquis par les anglais.
    Le Québec est entouré de près de 350 millions d'anglophones.
    Les Québécois sont pressurisés par la culture américaine.

  • Archives de Vigile Répondre

    13 mars 2012

    La différence essentielle entre la Suède et le Québec est que la Suède, contrairement au Québec est un pays indépendant. Si le Québec l'était aussi, on ne craindrait pas l'affaiblissement démographique et la diminution constante de locuteurs français par rapport aux locuteurs anglophones.