Histoire

L'engagement en héritage

50 ans après la crise d'Octobre

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Tribune libre

    La crise d’Octobre, qui a cinquante ans cet automne, éveille encore les passions, et polarise les opinions. Il suffit de constater le mécontentement engendré par la photo de Catherine Dorion posant poing levé devant l’affiche du film Les Rose, lors de son lancement à la fin août, ou la popularité de ce même film, qui a suscité de multiples réactions. Plusieurs ouvrages et rétrospectives personnelles sont publiés, ou réédités ces temps-ci, et des analyses de toutes sortes sont partagées (pensons notamment à la publication l’hiver passé de Mon Octobre 70 : La crise et ses suites, de Robert Comeau, et à la réédition toute récente de l’ouvrage-phare FLQ : Histoire d’un mouvement clandestin, de Louis Fournier). L’étude du contexte sociohistorique, ainsi que le témoignage d’acteurs ayant vécu cette période sont nécessaires, et permettent d’éclaircir les zones d’ombre persistantes. Toutefois, une composante fondamentale de la posture morale des felquistes semble à mon sens échapper au débat public.


    Effectivement, c’est par la notion d’engagement qu’Octobre nous lègue son plus puissant héritage. Que l’on cautionne ou non les moyens utilisés, et malgré l’émotion générée par le recours à la violence politique au Québec, la conception du monde qu’avaient les felquistes est porteuse d’espoir. Oui, les enjeux de société ont évolué, mais l’indépendance reste toujours à faire. Également, la solidarité, la lutte contre les injustices et l’oppression, et la volonté de s’organiser collectivement afin d’acquérir et d’exercer son pouvoir d’agir sur un quotidien trop souvent déterminé par des impératifs de consommation et de divertissement, sont plus que jamais révolutionnaires.


    L’alignement des idéaux avec les actions concrètes, la sincérité des convictions et la détermination à « tout mettre en œuvre » peuvent faire peur à certains, mais manquent cruellement au monde tiède et confortable dans lequel nous vivons. L’implication de différents membres du FLQ au sein de mouvements sociaux ou groupes politiques avant Octobre est également inspirante pour la suite du monde. Que ce soit au Mouvement de libération du Taxi (MLT), au Front d’action politique des salariés à Montréal (FRAP), ou au Rassemblement pour l’indépendance nationale (RIN), l’importance accordée par ces derniers au regroupement des forces afin d’en arriver à des solutions collectives à échelle humaine est d’autant plus d’actualité en ces temps particulièrement individualistes.


    En somme, la revendication intègre de la pleine responsabilité de ses actes et positions par les felquistes constitue une bouffée d’air frais en 2020 afin de repenser notre rapport à la participation citoyenne. Quand le simple partage de commentaires sur les réseaux sociaux, rendu facile et accessible à tous, est propulsé au rang d’acte engagé, quelque chose cloche, et il m’apparaît essentiel de retourner en arrière pour réorienter le présent, et diriger le futur. C’est donc pour cesser de se résigner, renouer avec la combativité nécessaire aux luttes sociales et politiques, et ultimement retrouver le sens de la collectivité que l’héritage d’engagement porté par Octobre se doit d’être transmis au fil du temps, et réinterprété de génération en génération. Quitte à continuer de susciter la polémique. 


 


Louis Jodoin


23 ans, étudiant en travail social à l'Université de Montréal


 



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1 commentaire

  • John-Jean Ofrias Répondre

    4 octobre 2020

    Bravo. Votre texte est une contribution précieuse au Vigile. Comme vous le dites, éloquemment : « L’alignement des idéaux avec les actions concrètes, la sincérité des convictions et la détermination à « tout mettre en œuvre » peuvent faire peur à certains, mais manquent cruellement au monde tiède et confortable dans lequel nous vivons. » J'ai hâte de lire plus de texte de votre part. Dirigez, jeune Louis, dirigez.