C’est aujourd’hui que s’est ouvert au palais de justice de Montréal le procès intenté contre le gouvernement du Québec par l’ex-numéro 2 de l’Unité permanente anticorruption (UPAC), Marcel Forget, qui allègue avoir été congédié illégalement.
Plusieurs témoins importants seront appelés à la barre cette semaine, à commencer par l’ex-grand patron de l’UPAC, Robert Lafrenière, qui est questionné aujourd’hui sur les événements qui ont conduit Marcel Forget à démissionner précipitamment de ses fonctions sous la pression de ses patrons, en novembre 2017.
C’est la première fois que Robert Lafrenière parle publiquement depuis sa démission surprise le 1er octobre 2018, soit le jour même des élections remportées par la CAQ.
Lors de ce premier jour d'audiences, l’avocat de Marcel Forget, Me Daniel Rochefort, a mis la table en soulignant le rendement impeccable de son client au sein de l’unité des vérifications de l'UPAC où le climat était réputé toxique et le roulement de personnel élevé à l'époque. Selon Me Rochefort, son client aurait contribué à stabiliser la situation au sein de l’unité qui comptait une quarantaine de personnes.
Ce qui fait dire à Me Daniel Rochefort que le congédiement de Marcel Forget découlait d’une décision strictement politique qui n’avait rien à voir avec son rendement au travail.
Pour étayer cette thèse, Me Daniel Rochefort entend faire comparaître une douzaine de témoins cette semaine et une partie de la semaine prochaine, dont l’ancien ministre libéral de la Sécurité publique, Martin Coiteux, qui sera appelé à la barre mardi.
L’ex-secrétaire général aux emplois supérieurs (Conseil exécutif), André Fortier, sera aussi appelé comme témoin dans cette affaire.
Marcel Forget, qui occupait les fonctions de commissaire associé aux vérifications à l’UPAC depuis 2013, était responsable des enquêtes sur la probité des entreprises qui désiraient briguer des contrats publics.
Démission forcée
Marcel Forget a démissionné de ses fonctions en novembre 2017 après qu’une enquête du Journal de Montréal eut révélé qu’il aurait agi comme intermédiaire dans la vente d’actions de l’entreprise Newtech à cinq de ses collègues policiers et ex-policiers alors qu’il était officier à la Sûreté du Québec dans les années 1990 et 2000 et qu’il n’avait pas de permis de courtier.
Marcel Forget, qui a toujours nié catégoriquement les allégations du quotidien, estime avoir été sacrifié à l’époque par ses patrons pour préserver l’image de l’UPAC, qui traversait alors une crise de confiance interne.
Dans la poursuite déposée par M. Forget en février 2018, ce dernier affirme que ses patrons l’ont forcé à donner sa démission à la suite de la publication de ces informations par le Journal de Montréal.
Des informations totalement fausses, selon M. Forget, et qui étaient par ailleurs insuffisantes
d’après lui pour démontrer qu’il ait pu y avoir une quelconque fraude dans cette affaire.
D’après la version de la poursuite, Marcel Forget aurait été contacté le 30 novembre 2017 par l’ex-secrétaire général associé aux emplois supérieurs, André Fortier, après la parution du Journal de Montréal, pour lui signifier qu’il devait démissionner sur-le-champ à défaut de quoi il serait destitué par le gouvernement.
André Fortier aurait ajouté que les dés étaient jetés et que le ministre de la Sécurité publique de l’époque, Martin Coiteux, était sur le point d’annoncer son départ et que c’était à lui [M. Forget] de décider si le ministre annoncerait une démission ou une destitution.
Affirmant avoir été placé dans une position intenable par ses patrons, M. Forget affirme dans sa poursuite qu’il a été contraint d’agir contre son gré.
La même journée, le grand patron de l’UPAC, Robert Lafrenière, aurait, selon Marcel Forget, annoncé publiquement la démission de son bras droit aux employés de l’UPAC avant même d’avoir reçu sa lettre de démission.
La direction de l’UPAC avait déclaré plus tard dans un communiqué que Marcel Forget avait quitté l’organisation pour éviter de nuire à l’organisation et qu’aucun acte illégal ne lui était reproché.
Créée en février 2011 par le gouvernement libéral de Jean Charest, l'Unité permanente anticorruption a pour mandat de lutter contre la corruption, la collusion et la fraude dans le système public.
Or, les relations étaient pour le moins difficile à la tête de l’organisation, selon deux rapports déposés en 2016 et en 2017 qui faisaient état d’un climat toxique non seulement au sein de la direction, mais dans l’ensemble du bureau.