Allemagne par-ci, l'Allemagne par-là. Depuis que le président français Sarkozy a érigé le système économique allemand en modèle lors d'un entretien télévisé en martelant une douzaine de fois que la France se devait de l'imiter, de l'adopter, il ne se passe guère une journée sans que politiciens et observateurs patentés dissertent jusqu'à plus soif de cette évocation. D'autant que, depuis la prestation télévisée de Sarkozy, les Français ont été témoins d'un fait inattendu, voire inouï: pour la première fois dans l'histoire des relations entre ces deux pays, un chef d'État, en l'occurrence Angela Merkel, a apporté clairement, nettement, son soutien à un chef d'État, il s'agit évidemment de Sarkozy, qui s'apprête à lancer sa campagne. Là où les couples Giscard-Schmidt, Mitterrand-Kohl, Chirac-Schröder observaient les règles du quant-à-soi, de la neutralité, le duo Merkozy a choisi le mélange des genres. Quoi d'autre? Contrairement à la tradition établie depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la chancelière allemande a refusé de rencontrer le principal adversaire de Sarkozy, soit le socialiste François Hollande. Déclinons. Dans la foulée de la prestation conjointe de Merkel et Sarkozy, on a appris que des membres des états-majors de leurs formations, soit l'UMP et la CDU, se rencontraient régulièrement afin d'orchestrer les interventions de Merkel dans le combat que Sarkozy va mener contre Hollande une fois qu'il aura fait acte de candidature. Merkel tient énormément à s'introduire sur le terrain électoral parce qu'elle est habitée par une frayeur: que Hollande soit élu président. Et alors? Elle craint comme la peste la remise à plat annoncée par Hollande du pacte de stabilité financière, du plan d'austérité, négocié et arrêté par elle et son homologue français. En effet, Hollande s'est engagé à rediscuter le plan en question pour mieux l'accompagner d'un plan de relance économique. Passons au modèle économique allemand. Il y a une dizaine de jours, le président français a expliqué que des réformes empruntant aux rites économiques du pays voisin seraient prochainement présentées. L'objectif principal? Réduire les coûts du travail pour que la France soit plus compétitive. Pour ce faire, il entend transférer des coûts de la protection sociale, injecter de la flexibilité dans le temps du travail, diminuer les charges sociales déboursées par les entreprises, modifier les balises du chômage, etc. Le tout avant de se pencher de concert avec l'Allemagne sur la convergence des systèmes de taxation. En mettant l'accent sur ce qui se fait en Allemagne, Sarkozy a favorisé du coup la mise en lumière de ce fameux exemple. Depuis que le chancelier social-démocrate Schröder a imposé un ensemble de règles, l'écart entre les riches et les pauvres s'est tellement creusé qu'il est... C'est du jamais vu depuis la fin de la guerre. Il n'y a pas de salaire minimum. Dans certains états de l'ex-Allemagne de l'Est, 40 % des emplois sont des emplois à moins de 11 $ l'heure, etc. En écoutant Sarkozy formuler son chapelet de propositions, on a eu l'impression de relire un roman français fort bien titré: Mon village à l'heure allemande de Jean-Louis Bory.
La France à l'heure allemande
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé