VICTOIRE DE SYRIZA EN GRÈCE

On se fait peur?

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Le cas de la Grèce démontre l'ineptie des politiques d'austérité

Avant que les Grecs n’exercent leur droit de vote, un chapelet de menaces formulées par Bruxelles et Berlin ont visé un parti et un seul : Syriza, qualifié de radical. Ce dernier a remporté le scrutin. Et si les radicaux étaient à Bruxelles ou à Berlin ?
Jean-Claude Juncker, aujourd’hui président de la Commission européenne (CE), est réputé avoir fait le lit, alors qu’il était premier ministre du Luxembourg, de l’évasion fiscale si contraire à la qualité démocratique, si contraire à l’équilibre entre les droits et les devoirs. Et alors ? La fibre démocratique est chez lui si rachitique qu’il s’est permis de sermonner le citoyen grec avant qu’il ne glisse son bulletin dans l’urne en lui signifiant qu’il lui couperait les vivres si « des forces extrêmes arrivent au pouvoir ». Afin de ne pas être en reste, Angela Merkel a pour sa part évoqué une possible sortie de l’euro. Bref, à l’exercice d’un droit fondamental on a opposé le chantage émotif.

Dans leur entreprise conçue à l’aune des coercitions économiques et politiques, Juncker et consorts ont bénéficié d’un vice linguistique qui cache mal une incroyable et sinistre malhonnêteté intellectuelle : la dénomination de radical constamment accolée à Syriza. À entendre les laboureurs de la caisse de résonance médiatique, on doit s’attendre à ce qu’Alexis Tsipras mette un terme aux droits acquis dont jouit l’Église orthodoxe, propriétaire du plus important parc immobilier sur lequel elle ne verse pas un sou d’impôt, et aux droits accordés aux armateurs sur le front également de l’impôt. À les entendre, on doit s’attendre à ce que Tsipras emprunte au programme commun lancé dans les années 70 par François Mitterrand et donc qu’il nationalise des banques, des industries, etc. Rien, absolument rien de cela n’est prévu.

Ce que souhaite Tsipras, ce qu’il s’est engagé à faire est simple : renégocier les termes et surtout le calendrier des prêts financiers accordés à un pays croulant, il est vrai, sous une dette si énorme qu’elle a mis en relief les carences économiques et politiques du pays. En clair, le prochain premier ministre voudrait une mise entre parenthèses de l’austérité et son remplacement par une politique de croissance. À cet égard, on précisera qu’il compte hausser le salaire minimum à 1000 $ par mois, bonifier un peu le régime des « petites » retraites et supprimer l’impôt sur les revenus de 17 000 $ et moins. Coût de son programme ? Dix-sept milliards sur deux ans, qu’il entend financer en combattant l’évasion fiscale et la contrebande.

Dans cette histoire, il faut bien comprendre qu’en revendiquant une renégociation des ententes avec la CE, la Banque centrale européenne (BCE) et le FMI, qui forment la troïka, Tsipras entend réparer les incroyables erreurs de ces derniers. On s’explique. Quand la troïka a composé et imposé en 2010 son cahier des charges aux autorités grecques, elle avait calculé (sic) que la Grèce serait confrontée à une contraction du PIB en 2011 puis qu’en 2012 la croissance serait au rendez-vous. On avait également calculé (sic) que le sommet du taux de chômage serait atteint en 2012, à 15 %. Bon. Le creux a été enregistré en 2014 avec 28 % de chômeurs, dont 60 % de jeunes.

Pour dire les choses telles qu’elles ont été, la somme des compressions dans les services publics, les amputations de salaires et autres mesures ont eu l’effet contraire à celui escompté. On avait la certitude que le privé ferait preuve d’un dynamisme propre à faire baisser durablement le chômage et qu’ainsi l’assiette fiscale augmenterait. C’est le contraire qui a été constaté, observé, enregistré, quantifié !

La comédie d’erreurs rédigées par les faux crédules de la troïka a eu un contrecoup effarant. À l’été 2013, l’économiste en chef du FMI, Olivier Blanchard, a été dans l’obligation de faire un acte de contrition en stipulant que la base des calculs (sic) sur laquelle reposent les prêts à la Grèce était bancale. C’est à se demander quand aura lieu la grande braderie des diplômes économiques. En attendant, le radical en chef s’appelle Juncker, et non Tsipras.


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