Dans le cadre de l’émission 24/60 télédiffusée sur RDI le 14 mai, Anne-Marie Dussault rencontrait le sociologue Guy Rocher à la suite de son témoignage à la Commission parlementaire sur le projet de loi sur la laïcité de l’État québécois.
Nonobstant l’argumentaire fort étoffé du sociologue de 95 ans, je vous soumets deux éléments majeurs qui me paraissent apporter quelque lumière complémentaire eu égard à la défense du projet de loi 21. Tout d’abord, l’insistance de M. Rocher sur un terme qui avait été oublié depuis quelques semaines dans les propos des divers intervenants, à savoir l’interdiction des signes religieux « ostentatoires », le mot « ostentatoire » faisant bien sûr allusion à la visibilité. Un concept qui s’applique « visiblement » aux femmes musulmanes.
En second lieu et dans la foulée de cette précision pertinente, Guy Rocher a abordé aussi le « principe de précaution » en lien avec le prosélytisme possible d’une enseignante portant, par exemple, le hidjab, et qui pourrait endoctriner certains élèves. À cet effet, le sociologue répond qu’il est « scientifiquement » impossible d’apporter des preuves d’endoctrinement ou non de certains élèves par l’enseignante en question, un argumentaire qui conduit M. Rocher à conclure que, «… dans l'état d'incertitude, il faut protéger contre les risques possibles… L'islam est une religion visible, c'est son choix, mais la société n'est pas obligée d'accepter cela. »
Gérard Bouchard rabroué…
« …M. Rocher venait donner la réplique, en quelque sorte, à un autre sociologue renommé, Gérard Bouchard. Lors du passage de ce dernier en commission parlementaire, mercredi dernier, le ministre responsable du projet de loi, Simon Jolin-Barrette, l’avait d’ailleurs confronté aux positions défendues par M. Rocher.
Le coauteur du rapport Bouchard-Taylor dur les accommodements culturels avait surtout reproché au ministre de n'invoquer aucun "motif supérieur" justifiant d'interdire, aux enseignants et directeurs d'école, le port de signes religieux.
Il avait souligné qu'aucune étude rigoureuse n'a prouvé qu'une enseignante portant le hidjab, par exemple, puisse endoctriner ou traumatiser certains élèves. Rien n’a démontré non plus que le port du voile ou d’autres signes religieux puissent nuire à l’enseignement.
« Si jamais un seul de ces éléments était prouvé, personnellement, je vous le dis tout de suite, je serais tenté d'approuver votre projet de loi », avait affirmé M. Bouchard.
À l'invitation de M. Jolin Barrette, Guy Rocher a répondu à son confrère : « Si ces preuves n’existent pas, c’est parce qu’il est scientifiquement impossible de les faire. […] La recherche que M. Bouchard demande, elle est à peu près méthodologiquement impossible à faire pour qu’elle soit scientifiquement valable. »
En l'absence de telles preuves et justement parce qu'on ignore si les enfants sont véritablement susceptibles d’être influencés par les signes religieux que pourraient porter leurs enseignants, il vaut mieux appliquer le « principe de précaution », a plaidé le sociologue. « Dans l'état d'incertitude, il faut protéger contre les risques possibles. »
Henri Marineau, Québec
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