La commission Charbonneau a été instituée après que la divulgation du rapport de l'Unité anticollusion au sein du ministère des Transports, dirigée par Jacques Duchesneau, eut créé une onde de choc importante au Québec. Après deux ans et demi à rejeter l'idée de mettre sur pied une commission d'enquête publique, le gouvernement de Jean Charest a procédé à un virage à 180 degrés.
Kathleen Lévesque - La commission Charbonneau prend forme. Quatre mois après la création de la Commission d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie de la construction, des détails sur l'état de l'organisation et du fonctionnement de l'équipe de la juge France Charbonneau seront rendus publics aujourd'hui.
Connaîtra-t-on le calendrier des audiences publiques, le nom des experts qui seront appelés à témoigner ou les priorités d'actions compte tenu du mandat fort large de la commission? Le directeur des communications, Richard Bourdon, a maintenu le suspense hier. «Nous serons en mesure d'apporter des précisions [aujourd'hui]», s'est-il borné à dire au Devoir.
Depuis le premier décret du 19 octobre 2011, modifié le 9 novembre afin que la Commission jouisse des pouvoirs conférés par la Loi sur les commissions d'enquête, il aura fallu louer des locaux afin d'y installer l'équipe de commissaires, de procureurs et d'enquêteurs, baliser le terrain à analyser puisque les travaux doivent porter sur les quinze dernières années et réfléchir aux règles de procédures, au site Web à mettre en ligne ainsi qu'à l'ouverture d'une ligne «1 800».
À travers tout cela, le travail de défrichage a débuté notamment du côté des Affaires municipales. Les enquêteurs de la commission ont multiplié les rencontres avec des fonctionnaires du Ministère. Selon les informations recueillies par Le Devoir, ils ont rencontré beaucoup de résistance du côté des bureaux de Québec.
De plus, un procureur de la Commission, Me Claude Chartrand s'est buté au refus de l'Association professionnelle des ingénieurs du gouvernement du Québec (APIGQ) de fournir gracieusement la base de données créée par le syndicat qui permet de faire des liens entre les contributions faites aux partis politiques et notamment les firmes d'ingénieurs.
Le président de l'APIGQ, Michel Gagnon, s'indigne de l'attitude de Me Chartrand. «On va se battre. On a développé un outil; c'est une propriété privée. Si la commission Charbonneau le veut, elle devra payer», prévient-il.
Bien que la tâche soit colossale, le procureur en chef, Me Sylvain Lussier, travaillera à temps partiel au sein de la Commission. Comme l'a indiqué Richard Bourdon, Me Lussier n'a pas mis fin aux mandats qu'il avait déjà comme avocat du cabinet Osler, Hoskin & Harcourt, y compris les dossiers qui le lient à la Ville de Montréal. À cet égard, Richard Bourdon a rappelé que des mesures seraient prises pour éviter toute apparence de conflit d'intérêts entre le rôle joué par Me Lussier au sein de la Commission et auprès de la Ville. En fait, le procureur en chef cédera sa place lorsque la Ville de Montréal sera en cause devant la Commission. Du côté de Montréal, on confirme que Me Lussier représente toujours la Ville dans les dossiers d'espionnage présumé du vérificateur général Jacques Bergeron et de l'ex-président du conseil municipal Claude Dauphin.
Par ailleurs, la Ville de Montréal pourrait faire appel à un cabinet privé pour être conseillée et représentée devant la commission Charbonneau plutôt que de s'appuyer sur son propre contentieux. «La Ville examine les différentes possibilités en tenant compte des besoins particuliers de chacun. [...] Pour nous, l'essentiel n'est pas le nom ou la provenance de l'avocat qui soutiendra les représentants de la Ville devant la commission, mais plutôt que ces personnes puissent bénéficier du soutien juridique auquel elles ont droit et que les représentants de la Ville collaborent entièrement avec la Commission», a affirmé le porte-parole montréalais Gonzalo Nunez.
La commission Charbonneau a été instituée après que la divulgation du rapport de l'Unité anticollusion au sein du ministère des Transports, dirigée par Jacques Duchesneau, eut créé une onde de choc importante au Québec. Après deux ans et demi à rejeter l'idée de mettre sur pied une commission d'enquête publique, le gouvernement de Jean Charest a procédé à un virage à 180 degrés. Il a d'abord annoncé une commission sans pouvoir de contrainte qui a été critiquée et qualifiée de «patente à gosses». Puis, il a changé d'idée devant le mécontentement populaire (qui a même atteint son parti) et, surtout, à la suite de la réaction du Barreau du Québec, qui a accusé le premier ministre de «semer la confusion dans le public». Le 7 novembre, la juge France Charbonneau avait écrit à M. Charest et établi que la Loi sur les commissions d'enquête devait s'appliquer afin qu'elle puisse «exécuter pleinement son mandat».
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