La leçon de RONA

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Un avenir peu prometteur





Mardi, 9 février 2016 – Journée de rentrée parlementaire à Québec.


Ma chronique de ce matin sur le sujet, y compris sur la «cuirasse libérale» et les défis, nombreux, de PKP et du PQ, est ici.


Or, l’actualité ayant la fâcheuse habitude de tout balayer sur son chemin - et nos mémoires sélectives faisant le reste -, permettez-moi de revenir sur la vente de RONA au colosse américain Lowe’s sans l’ombre du début d’une intervention préventive de la part du gouvernement Couillard.


Résultat : le Québec perd un énième siège social appelé à passer sous propriété étrangère.


Dans cette controverse, le rôle joué par les dirigeants de RONA dans cette vente qui, soit dit en passant, leur aura énormément profité financièrement, mérite aussi qu’on s’y arrête. Yvan Allaire, président exécutif du conseil et François Dauphin, directeur de la recherche de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques, le font ici avec grande pertinence.


Vendredi dernier, j’avançais ici que ce refus d’intervenir aurait des conséquences néfastes sur l’économie québécoise et surtout, qu’une intervention aurait été tout à fait possible et souhaitable.


Je mentionnais d’ailleurs un rapport déposé en 2014. Favorable au «maintien et au développement» des sièges sociaux, il était même signé entre autres par l’ex-ministre libérale des Finances, Monique Jérôme-Forget – pourtant loin d’être renommée pour être une grande social-démocrate...


Je citais aussi l’ex-députée libérale Fatima Houda-Pepin qui, sur twitter, réagissait à la vente de RONA en ces termes sans équivoque : «Le Québec, rare État où le gouvernement considère une perte de contrôle économique comme une bonne nouvelle». Ouch...


À la lumière de l’inaction du gouvernement Couillard dans le dossier RONA, plusieurs voix s’inquiètent aussi du prochain siège social québécois qui fera l’objet d’une offre d’achat étrangère, «amicale» ou «hostile».


***


Une autre voix s'ajoute


Aux voix inquiètes, s’ajoute maintenant celle de l’ex-ministre libérale Liza Frulla, nommée l’an dernier par le gouvernement Couillard à la direction de l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec.


Exprimant son «grand inconfort» dans le dossier RONA , Liza Frulla est également d’avis que le gouvernement Couillard aurait pu «bloquer» la vente.


Citée hier dans Le Devoir, l’ex-ministre avance ceci : «Le gouvernement dit qu’on ne peut bloquer parce que les conseils d’administration ont accepté, que ça aurait envoyé le message aux marchés qu’on est fermés [aux investissements]. Pourtant, les États-Unis en ont des moyens qui ne disent pas “je bloque”, mais qui bloquent pareil ».


S’inquiétant elle aussi des intentions à terme de Lowe’s – une fois les belles promesses faites -, elle ajoute ceci : « Eux, en Caroline du Nord, quand ils regardent le grand portrait, qui va y goûter ? Les petits villages. Ça va se vider. Il y a des conséquences ».


Et pour l’avenir ? «On peut-tu penser aux autres entreprises québécoises et voir comment on est capables, nous, d’acquérir au lieu d’être acquis ? [...] Le gouvernement doit trouver des leviers, regarder l’ensemble des compagnies qu’il nous reste, pour s’assurer pour l’avenir qu’on ne laisse pas le libre marché» l’emporter. »


***


Un rapport lancé aux oubliettes


Eh bien, justement, parlant de «leviers», cela nous ramène invariablement à ce même fameux rapport déposé en 2014 pour le maintien et le développement des sièges sociaux au Québec.


Commandé en 2013 par  le gouvernement Marois, son mandat portait sur la «protection des entreprises québécoises» et la production de recommandations visant à «permettre aux entreprises du Québec de mieux se protéger contre des
prises de contrôle non souhaitées ainsi que des mesures qui pourraient favoriser le maintien et le développement des sièges sociaux au Québec
».


Bref, on ne parle pas seulement ici d’offres d’achat «hostiles» comme celle déjà faite en 2012 par Lowe’s envers RONA. Une offre que le gouvernement de Jean Charest avait d’ailleurs bloquée.


Le groupe de travail mandaté en 2013 était composé de Raymonde Crête (Professeure, avocate et directrice du Groupe de recherche en droit des services financiers Faculté de droit, Université Laval); Andrew Molson (Vice-président du conseil d’administration Molson Coors Brewing Company), André Dion (ancien président et chef de la direction RONA et Unibroue); Éric Morriset (Président délégué Direction du Québec Groupe Banque TD Chef de groupe Financement des sociétés, Québec Valeurs mobilières TD Inc.); Monique Jérôme-Forget (ex-ministre des Finances); Robert Paré (Associé Fasken Martineau DuMoulin); Michel Leblanc (Président et chef de la direction Chambre de commerce du Montréal Métropolitain).


Bref, pas la moindre trace dans ce rapport du moindre «socialiste». Personne d'opposé ici à l'existence d'un «marché ouvert». Ni qui que ce soit, pour reprendre l’expression de Philippe Couillard, le moindrement tenté d’ériger «un mur autour du Québec».


Par contre, nous avons des signataires qui croient en la nécessité d'oeuvrer ouvertement au maintien et au développement des sièges sociaux sous propriété québécoise.


Donc, pour ceux et celles que le sujet intéresse – et j’espère pour le bien du développement économique du Québec que vous êtes nombreux à l’être -, vous pouvez lire ce rapport ici.


Il foisonne de recommandations concrètes dont plusieurs qui méritent d’être publicisées à nouveau. Mais surtout, qui méritent d’être défendues et portées sur le plan politique.


Or, qui le fera?



 




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