La mission militaire en Afghanistan, pour les nuls

Tribune libre 2008

Pourquoi le Canada est-il en Afghanistan?
Le Canada est en Afghanistan pour compenser son refus de participer à la
mission américaine en Irak.
Pourquoi les États-Unis sont-ils en Afghanistan?
L’Afghanistan est en Asie Centrale, à proximité de la Russie, de la Chine
et de l’Inde. A proximité de trois pays du BRIC, qui sont le centre de la
croissance économique mondiale pour les prochaines décennies.
Pourquoi spécifiquement l’Afghanistan?
C’est la frontière Est de l’ennemi numéro 1 des américains depuis les
trente dernières années, l’Iran. C’est le passage obligé pour les
ressources gazières et pétrolières de la mer Caspienne, vers la Chine et
l’Inde. La Russie, la Chine et surtout l’Iran ne doivent pas prendre le
contrôle de cette région.
Mais nous aidons tout de même le peuple Afghan…
Rien à voir avec le peuple. Nous aidons à mettre en place un régime
politique qui sera sympathique aux intérêts économiques de nos grandes
entreprises. Depuis quand le Canada dépense-t-il 100 millions de dollars
par mois pour aider un peuple? Comment une occupation militaire, qui dure
depuis 5 ans maintenant et durera encore longtemps, pourrait-elle aider une
population qui souffre de la guerre depuis des décennies?
C’est tout de même une mission multinationale???
En fait, c’est une mission militaire américaine, soutenu par l’OTAN, une
Alliance militaire qui oblige les pays membres à assister un autre pays
membre attaqué. Le commandant suprême des opérations militaires de cette
Alliance, depuis sa création à la fin de la Seconde guerre mondiale, a
toujours été un général américain. Les États-Unis ont affirmés être
attaqués le 11 septembre 2001.

Voyons, le 11 septembre 2001, les États-Unis ont véritablement été
attaqués!

Oui, mais pas par un autre État. Al-Qaida est une organisation terroriste
qui avait déjà ciblé les États-Unis à plusieurs reprises auparavant, par
des attentats à l’explosif en mer et en territoire africain. La différence
c’est que là, ils l’ont fait en territoire américain.
Les États-Unis devaient donc se défendre…
Le rapport du Congrès publié cet été sur les événements nous éclaire à ce
sujet. Les services secrets savaient que les terroristes allaient frapper
aux Etats-Unis, on apprends que certains terroristes impliqués étaient
connus et suivis. La CIA aurait curieusement cafouillée… Les services de
renseignements militaires savaient aussi qu’un attentat se préparait, mais
ils auraient, eux aussi, étrangement, minimisé la menace. Les États-Unis
voulaient eux, depuis longtemps, en découdre avec le régime Taliban. On
sait maintenant que ce monstrueux désastre a été très utile pour forcer
l’ONU à légitimer le renversement du régime Taliban. La légitime défense
d’un État membre. Aussi, il a aidé à forcer les pays de l’OTAN à
s’impliquer, l’assistance à un allié agressé. Il ne restait qu’à imposer
le gouvernement Karsaï.
Ils ont fait exprès???
Non! Pas pour que les tours jumelles tombent. Ils s’attendaient
vraisemblablement à pouvoir contrôler un scénario à l’explosif similaire
aux attentats du passé. Ils n’avaient pas porté attention au scénario de
détournement d’avions de ligne. Ils ont été éberlués, pris par surprise par
la créativité morbide des terroristes et par le fait de n’avoir eu aucune
indication sur l’ampleur du désastre qui se préparait. Le rapport dit
vrai, les bonnes informations n’ont pas été considérées et la menace a été
minimisée. Ce qu’on ne dit pas, c’est qu’un attentat, d’une ampleur
raisonnable, faisait l’affaire de certains. On parlerait ainsi d’un
catastrophique aveuglement tactic, quelque peu volontaire.
Les alliés participent tout de même à la mission.
Disons, diplomatiquement, que les pays européens se sentent plutôt
coincés. Le colonialisme n’a pas bonne presse en Europe. Envoyer des
soldats se battre outre-mer, sous les ordres d’un général américain est
très mal vu. Comme on peut le constater, on ne se bouscule pas pour aller
combattre dans le Sud. Il semble que tout cela ne soit une qu’entreprise
bien anglo-saxonne, comme le sont les puissances qui contrôlent la
distribution pétrolière et gazière mondiales.
On ne peut tout de même pas abandonner la population Afghane.
La seule voie responsable est d’exiger, comme c’est la tradition
canadienne, que les militaires soient envoyés dans un cadre international
comme Casques bleus. Mais ni la Chine, ni la Russie qui siègent au Conseil
de sécurité, ne vont accepter. Lors d’un retrait immédiat, la population
afghane ne sera pas abandonnée à son sort. L’Iran, la Russie, la Chine,
l’Inde et surtout le Pakistan veulent tous jouer un rôle de premier plan
dans le futur de ce pays d’une importance capitale pour l’avenir économique
de l’Asie Centrale. Ils devront faire des compromis.
Former l’Armée Nationale Afghane n’est-elle pas, en définitive, la vraie
solution?

Former et armer à coups de milliards une armée composée d’ethnies
minoritaires, face à l’ethnie pachtoune majoritaire dans la région peut
difficilement être une solution. Nous jouons aux «apprentis sorciers».
Comment croire que les pachtounes joindront en masse cette armée,
prétendument multiethnique, qui lutte contre ses propres séminaristes
religieux, les talibans? Cela ressemble à une sinistre blague. Une
sélection des combattants sur la langue parlée ne prouve quant à leur
l’ethnie, le pachtou était obligatoire lors du régime taliban. C’est une
recette pour les massacres et la guerre perpétuelle.
Qu’y a-t-il de mauvais à vouloir positionner nos intérêts économique dans
cette région?

Il n’y a plus rien de démocratique et d’humanitaire dans l’exercice. Tout
l’exercice devient un cynique, et sinistre jeu de pouvoir. Dans un contexte
de réchauffement de la planète, nous aidons les Grandes pétrolières qui
nous exploitent à ne pas perdre leur monopole sur les énergies fossiles.
Nos soldats meurent en participant à une guerre et une occupation militaire
pour des intérêts privés. Cette politique étrangère nous est imposée en
utilisant une alliance militaire qui se veut exclusivement défensive,
l’OTAN. L’assistance à la population ne devient qu’un accessoire pour
masquer les vrais objectifs. Ceci explique la lenteur des développements,
la croissance de la corruption et de l’économie des drogues. Si c’est cela
le nouveau rôle du Canada dans le monde, nous perdons toute crédibilité
international. Affirmons cette nouvelle réalité, et cessons de raconter
n’importe quoi aux jeunes militaires qui s’enrôlent.
Quelles sont les véritables conséquences de tout ça?
Les puissances de l’Asie Centrale : la Russie, l’Inde, la Chine, le
Pakistan et l’Iran, ainsi que plusieurs petits pays de la région,
travaillent présentement à créer une nouvelle alliance militaire contre
notre occupation. Son nom : l’Organisation de Coopération de Shangaï. Nous
contribuons activement à créer une nouvelle guerre froide et à relancer une
nouvelle course aux armements avec l’Asie.
Qui profite de tout cela?
Les grandes pétrolières, les marchands d’armes et les partis de droite qui
agissent comme services de marketing pour ces grandes manœuvres.
Qui sont les victimes?
En premier lieu la population afghane qui subit une autre guerre. Puis, il
y a nos militaires et leurs familles, qui devraient à mon avis poursuivre
le gouvernement pour fausse représentation ayant causé la mort. Et,
finalement, il y a la destruction de l’idéal canadien. De pays
démocratique, dévoué au service de la communauté internationale et leader
des actions de maintien de la paix; nous devenons un servile défenseur de
la domination pétrolière mondiale par sociétés privées qui contribuent à
l’enrichissement économique de pays occidentaux, particulièrement les
États-Unis et l’Angleterre.
Normand Beaudet
-- Envoi via le site Vigile.net (http://www.vigile.net/) --


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