Entre la crise d'Oka et les aléas de l'Approche commune, peuplé de figures de contrebandiers, de Warriors, de chasseurs et autres bénéficiaires profitant d'avantages indus, animé par la méfiance politique ou l'indifférence, force est d'avouer que l'imaginaire québécois des relations avec les peuples autochtones est plutôt sombre.
Il faut également avouer que les Québécois connaissent très mal la question autochtone, tant dans ses dimensions historiques et juridiques que politiques. De Kebec à Québec, un livre écrit par Éric Cardinal, présente une tentative de remédier à cette méconnaissance et, éventuellement, aux conséquences de celle-ci dans la perception que les Québécois ont des peuples autochtones.
Dans les faits, et sous prétexte d'éclairer un dialogue entre peuples québécois et autochtones incarné par les figures de Denis Bouchard et Ghislain Picard (qui signent également le livre), l'ouvrage offre pratiquement — et bien que l'auteur s'en défende d'emblée — un cours condensé d'introduction aux questions autochtones vues dans une perspective québécoise.
Dans un premier chapitre, qui occupe la plus grande partie de l'ouvrage, les grands jalons de l'histoire de la rencontre entre Autochtones et Blancs sont brièvement relatés, du récit de la traversée du détroit de Béring jusqu'à l'Approche commune, en passant par l'épisode dit de la Découverte, la Proclamation royale de 1763, la révolte de la rivière Rouge et l'échec de Charlottetown.
Cardinal offre ensuite les éléments d'une compréhension de base des aspects légaux de la question autochtone: la nature et les effets du droit de conquête européen, la naissance et le sens des traités et des droits ancestraux, l'obligation fiduciaire du gouvernement fédéral et les effets actuels de l'évolution du droit international sur les questions autochtones.
Enfin, plus brièvement, on trouve dans De Kebec à Québec un tableau de la situation contemporaine des peuples autochtones du Québec: conditions socioéconomiques, négociations politiques avec le gouvernement du Québec, questions actuelles et futures relatives aux relations avec les peuples autochtones.
Un format trompeur
De Kebec à Québec se présente ainsi dans un format trompeur, celui, d'ailleurs un peu racoleur, du dialogue. Or la présence de Bouchard et Picard est accessoire (sept pages en guise d'introduction à l'ouvrage), la discussion entre les deux hommes ne structurant en rien la matière du texte de Cardinal, qui demeure plutôt scolaire.
Or, en cela, et bien que le choix des faits et leur organisation répondent à une vision très québécoise et strictement institutionnelle de la question autochtone, l'ouvrage a sa valeur. Les citoyens québécois y trouveront vraisemblablement des outils permettant une mise en contexte plus informée de la situation autochtone actuelle et des aspirations des peuples autochtones du Québec.
Cardinal termine son ouvrage par ces mots qui résument assez bien l'intention générale du projet: «Pour le bien des Premières Nations, pour le bien du Québec, il est aujourd'hui temps de construire des ponts et de faire de cette "rencontre Bouchard-Picard" le début d'une nouvelle alliance. Il y a lieu de reconnaître les alliances passées du Kebec, de les célébrer et de les renouveler dans le Québec actuel.»
***
Dalie Giroux
Collaboratrice du Devoir
***
De Kebec à Québec. Cinq siècles d'échanges entre nous
Denis Bouchard, Éric Cardinal et Ghislain Picard, Les Intouchables, Montréal, 2008, 205 pages
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé