La saga Aveos : Ça continue ...

même si le sort des travailleurs est maintenant scellé

Tribune libre

Par André Parizeau (*)
La nouvelle est passée pratiquement le 8 janvier. Au plus, pouvait-on trouver un entre-filet dans certains journaux montréalais ce matin. Pourtant, avec ce qui vient de se passer, cela scelle définitivement le cercueil dans le dossier Aveos.
Les derniers actifs de cette compagnie, qui employait jusqu'à l'hivers dernier près de 2000 ouvriers dans l'ouest de l'Île de Montréal, ont finalement été vendus dans le cadre d'une vente aux enchères à une filiale de la multinationale américaine Lockheed Martin, c'est à dire la firme qui est supposé construire les fameux F-35.
C'est le journal torontois The Globe And Mail qui a sorti le premier la nouvelle. Le montant payé par la division Kelly Aviation, de Lockheed Martin, qui est basée a San Antonio, au Texas, n'a pas été rendu publique. les items vendus incluent la batisse que possèdait Aveos dans l'ouest de Montréal, ainsi que les outils et la machinerie qui n'avait pas encore été vendu au plus offrant.
Rappelons qu'une partie de cet outillage avait effectivement été vendu l'an dernier, dans la foulée de la fermeture d'Aveos, à Lufthansa pour être déménagé dans ses usines déjà existantes ailleurs dans le monde, soit en premier lieu en Europe, ainsi qu'en Chine. Lufthansa n'a pas vraiment d'opérations d'entretien en tant que telle en Amérique du Nord.
Une autre partie de cet outillage avait d'autre part été vendu à une firme basée à Calgary et une autre à Yellowknife. Aucune de ces compagnies n'avaient d'opérations au Québec, ni ne prévoient en avoir non plus.
Une quatrième compagnie, Avianor, basée à Mirabel, fait aussi partie des preneurs, mais ne s'est jamais engagé à reprendre aucun des anciens employés d'Aveos. Une cinquième compagnie, Premier Aviation, a aussi une usine à Trois-Rivières, mais elle en a aussi ailleurs aux États-Unis, et personne ne s'est vraiment s'il y a aura ou non création de nouveaux emplois à Trois-Rivières, ni non plus si certains ex-employés d'Aveos seront alors réembauchés. Une autre encore, Aviation Services, est basée en Illinois, aux États-Unis. Finalement, une compagnie, basée en Grande-Bretagne, et appelée AJ Walter, prévoit réembaucher autour de 200 ouvriers d'Aveos, mais leurs salaires et les avantages sociaux auxquels ils auront alors droit seront par contre moindre que ce qu'ils avaient auparavant.
Le président pan-canadien du district 140 de l'Union internationale des machinistes (AIM-FTQ-CTC-AFLCIO), qui représente quelques 15 000 ouvriers de l'aéronautique à travers le Canada, ce qui incluait en particulier les ouvriers d'Aveos au moment de la fermeture, a annoncé qu'une entente serait intervenue entre la filiale de Lockheed Martin et le syndicat pour réembaucher environ une centaine d'ouvriers d'Aveos dans les locaux de leur ancien employeur à Montréal, et que ceux-ci pourront également bénéficier d'une convention collective similaire à ce qu'ils pouvaient avoir avant. Bien faible consolation !
Les nouvelles opérations de Kelly Aviation à Montréal, propriété de Lockheed Martin, lui permettront notamment de pouvoir faire l'entretien de certains des moteurs d'avions de Bombarbier ainsi que ceux d'Embraer, qui est le principal concurrent de Bombardier. Ils pourront aussi travailler sur les moteurs du Airbus 320.
Il n'est cependant pas clair si l'ensemble de l'outillage, racheté par Kelly Aviation, sera conservé à Montréal, ou si une partie de celui-ci sera rapatrié ailleurs, comme la plupart des autres compagnie acheteuses ont fait.
Entre temps, la question de savoir où les avions de la flotte d'Air Canada sont désormais entretenus, -- puisqu'il n'y a plus aucune entreprise oeuvrant au Canada capable de géer une telle flotte, comme le faisait avant Aveos ainsi qu'Air Canada elle-même (avant qu'elle revende ses propres employés à Aveos dans le cadre d'un projet de privatisation) --, reste toujours sans réponse.
La seule chose désormais vraiment claire est le fait que la majorité des ex-travailleurs d'Aveos ont été sacrifié sur l'autel de la sacro-sainte loi sur la recherche du profit maximum. C'étaient des travailleurs très spécialisés qui auront toute les difficultés du monde à se retrouver un travail équivalent, aussi bien rémunéré.
C'est comme si on voulait en même temps laisser flotter dans l'air, un flou sciemment entretenu, de manière à ce qu'on puisse encore penser que nous vivons dans le "plus meilleur pays au monde" (dixit l'ex premier ministre canadien Jean Chrétien) ...
Pour ce qui est des procédures judiciaires que le gouvernement québécois, sous la gouverne de l'ancien premier ministre Jean Charest, avaient intentés en disant vouloir tout faire pour empêcher le démantèlement des actifs d'Aveos, force est de constater que ce que nous avions dit dès le départ à ce propos s'est effectivement réalisé. Ces procédures n'étaient que pour la facade et le tout était pipé d'avance.
Tout ce gachis fut orchestré de main experte par la direction d'Air Canada, laquelle symbolise à bien des égards un bel exemple de "Who's who" en provenance du monde des affaires et des milieux politiques pro-monde des affaires.
La plupart des membres du Conseil d'administration d'Air Canada, vivant au Canada, sont liés d'une manière ou d'une autre au Parti libéral du Canada ou du Parti libéral du Québec, ou encore les deux. À ceux-là, on peut aussi souligner la présence d'un ancien leader du NPD, Roy Romanov, de même que de Pierre Marc Johnson, ex-chef du PQ, depuis recyclé en spécialiste du libre-échange (il était membre de l'équipe de négociation du Canada dans les négociations visant à la signature d'une entente de libre-Échange avec l'Union européenne) et jusqu'à récemment un des conseillers seniors de l'ex-premier ministre Jean Charest.
Il ne manquait à cette liste qu'au moins un digne représentant de la garde rapprochée du conservateur Stephen Harper. Depuis septembre dernier, ce manque a cependant été comblé puisque le nouveau vice-président d'Air Canada, responsable au développement stratégique et aux relations gouvernementales, est en fait un ancien chef de cabinet de Stephen Harper.
Jusqu'à la fin de 2011, il y avait également, comme membre du conseil d'administration d'Air Canada, Arthur Porter, qui était aussi, et en même moment, président du Conseil d'administration du Centre de santé universitaire de McGill (CUSM), ainsi que président du Comité de surveillance des activités de renseignement et de sécurité, chargé de surveiller les activités du SCRS canadien.
C'est donc dire que ce Porter participa aux décisions pour démanteler Aveos. Cela adonne en même temps que ce même Arthur Porter fait actuellement l'objet d'une enquète de la part de l'escouade Marteau pour possibles fraudes, impliquant à la fois SNC-Lavalin et ... Tony Arcuso. Parmi ses relations d'affaires, on retrouve en plus un certain Ari Ben Menashe qui serait un trafiquant international d'armes ayant son pied à terre à Montréal et dont la maison de Westmount était récemment l'objet d'un attentat à la bombe. On retrouve aussi ... Philippe Couillard, un des 3 principaux aspirants à la course pour la position de prochain chef du Parti libéral du Québec.
Ah ! J'oubliais ce même Arthur Porter aurait depuis quitté le pays et serait ... en fuite. Personne ne saurait où il serait exactement. Il serait en même temps aussi relié à une autre histoire de fraude, impliquant cette fois une histoire de construction d'un hôpital de 30 lits aux îles Turks et Caicos, dans les Antiles, qui aurait coûté en PPP près d'un demi milliard de dollars. Ce qui est assez cher pour seulement ... 30 lits. Les Îles Turks et Caicos ont une population totale de 40 000 habitants et le buget annuel total du gouvernement là-bas se limiterait à quelques 700 millions.
Aveos, de son côté, continue encore à exister à l'extérieur du Canada et aurait notamment des installations en Amérique Centrale. Personne ne sait par contre qui se cachaient et se cachent toujours derrière cette compagnie privée, enregistré dans des paradis fiscaux.
(*) André Parizeau est le chef du Parti Communiste du Québec (PCQ); ce texte est également accessible sur le site Internet : www.pcq.qc.ca .

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Chef du Parti communiste du Québec (PCQ), membre fondateur de Québec solidaire, membre du Bloc québécois, et membre de la Société Saint-Jean Baptiste de Montréal (SSJBM)





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