Il ne se passe pas trois jours sans que le gouvernement Harper, en poste parce qu'«arrivé premier dans un concours de circonstances», dirait Coluche, ne donne quelques coups de hache dans la réputation du Canada et dans le respect dû aux personnes d'ici et d'ailleurs: c'est Omar Khadr que l'on garde en prison contre la décision du tribunal, contre l'opinion mondiale et contre le sens commun; ce sont, hier, les visas brutalement imposés aux Mexicains et aux Tchèques; c'était, avant-hier, Abou Diouf, ex-président du Sénégal, secrétaire général de la Francophonie, que l'on traitait à l'aéroport comme un vulgaire présumé trafiquant de drogue; c'est encore le durcissement des peines carcérales contre les jeunes; ce sont les dépenses faramineuses en quincaillerie militaire en tout genre; c'est le mépris de tout ce qui a trait à la culture; c'est le refus de s'opposer à l'exécution de Canadiens condamnés à mort à l'étranger; c'est Abousfian Abdelrazik, illégalement interdit de rentrer chez lui, au Canada, et retenu à Khartoum pendant la bagatelle de six ans, etc.
Survivant du «bushisme», le gouvernement Harper pourrait aisément être remisé à tout jamais puisqu'il ne tient en place qu'en raison du soutien que lui offrent Michael Ignatief et ses libéraux. Pompeux et nous prenant pour des valises, Ignatief, en comique qui s'ignore, se contente d'affirmer sans rire qu'il a «mis ce gouvernement sous probation» alors qu'en réalité, un aveugle le verrait, il ne fait que le tenir à bout de bras et accepter de lui être asservi.
Stéphane Dion (Dieu ait son âme politique!) s'était résolu à mettre un peu d'eau néo-démocrate et bloquiste dans le vin libéral et à sacrifier la gloriole de son parti pour l'intérêt supérieur de la population canadienne: il avait conclu une entente de coalition avec le NPD et le Bloc québécois dans le but de défaire le gouvernement conservateur et de le remplacer en toute légitimité. Ensemble, ces trois partis représentent la majorité du vote populaire (53 %) et rassemblent la majorité des sièges aux Communes (163 députés sur un total de 308, soit 20 de plus que les conservateurs). Ensemble, ces trois partis reflètent donc la volonté populaire majoritaire. Mais voilà, Dion dut malheureusement céder sa place (je n'aurais jamais cru, personnellement, pouvoir un jour exprimer pareil regret!) à son lieutenant Ignatief.
«Ponce Pilate nouveau genre» Ignatief a préféré laisser Harper sévir, s'en laver les mains tout en s'en rendant néanmoins objectivement solidaire, dans l'espoir que son parti finisse par remonter dans les sondages et, éventuellement, qu'il puisse former, seul, un gouvernement majoritaire. Et lui, alors, deviendrait enfin une sorte de nouveau Trudeau... Avec Coderre dans le rôle de Chrétien.
Qu'entre-temps le Canada soit laissé aux mains d'un parti parfaitement réactionnaire qui ne détient qu'une minorité de sièges et qu'une faible part du vote populaire (37 %), qui mène une politique d'extrême droite et qui se permet toutes les exactions, tout cela importe peu: l'important est de tout tenter, y compris au mépris des intérêts fondamentaux du pays, pour sauver le parti libéral fédéral et la place dont rêve Michael Ignatief d'occuper dans l'Histoire!
Combien de temps encore ce cirque va-t-il durer? Il faudrait que les forces politiques indépendantes de ce pays réclament, à grands cris et de toute urgence, que le parti libéral respecte le vote exprimé lors des dernières élections et revienne à la raison et à l'idée de coalition de manière à nous libérer, démocratiquement, de Harper et de sa clique. Car quoiqu'en pensent Michael Ignatief et son entourage, telle est la volonté populaire exprimée lors de la dernière élection: Harper, on ne le répétera jamais assez, ne détient la majorité ni des sièges ni des votes! Il ne détient donc son pouvoir que de la vaniteuse ambition libérale: attendre le moment propice pour arracher, à lui seul et pour lui seul, le pouvoir total! Entre-temps, que le peuple subisse ce qu'il n'a pas choisi.
Tant que le parti libéral fédéral ne renoncera pas à son ambition de retrouver son pouvoir exclusif historique, à sa suffisance et à son arrogance, il devra être tenu coresponsable des politiques délétères du gouvernement actuel puisqu'il le soutient et que, sans ce soutien, ce gouvernement tomberait.
Comme la veut la sagesse populaire, celui qui tient la poche est aussi coupable que le voleur qui la remplit.
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