Lafarge Canada a déposé une requête hier en Cour supérieure visant à faire invalider le certificat d'autorisation accordé par le ministre de l'Environnement permettant la construction de la cimenterie McInnis à Port-Daniel-Gascons, en Gaspésie.
La requête vise à assujettir la cimenterie de un milliard à la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement par le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE), d'expliquer la porte-parole de Lafarge Canada, dans un entretien.
«On croit qu'il est important que tous les joueurs d'une industrie obéissent aux mêmes règles, dit Karine Cousineau, chef de service, communications et affaires publiques. On croit que les standards environnementaux doivent être appliqués aux projets industriels, comme la construction d'une cimenterie, de la même façon pour tous et dans ce cas-ci, ce n'est pas le cas.»
Un commentaire qui a fait bondir le PDG de Ciment McInnis, Christian Gagnon. «Je vois ça comme une action désespérée de Lafarge, réplique-t-il au téléphone. Vous avez là des multinationales qui essaient par tous les moyens possibles et inimaginables d'empêcher la venue d'un projet qui va les concurrencer dans les marchés et qui va les forcer à changer leurs habitudes environnementales.»
Le patron de Ciment McInnis avance que sa nouvelle cimenterie générera, à terme, 30% de pollution de moins par tonne produite que ses concurrents.
Premier certificat
Le 3 juin 2014, le ministre de l'Environnement, David Heurtel, a accordé un certificat d'autorisation à la société Ciment McInnis sans que celle-ci fasse l'objet d'une consultation par le BAPE.
Selon le ministre, le projet n'est pas assujetti au BAPE puisqu'il s'agit d'une modification à un projet soumis au Ministère avant l'assujettissement des cimenteries à la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement, qui date du 22 février 1996.
Projet controversé d'une valeur d'un milliard, la cimenterie de Port-Daniel est financée en grande partie par des sociétés d'État. Une fois en exploitation, elle produira annuellement 2,2 millions de tonnes de ciment et sera responsable de 10% des gaz à effet de serre émis par le secteur industriel québécois.
Les demandeurs à la présente requête, Lafarge et ses alliés du moment, le Centre québécois du droit de l'environnement (CQDE) et du groupe Environnement Vert-Plus, font valoir que les promoteurs de la cimenterie n'ont jamais obtenu dans le passé l'autorisation de construire la cimenterie.
«Contrairement aux certificats délivrés depuis le certificat d'autorisation [c.a.] de 1995, il s'agit du premier certificat [le c.a. du 3 juin 2014] qui fait référence à la construction de la cimenterie, les certificats délivrés l'ayant été pour la préparation du site», lit-on dans la requête, dont la copie est disponible sur le site du CQDE.
«D'ailleurs, le c.a. Construction ne fait référence qu'à des documents et plans datés des années 2013 et 2014», est-il écrit plus loin.
Les demandeurs soulignent aussi dans leur procédure que le projet de cimenterie a doublé de taille entre la version originale du milieu des années 90 et celle ayant fait l'objet du c.a. du 3 juin 2014.
La cause pourrait être entendue sur le fond dès le 28 août, souhaite Me Michel Bélanger, du CQDE, qui se réserve le droit de demander une injonction si Ciment McInnis continuait d'aller de l'avant avec les travaux.
Travaux en cours
«Il est hors de question d'arrêter la construction de notre projet, rétorque M. Gagnon. Plus de 200 personnes travaillent actuellement sur le site, soutient-il. Chez Ciment McInnis, on n'a aucun doute sur la validité des certificats d'autorisation qu'on a.»
Le CQDE a obtenu quelques victoires contre des industriels dans le passé. En mai dernier, il a convaincu la société TransCanada, qui projette de construire un terminal maritime pour l'exportation de pétrole provenant des sables bitumineux, de suspendre ses travaux de forage à Cacouna dans le cadre d'un recours en injonction.
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