(Québec) L'Hôtel Château Laurier de Québec, voisin du Manège militaire, va à contre-courant. L'hôtel de près de 300 chambres avec une bonne clientèle de touristes américains et de Canadiens anglophones s'affiche depuis quelques mois comme un établissement «francoresponsable». L'expression a même été enregistrée.
Le pari n'était pas sans risque de se présenter avec un parti pris pour la francophonie alors que plusieurs misent plutôt sur l'anglais ou, du moins, ne mettent pas trop en évidence leurs racines françaises de crainte d'effaroucher leur clientèle anglophone.
«À partir du moment où c'est clair dans ton esprit que tu prends un engagement pour faire découvrir ton authenticité, tout ce qui peut avoir de négatif autour de ça, tu le mets de côté parce que c'est minime. Combien de gens ne voudront pas venir ici parce qu'on est francoresponsable? C'est minime. L'expérience a été très bonne jusqu'à maintenant», a affirmé, au cours d'une entrevue au Soleil, le président et directeur général du Château Laurier, Alain Girard.
L'an dernier, M. Girard a reçu le titre d'hôtelier de l'année de l'Association des hôteliers du Québec. En 2010, le Château Laurier s'est vu décerner le prix de l'entreprise de l'année dans la région de Québec dans la catégorie de la moyenne et grande entreprise par la Chambre de commerce.
«Je ne vois rien de négatif de mettre en évidence le fait français, la francophonie. Au contraire, je ne vois que du positif. C'est ce qui nous démarque peu importe le marché, que ce soit le marché des congrès, celui des voyages organisés, les marchés d'affaires et d'agrément. C'est ce qui nous distingue le plus», a ajouté M. Girard.
Si le français prédomine au Château Laurier, il n'en reste pas moins que les clients peuvent être servis dans au moins quatre langues en plus du français, soit l'anglais, l'espagnol, l'allemand et le japonais.
«On a toujours été fier du fait français, d'être francophone. On s'est toujours efforcé d'accueillir nos clients en français. Le premier contact et le dernier se font en français. Les chansons dans les espaces publics sont toutes en français 24 heures sur 24», a dit M. Girard.
«Quand je vais à l'extérieur, ça ne me dérange pas que les autres soient authentiques. Je vais les visiter, les découvrir parce qu'ils sont authentiques. Quand les touristes viennent à Québec, je me donne une responsabilité de leur faire découvrir la francophonie et leur montrer que Québec est unique en Amérique», a-t-il poursuivi.
La famille Girard, qui est propriétaire du Château Laurier, se défend d'avoir posé un geste politique en s'affichant comme «francoresponsable». Pour éviter qu'on lui colle une étiquette politique, l'hôtel s'est associé au Musée de l'Amérique française et au Centre de la francophonie des Amériques. Les clients de l'hôtel ont des billets gratuits pour le Musée et le Centre. De son côté, le Château Laurier affiche sur sa façade une grande annonce de l'exposition Partir sur la route des francophones présentée au Musée de l'Amérique française.
Avec les deux institutions, l'hôtel a lancé l'an dernier une grande collecte de livres en français pour les enfants d'âge scolaire et préscolaire. Environ 2000 livres apportés par les clients de l'hôtel ont été recueillis. Ils seront envoyés en Haïti en 2011.
L'entreprise soutient également les artistes de la relève francophone. «On a donné un coup de main à Annie Poulain pour produire son deuxième CD de jazz en français. Nous sommes aussi partenaire principal de Vitrines sur la relève, qui est présenté au Palais Montcalm», a indiqué M. Girard.
Le choix de s'afficher comme le premier hôtel «francoresponsable» des Amériques est également une décision d'affaires. «L'idée de la francophonie est venue presque par obligation dû au fait que nous sommes un hôtel indépendant, que nous soyons rattachés à aucune chaîne, qu'on ne fait partie d'aucun regroupement et qu'on a maintenant une capacité d'hébergement qui nous permet de compétitionner avec les grandes chaînes. On doit se fier sur nous-mêmes pour se démarquer. On ne peut compter sur les références d'une centrale de réservations, des conseils de marketing d'une grande chaîne», a expliqué l'homme d'affaires.
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Miser sur la langue française au Festival d'été et dans la pub
(Québec) Le pdg de l'Hôtel Château Laurier souhaite qu'une scène soit consacrée à la francophonie et aux artistes francophones au prochain Festival d'été sans remettre en question la présence d'artistes internationaux anglophones de grande renommée. «Ce serait une idée merveilleuse. Le Festival d'été a besoin de gros noms. Il y en a du côté anglophone et aussi du côté francophone. Chez les francophones, il faut peut-être
se prendre plus longtemps d'avance», a-t-il dit.
Alain Girard estime que c'est un non-sens que la publicité faite aux États-Unis pour attirer des touristes américains au Québec ne mise pas sur le côté distinctif de la présence d'une culture francophone. «Qu'est-ce qui nous empêche d'être authentiques? Je ne vois pas d'argument et surtout pas un argument économique qui pourrait nous empêcher de mettre en évidence notre authenticité. Oui, on va en perdre [des touristes], mais on va en gagner plus qu'on va en perdre», a-t-il soutenu.
L'Office du tourisme de Québec soulignera notre différence francophone dans ses prochaines campagnes de publicité sur le marché américain. Quant aux interventions du gouvernement du Québec et celles de la Commission canadienne du tourisme, il ne semble pas que le côté distinctif francophone sera mis en évidence.
Une expo plutôt que des JO
L'hôtelier de l'année au Québec en 2009 n'est pas emballé à l'idée d'avoir les Jeux olympiques à Québec. «Si on me donnait le choix, j'aimerais avoir une exposition universelle à Québec au lieu des Jeux olympiques. Une exposition dure six mois au lieu de trois semaines. Une exposition universelle est plus accessible aux gens que les Jeux olympiques. En plus, les installations des pays pour l'exposition vont rester après. Au lieu d'investir de notre argent pour les Olympiques, ce sont les pays qui apporteraient de l'argent neuf à Québec avec une exposition universelle», a-t-il fait valoir.
Le Château Laurier, premier hôtel «francoresponsable»
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