Depuis sa fondation, le PQ s’est toujours voulu un modèle de démocratie interne, qui l’a parfois mené au bord de l’implosion. En contrepartie, il a pu compter sur des militants dont le nombre et le dévouement ont longtemps fait l’envie des autres partis.
Cet investissement de temps et d’argent avait cependant un prix : une rare indépendance face à la direction du parti, qui a été tolérée plus que dans toute autre formation politique. Les statuts du PQ protègent cette liberté comme nulle part ailleurs. « Le droit à la dissidence et à la critique, à l’intérieur du Parti, doit être constamment respecté », peut-on y lire.
Les militants ont abondamment usé, voire abusé, de ce droit. Pendant des années, les conseils nationaux et les congrès tournaient systématiquement au psychodrame. Les médias se faisaient un plaisir de faire écho à une faction aussi bruyante que minoritaire, qui remettait en question les orientations et l’autorité du chef.
Depuis une quinzaine d’années, on s’est employé tant bien que mal à changer cette culture de la contestation qui donnait au PQ l’image d’un parti perpétuellement en chicane. La fréquence des conseils nationaux a été réduite et on a pris l’habitude de débattre des sujets les plus litigieux à huis clos.
Le processus de consultation de la base que s’impose le PQ n’en demeure pas moins très lourd. En période d’élection, la répartition très rigide des revenus entre le « national » et les circonscriptions constitue une entrave qui peut être très dommageable.
Le mode de fonctionnement du parti doit sans doute être revu, mais en faire une priorité donne l’impression de vouloir refaire la décoration intérieure d’une maison qui tombe en ruine.
Le chef intérimaire, Pascal Bérubé, a déclaré mercredi que le bilan de la dernière campagne électorale était maintenant terminé. Alors que les 10 rescapés de l’hécatombe du 1er octobre sont réunis en caucus présessionnel à Sainte-Agathe-des-Monts, il estime qu’il faut plutôt regarder vers l’avenir.
Que M. Bérubé résume le problème en disant que son parti n’a pas réussi à s’imposer comme solution de remplacement aux libéraux est un euphémisme qui n’a rien d’étonnant. Le PQ a une longue habitude du déni, même si la désaffection progressive qui l’a réduit au rang de tiers parti est visible depuis plus de vingt ans.
Les rapports d’analyse qui ont été rédigés à la suite de l’élection demeureront confidentiels, a indiqué le chef intérimaire, mais cela ne change rien à la réalité. Si certains semblent encore se bercer de l’illusion que le jeu de l’alternance reportera le PQ au pouvoir un jour ou l’autre, d’autres en sont arrivés à la conclusion qu’il n’arrivera jamais à retrouver la confiance de la population et qu’il doit faire place à une nouvelle formation.
La question est de savoir qui, au sein de la députation, osera le dire publiquement et agir en conséquence. Renoncer à l’appellation « Parti québécois » briserait sans doute le coeur de gens qui y ont consacré une grande partie de leur vie, mais il faut savoir distinguer l’essentiel de l’accessoire.
En attendant, on fait comme si de rien n’était. On s’affaire à préparer la reprise des travaux à l’Assemblée nationale, le 5 février. C’est le Conseil national qui, à la fin de mars, fixera l’échéancier de la suite des choses. Qu’on décide de tenir une course à la chefferie avant un congrès d’orientation ou l’inverse, ce ne sera toutefois pas avant 2020.
Le couronnement d’Yves-François Blanchet au Bloc québécois permet au PQ de clore officiellement le chapitre du pénible règne de Martine Ouellet, durant lequel les relations entre les deux partis frères se sont sérieusement refroidies.
Durant la course à la succession de Pierre Karl Péladeau, Mme Ouellet avait indisposé l’ensemble de ses collègues péquistes en les qualifiant de « provincialistes » et son opposition catégorique au report du référendum rendait la collaboration difficile.
L’élection du 1er octobre a clairement démontré que l’organisation du PQ n’est plus ce qu’elle était. D’ailleurs, il semble douteux que les 70 000 membres qu’il dit compter correspondent à la réalité.
Ce qui reste de la machine péquiste sera néanmoins mis à la disposition du Bloc, ce qui exclut une course à la chefferie ou un débat sur son avenir d’ici l’élection fédérale.
Il n’y a d’ailleurs aucune raison de précipiter les choses. Le gouvernement Legault est en pleine lune de miel et la prochaine élection québécoise n’aura lieu qu’à l’automne 2022.
Beaucoup d’eau coulera sous les ponts d’ici là, mais les débuts du nouveau gouvernement en impressionnent plus d’un, y compris au PQ. Le court règne de Pauline Marois a simplement été l’exception à la règle voulant qu’un gouvernement ait généralement droit à deux mandats. Prendre le temps de réfléchir est une bonne chose, mais le PQ ne devrait pas attendre qu’on l’oublie complètement.