Le défit continental du cannabis dans les Amériques

Pendant que Harper prend parti en Israël

Tribune libre


Depuis dimanche, Stephen Harper reçoit un accueil royal à Tel-Aviv et Jérusalem. 208 Canadiens dont 11 rabbins, 27 PDG et quelques lobbyistes finement « pré scellées » accompagnent le premier ministre dans son périple au Proche-Orient. Tous sont susceptibles de garnir généreusement les coffres du Parti Conservateur d’ici l’élection générale de 2015.
Cependant, préférant habituellement les Tim Horton à la tribune des Nations-Unies, construire des prisons et acheter de couteux F-35; Harper 1er persiste à cautionner le seul pays au monde à élever des murs. Ceux d’un rétrograde et moyenâgeux apartheid qui isole et emprisonne hommes, femmes et enfants et tout un peuple malgré un record inégalé de 65 résolutions votées contre Israël par les pays membres de l’ONU depuis 1947.
Pourtant, l’ONU a décrétée 2014 Année internationale de solidarité avec le peuple palestinien.
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Dans un tout autre registre, dimanche toujours, en entrevue exclusive avec le réputé magazine New-Yorker, Barack Obama - notre voisin et premier Président noir des USA - osait révéler que fumer du pot n’est pas plus dangereux que de boire de l’alcool. En bon père de famille et tout en mettant en garde ses deux adolescentes, Sasha et Malia, il est allé jusqu’à « regretter que les jeunes des minorités pauvres dans son pays soient davantage susceptibles d’être condamnés à la prison pour avoir fumé de l'herbe que les jeunes des milieux riches ». Pour Obama cependant, légaliser la marijuana ne règlera pas tous les programmes sociaux.
L'habile déclaration du président vise ni plus ni moins à mieux positionner son Parti démocrate d'ici un tsunami de référendums à venir sur le sujet dans une vingtaine d'états américains lors des prochaines élections américaines ; comme ceux maintenant en vigueur depuis le 1er janvier dans l'État de Washington et du Colorado.
En toute humilité québécoise et sur la base de notre notoire mais fragile tradition en santé publique en net manque de financement, j'oserai lui rappeler - comme l'ont fait 32 Chefs d'État sur 34 en conclusion du Sommet des Amériques de juin 2012 à Carthagène en Colombie - que l'urgence de légaliser et de contrôler la qualité du cannabis doit demeurer l'enjeu socio sanitaire de l'heure, spécialement chez nous au Québec en cette Semaine de prévention sur le tabagisme qui doit nous rappeler que le petit joint vendu ici dans les cours d'école est 470 % plus puissant qu'il y a 20 ans et 11 fois plus puissant qu'une simple cigarette. La guerre à la drogue étant de surcroit reconnue comme un véritable échec et le plus vaste détournement de fonds publics du siècle.

Ce défi de la légalisation déstabilisera les groupes mafieux qui contrôlent tout le marché continental, autant dans la criminalisée Mexico, 20 millions d'habitants, qu'à Montevideo (Uruguay), qu'à Montréal où les caïds se cherchent un nouveau chef que dans des capitales comme Washington, Ottawa et Québec.
Mieux, une étatisation au Québec par une production et des emplois agricoles spécialisées dans les coops régionales et une vente contrôlée en SAQ et en pharmacies serait sans conteste "un petit pas pour l'homme (et la femme) et un grand pas pour l'humanité".
Comme l'est en quelque sorte l'actuel programme imparfait d'assurance Medicare du Président Obama introduit âprement et malgré de graves ratés informatiques qui permettront somme toute d'inéluctables économies et un système de santé nettement plus accessible, tant pour les jeunes garçons et les jeunes filles que les ainés, dans la plus riche démocratie au monde.

Squared

Gérard Briand46 articles

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L’auteur habite Rosemont. Détenteur d’une MBA (spécialisée en entreprises collectives) et collecteur de dons rattaché à des organisations nationales bénévoles, il est également chargé de cours en gestion philanthropique aux niveaux collégial et universitaire.





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4 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    23 janvier 2014

    Merci M. Cloutier! Tout comme M. Nolin et Mme Bertrand, vous avez été il y a 20 ans une inspiration pour moi et bon nombre de collègues qui se sont impliqués dans le mouvement pour la légalisation.
    Cela dit, l'adage «les premiers seront les derniers» semble être d'actualité puisqu'après leur leadership des années 1970-2005, le Canada et le Québec prennent un retard considérable en matière de cannabis – devancés par les USA ayant touché le fond du baril en matière sociale plusieurs années avant nous.
    Le gouvernement du Québec, qui a juridiction en matières d'agriculture, de santé, de tourisme et d'éducation, refuse inexplicablement d'occuper ses champs de compétence et laisse tout le terrain à Ottawa. Il ne suffirait pourtant que d'une politique de non-intervention en matière criminelle pour désengorger le système judiciaire et laisser plusieurs secteurs de notre économie se développer librement, dans le respect des normes sociales et sanitaires déjà en place pour le tabac et l'alcool.

  • Jean-Pierre Bélisle Répondre

    22 janvier 2014

    Je vous laisse le travail d'élucubration (au sens noble) sur le "défi dans les Amériques". Moi, ce qui m'intéresse, c'est le Québec, sa jeunesse et notre avenir collectif.
    Il y a approximativement un peu plus de 150000 québécois que le code criminel fédéral a taré d'un casier judiciaire en relation à la possession simple de cannabis. Chaque année (approximativement), près de 8000 Québécois se retrouvent accusés relativement à leur consommation de marijuana. C'est là où réside le scandale et la tragédie.
    Tous ceux qui ont été condamnés ne peuvent plus traverser la frontière américaine. Nombre d'eux ont perdu leur emploi et ont très certainement encouru par la suite des difficultés majeures à obtenir des emplois rémunérateurs en raison de leur dossier judiciaire.
    Pour les plus jeunes, encore aux études c'est la fin des espoirs. Leur casier judiciaire sera l'équivalent conséquentiel d'une main et d'un pied coupés sous l'empire de la Charia.
    S'il y a une analogie à faire avec les noirs américains, c'est Pierre Vallières qui l'a faite en 1968 avec son livre autobiographique "Nègres blancs d'Amérique".
    Annuler rétroactivement tous les casiers judiciaires des québécois condamnés pour possession simple de cannabis sera l'une des premières mesures à prendre dans un Québec indépendant.

  • Archives de Vigile Répondre

    22 janvier 2014

    J'ai été le seul avocat au Québec à plaider ce genre d'arguments sur le cannabis pendant 20 ans devant les tribunaux et à contester la loi dite alors "sur les stupéfiants", dont la définition était complètement arbitraire, pendant que mes confrères me regardaient avec mépris et s'emplissaient les poches avec la prohibition, qui faisait et fait l'affaire toujours des trafiquants, des policiers et des gardiens de prison et autres auxiliaires de la justice, comme les centres dits de désintoxication, dans cette grande industrie de la "drogue".
    Aujourd'hui que j'ai pris ma retraite, je réalise que j'avais raison et que mes efforts ont commencé à porter des fruits et que le simple gros bon sens va finir par s'imposer.
    C'était aussi le combat d'une vie pour la criminologue Marie-Andrée Bertrand, décédée l'an dernier et celui du sénateur conservateur Pierre-Claude Nolin qui a présidé le comité du Sénat canadien sur le cannabis et qui a recommandé pour le cannabis un régime de règlementation comme il existe pour le tabac et l'alcool.
    Le plus dur pour moi pendant toutes ces années de combat pour une chose qui m'apparaissait si évidente a été le mépris et le sarcasme que j'ai dû endurer de la part des soi-disant bien pensants, des ignorants, des imbéciles et des réactionnaires de tout acabit, particulièrement ceux qui condamnaient la "drogue" et les drogués et qui d'un même trait se donnaient des cancers de la gorge et des poumons avec le tabac et des cirrhoses du foie avec la consommation abusive d'alcool, les deux drogues les plus nocives de la planète.
    C'est comme cela que je me suis immunisé en partie contre la bêtise humaine, qui il faut constamment le répéter, est incommensurable, comme nous le démontre un fois de plus l'opposition à la charte de la laïcité.
    Amen
    Pierre Cloutier

  • Archives de Vigile Répondre

    22 janvier 2014

    "dans la plus riche démocratie au monde."
    C'est vrai,
    Mais la nuance qu'il faut faire lorsqu'on parle des États-Unis, c'est que la richesse est très très concentrée chez le 1% le plus riche du pays.
    Pour ce qui est de M. Harper, son entière carrière politique a été basée sur la défense des plus forts et un certain détachement en ce qui concerne la situation des citoyens les plus fragiles de la société.